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Aperçus de la relève

Paris
Conservatoire de Paris
09/29/2001 -  
Karol Beffa : Trio pour clarinette, alto et piano
Evgueni Galperine : Le Double
Betsy Jolas : Quatre Duos pour alto et piano
Julien Dassié : Sextuor « La Ronde »
Sébastien Gaxie : Promenade d’une lilliputienne



Benoît Viratelle (clarinette), Rémy Sciuto (saxophone alto), Paul Dat (alto - Beffa, Dassié), Cédric Catrisse
(alto - Jolas), Delphine Anne (alto - Jolas), Alexandre Giordan (violoncelle), Nicolas Crosse (contrebasse), Xavier Bouchaud (piano - Beffa), Marcha Koval (piano - Galperine), Maki Miura (piano - Jolas), Julien Dassié (marimba, percussions), Juraj Valcuha (cymbalum, percussions), Quatuor Onyx (Armelle Cuny, Jasmine Eudeline, Delphine Millour, Frédéric Baldassare), Guillaume Bourgogne (direction)

Associant au Conservatoire national supérieur de musique de Paris son homologue lyonnais et trois écoles étrangères (Staatliche Hochschule für Musik de Trossingen, Conservatorium d’Amsterdam et Guildhall school of music and drama de Londres), les Journées internationales de la composition organisent neuf concerts entre le 27 septembre et le 6 octobre. L’objectif est de présenter, dans leur grande diversité stylistique, les œuvres d’étudiants en composition, tout en rendant hommage à Betsy Jolas, à la fois pour ses soixante-quinze ans et pour son enseignement (analyse, composition) au Conservatoire, où elle avait succédé à Messiaen.


Doté d’un pedigree impressionnant (premier à Normale Sup’, premier à l’agrégation de musique, licence d’histoire, maîtrise d’anglais, master de philosophie, diplôme de l’ENSAE, six premiers prix de conservatoire), Karol Beffa (vingt-huit ans) ne manque pas d’ironie. Selon ses propres termes, son Trio pour clarinette, alto et piano (18 minutes) illustre « l’idée générale de transformation d’un groupe d’accords en un autre, selon les principes de thermodynamique en milieu adiabatique ». En fait, rien de très expérimental en apparence, mais une musique sagement bien faite, immédiatement séduisante, qui fait chanter la clarinette, souvent dans l’aigu, et l’alto. Si la formation instrumentale rappelle nécessairement Schumann ou Bruch, le premier mouvement, qui « conserve l’énergie globale », se caractérise par des harmonies post-debussystes évoquant lointainement le jeune Messiaen ou même Poulenc. Le deuxième mouvement, qui « illustre l’accroissement continu de l’entropie », pourrait, par son côté ludique et rythmique post-bartokien, rappeler le Ligeti du Trio pour violon, cor et piano. Fondé sur la répétition lancinante de quatre notes, le troisième mouvement « explore ce que pourrait être le premier principe en milieu non-adiabatique: l’énergie n’est pas constante, on introduit des frictions entre éléments et des ralentisseurs kinétiques »; soit, mais cela s’étire un peu trop sur la fin.


Le Double (pour piano, 7 minutes) d’Evgueni Galperine,
« champion du monde de la musique » (sic), ne fait pas allusion à la (seconde) symphonie éponyme de Dutilleux, mais à une nouvelle de Dostoïevski. D’une ambition à la fois narrative (conter la nouvelle) et conceptuelle (chaque main « représente » un personnage), la partition alterne les préoccupations de timbres et de rythmes, ces derniers étant servis par des constructions complexes et frénétiques que Nancarrow n’aurait sans doute pas reniées.


Le Sextuor (15 minutes) de Julien Dassié (vingt-huit ans) avoue également une influence littéraire, quoique plus diffuse, « La Ronde » faisant référence non pas à Schnitzler, mais à une nouvelle de Le Clézio. La formation réunie autour du chef Guillaume Bourgogne est pour le moins originale, mais bien sonnante: saxophone alto, cymbalum, marimba (et quelques percussions), alto, violoncelle et contrebasse. Stravinski (impossible de ne pas penser au cymbalum ironique du Ragtime ou de Renard), Milhaud ou Jolivet revisités, en quelque sorte, par le John Adams de la Symphonie de chambre: une musique à l’écoute des courants « post- », colorée et dynamique, éminemment rhapsodique, qui fait plaisir aux interprètes (dont le compositeur lui-même au marimba) et, je suppose, au public.


Issu du jazz, Sébastien Gaxie (vingt-quatre ans) est peut-être le talent le plus prometteur de ce concert. Audacieuse tentative, pour un compositeur qui se déclare nouveau dans la musique « savante », que de se lancer dans un quatuor à cordes, même bref (9 minutes): présentant sa Promenade d’une lilliputienne avec un sens très développé de l’auto-dérision, il s’excuse par avance pour les unissons et pour et une œuvre ressemblant à du Chostakovitch, « c’est-à-dire musique réactionnaire n’allant pas dans le sens de l’histoire ». Rien de tel, à mon sens: non seulement la conduite remarquable et le caractère fragmentaire d’un discours foisonnant rappellent bien davantage Janacek que Chostakovitch, mais la musique ne cesse de se renouveler avec une énergie et une liberté confondantes. Peu d’unissons, en définitive, mais des moments très frappants au cours desquels chaque musicien semble suivre son cours indépendamment des autres au travers de traits d’une grande virtuosité. Ceci étant, le titre reste une énigme...


Bien entendu, chacun de ces concerts comprend une œuvre de Betsy Jolas: en l’espèce, les Quatre Duos pour alto et piano (1979), écrits pour Serge Collot, marquent clairement la différence entre les essais précédemment entendus, aussi prometteurs fussent-ils, et la maîtrise d’une grande artiste, tant chacune de ces formes brèves, qui portent des titres très Grand Siècle (L’Ardente, L’Interdite, La Toute-Vive, La Grande Irénée), renferme un vaste univers expressif. Si les deux jeunes altistes qui se partagent le cycle ne déméritent pas, loin s’en faut, l’agilité féline et la précision de la pianiste Maki Miura sont proprement sidérantes.




Simon Corley

 

 

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