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Il Progetto Cioccolato, ou : "Maure et Transfiguration" dans la Cité Rose

Toulouse
Théâtre du Capitole
10/05/2001 -  et 7, 11, 14, 17, 20 octobre 2001
Giuseppe Verdi : Otello
Vladimir Galouzine (Otello), Cristina Gallardo-Domas (Desdemona), Jean-Philippe Lafont (Jago), Elena Cassian (Emilia), Tomasz Krzysica (Cassio), Luigi Roni (Lodovico), Philippe Fourcade (Montano), Claude Minich (Roderigo).
Nicolas Joël (mise en scène). Ezio Frigerio (décors).
Franca Squarciapino (costumes). Vinicio Cheli (lumières).
Choeurs et Orchestre du Capitole, Alain Lombard (direction).


Le deuxième opus de la Trilogie Shakespearienne du maître de Busseto, le "Projet Chocolat", ainsi que le nommait affectueusement Verdi, ouvrait avec faste la saison lyrique 2001-2002 du Capitole. Et puis, c'est toujours le centenaire de qui vous savez ! Visuellement parlant, le spectacle est grandiose - pharaonique même (et pourtant, ce n'est pas Aïda). Une fois n'est pas coutume, il faut s'incliner d'abord devant le somptueux décor marmoréen de celui qui fut le si précieux collaborateur de Giorgio Strehler : Ezio Frigerio. Ensuite, saluer l'artisan des lumières : Vinicio Cheli.


Ainsi le dernier acte - la chambre de Desdemona aux subtils clairs-obscurs -, est-il un concentré de Velasquez et Georges de la Tour, mâtiné d'une référence implicite à la Nuit du Chasseur, de Charles Laughton, avec Robert Mitchum et Shelley Winter voire à Zeffirelli. Toujours au plan visuel, certaines images resteront gravées dans la mémoire. Ainsi, très originale idée joëlienne, la tempête au tout début du premier acte : une gigantesque toile de cinéma sur laquelle est projeté un flot déchaîné évoquant une Mer pas calmée du tout !


Alors, pourquoi une certaine impression d'insatisfaction se fait-elle jour, quand tous les éléments sont apparemment réunis pour garantir une réussite sans faille, et emporter l'adhésion totale ? Otello est un opéra problématique. Et force est de constater qu'il convoque une équipe de marathoniens du chant, sachant toutefois offrir une variété infinie de nuances.


Honneur aux dames : Cristina Gallardo-Domas est-elle Desdemona ? Certes, l'actrice est convaincante, émouvante ; mais d'un format vocal bien modeste (que l'on entende, déjà, sa très discutable Aïda avec Harnoncourt). En fait, elle susurre d'une voix grelottante, plus qu'elle ne le cisèle, le Lied, ou chant nocturne d'adieu à la vie, au quatrième acte. Là où il faudrait un soprano plus dramatique, on subit une soubrettissima incolore à l'aigu crié, instable ; sans médium, avare de coloris. En revanche : belle Emilia d'Elena Cassian, au timbre opulent.


Egalement problématique, le rôle-titre : Vladimir Galouzine a la fâcheuse manie de se prendre pour un Heldentenor, ne dédaignant pas ici et là quelques accents véristes racoleurs. Bref, un Otello brut de décoffrage faisant surtout assaut de décibels. Mais, grâce au Ciel (si l'on peut dire), Jago est là - personnifié par un Jean-Philippe Lafont des grands jours. Stratège machiavélique fomentant son entreprise destructrice, serviteur de la force obscure, le baryton toulousain construit un être nuisible, dangereux, complexe ; à la Scarpia, avec des couleurs telramundiennes. Timbre d'acier, émission percutante, caractérisation très fouillée : irréprochable !


L'autre grand triomphateur est le Maestro Lombard, à la direction d'orchestre superlative. L'ancien directeur musical de Bordeaux démontre avec acuité les multiples affinités de Verdi avec Wagner.. Opéra symphonique, Otello lorgne souvent du côté de Tristan (duo d'amour du premier acte avec sa phrase finale - leitmotiv " un bacio, un bacio ancora ") ; de Lohengrin (la chanson du saule du quatrième acte, avec son prélude au cor anglais - instrument cher à Wagner).


Magique, ce moment du deuxième acte " Era la notte, Cassio dormia ".. Pour cette musique turgescente - le rêve érotique de Cassio - Alain Lombard caresse chaque note, avec un sens ardent du détail architectural, que Verdi aurait sans réserve approuvé. Un mot conclusif pour honorer la rigueur et la pleine santé des Choeurs ; et l'on aura, par conséquent, tout dit de cette suave source qui a su, en dépit des réserves précitées, ravir nos coeurs presque en tous points charmés.





Etienne Müller

 

 

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