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Fin d’année (un peu) festive

Liège
Opéra royal de Wallonie
12/21/2018 -  et 23*, 27, 29, 31 décembre 2018, 2 janvier (Liège), 5 janvier (Charleroi) 2019
Gioachino Rossini: Le Comte Ory
Antonino Siragusa (Le Comte Ory), Jodie Devos (Comtesse Adèle), Josè Maria Lo Monaco (Isolier), Enrico Marabelli (Raimbaud), Laurent Kubla (Le Gouverneur), Alexise Yerna (Dame Ragonde), Julie Mossay (Alice), Stefano De Rosa (Mainfroy), Xavier Petithan (Gérard), Ludivine Scheers, Réjane Soldano, Stefano De Rosa, Benoit Delvaux, Alexei Gorbatchev (Coryphées)
Chœurs de l’Opéra royal de Wallonie, Pierre Iodice (chef des chœurs), Orchestre de l’Opéra royal de Wallonie, Jordi Bernàcer (direction)
Denis Podalydès (mise en scène), Eric Ruf (décors), Christian Lacroix (costumes), Stéphanie Daniel (lumières)


(© Opéra royal de Wallonie-Liège)


Après trois reprises consécutives, l’année à l’Opéra royal de Wallonie se termine avec Le Comte Ory (1828), une coproduction avec l’Opéra-Comique, créée il y a un an. A priori, cette collaboration a de quoi rassurer, quelques mois après Le Domino noir, un des meilleurs spectacles de l’année. Celui-ci suscite toutefois moins d’enthousiasme. Denis Podalydès transpose cette histoire de séducteur volage et de travestissement du temps des croisades à l’époque de la composition, dans une église – scénographie belle et simple, baignée de remarquables lumières et agrémentée de costumes de bon goût, signés Christian Lacroix.


Le public rigole assez peu: le sociétaire de la Comédie-Française traite le livret avec subtilité et en profondeur, comme le confirme l’entretien reproduit dans le programme. La richesse des intentions n’empêche pas ce spectacle de demeurer cohérent et de se montrer de temps à autre un peu subversif, gentiment osé, cependant sans surenchère, toujours dans une juste mesure. Mais cette production peut décevoir ceux qui attendent une comédie dévergondée pour terminer l’année. Malgré la précision de la direction d’acteur, le rythme de la représentation se révèle variable et suscite même l’ennui par moments. Cette mise en scène se situe toutefois au-dessus de la moyenne par rapport à ce que cette maison d’opéra propose habituellement, et confirme que les coproductions dépassent le plus souvent en intérêt les réalisations conçues exclusivement par et pour l’institution liégeoise – pour preuve, l’opéra d’Auber monté en février.


Les Parisiens eurent droit à une distribution francophone, les Liégeois doivent s’accommoder d’accents étrangers. Dans le rôle-titre, Antonino Siragusa se profile en authentique ténor rossinien. Son chant, marqué par un timbre un peu trop nasal, affiche beaucoup de justesse stylistique, malgré une tendance à passer en force dans l’émission haute. Valeur sûre, désormais, Jodie Devos paraît, en comparaison, se plier au style de ce répertoire avec moins d’évidence. Elle raffine cependant la ligne de chant, atteint aisément les aigus et contrôle un vibrato assez généreux, le tout servie avec un timbre savoureux. Cette soprano, qui, à Paris, il y a un an, interprétait Alice dans cette coproduction, gagnerait à reprendre la Comtesse dont elle dresse assez finement le portrait.


Josè Maria Lo Monaco accomplit en Isolier la prestation la plus complète, malgré un physique trop féminin. La mezzo-soprano met en valeur un timbre séduisant et cultive un bel art du chant, avec des phrasés soignés et une émission de qualité. Choisi pour incarner Raimbaud, Enrico Marabelli assure sans difficulté le grand air du second acte, mais ce passage très savoureux ne possède pas l’abattage attendu. Deux chanteurs habitués de cette scène se glissent dans la peau du Gouverneur – Laurent Kubla, vocalement neutre, mais avec une certaine prestance – et dans celle de Dame Ragonde – Alexise Yerna, avec une articulation admirable, mais dont la voix laisse peu de bons souvenirs. Julie Mossay, quant à elle, se fait positivement remarquer dans le petit rôle d’Alice.


La principale insatisfaction provient de la direction musicale, trop inégale. Dans cet ouvrage à la charnière entre l’opéra-bouffe et l’opéra-comique, le chef compte autant que les chanteurs, sinon davantage. Mené par Jordi Bernàcer, l’orchestre alterne entre des moments bien enlevés et d’autres quasiment dépourvus de nerfs et d’élégance, dans le trio du second acte entre le Comte, la Comtesse et Isolier, par exemple, assez bien cerné théâtralement, mais sans âme – les musiciens tendent aussi à couvrir les voix. Les pupitres se hissent à leur niveau habituel, et les bois, en particulier, s’illustrent assez brillamment, mais cela ne compense pas le déficit de finesse et de continuité que nous observons dans la fosse par rapport à la scène. Les chœurs complètent le plateau avec bonne volonté: ces messieurs déguisés en religieuses prennent même un malin plaisir à dévoiler leurs dessous. En dépit de ces réserves, cette production se trouve bien à sa place dans le calendrier de la saison et l’année se termine sur une note positive à l’Opéra royal de Wallonie.



Sébastien Foucart

 

 

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