About us / Contact

The Classical Music Network

Paris

Europe : Paris, Londn, Zurich, Geneva, Strasbourg, Bruxelles, Gent
America : New York, San Francisco, Montreal                       WORLD


Newsletter
Your email :

 

Back

Un palimpseste musical

Paris
Philharmonie
03/30/2018 -  et 22 (Barcelona), 24 (Granollers), 26 (Versailles), 28 (Besançon) mars 2018
Johann Sebastian Bach : Markus-Passion, BWV 247 (reconstitution Jordi Savall)
Marta Mathéu (soprano, Servante), Raffaele Pé (contre-ténor), Reinoud Van Mechelen (ténor), Dávid Szigetvári (Evangéliste), Konstantin Wolff (Jésus), Victor Sordo (Soldat), Javier Jiménez-Cuevas (Judas), Julián Millán (Grand Prêtre, Centurion), Simón Millán (Pierre), Víctor Vilca (Pilate), Aina Albajar Sigalés (Témoin 1), David Hernández (Témoin 2)
Veus - Chœur d’enfants Amics de la Unió, Josep Vila i Jover (chef de chœur), La Capella Reial de Catalunya, Lluís Vilamajó (préparation de l’ensemble vocal), Le Concert des Nations, Jordi Savall (direction)


D. Szigetvári (© Tamás Talabér)


En ce vendredi, veille de week-end pascal, Bach était de nouveau à l’honneur à la Philharmonie de Paris. Si tout le monde connaît les Passions selon saint Jean et selon saint Matthieu, on a totalement oublié la Passion selon saint Marc créée le Vendredi Saint de l’année 1731, et pour cause: la partition est perdue! Pour autant, plusieurs musicologues et chefs d’orchestre ont essayé de reconstituer l’œuvre (dont l’existence est, là pour le coup, sans nul doute attestée) à partir de matériaux divers puisés ici ou là.


Place ce soir à la tentative de Jordi Savall, le chef catalan s’étant fondé sur plusieurs cantates et autres pièces chorales de Bach, au premier rang desquelles les deux Passions unanimement louées par les mélomanes. Or, et quel que soit le bien-fondé d’une telle entreprise, c’est justement là que le bât blesse. Car on aura beau faire: la cohérence des deux autres Passions fait ici défaut, la force dramaturgique du discours, l’équilibre entre les épisodes (et partant entre les chœurs et les passages solistes, ces derniers étant ici réduits à la portion congrue au fil de ces deux heures et demie de musique) et le fil directeur mélodique ont fait de ce concert un beau concert, à n’en pas douter, mais un concert où l’on restait quelque peu sur sa faim.


Et pourtant, le plateau était de tout premier niveau! A commencer par l’impeccable Evangéliste de Dávid Szigetvári qui, pour une fois dans ce type de rôle, ne se contente pas de passer les plats mais vit intensément chaque passage, narrant de façon extrêmement claire et habitée le récit de la Passion du Christ. Dans le rôle du Christ justement, la basse Konstantin Wolff fut également très convaincante, usant d’une voix puissante et sobre à la fois qui dépeignait parfaitement Celui qui subissait les outrages les plus divers sans jamais se plaindre, ni en vouloir à quiconque. Trois airs pour l’alto, deux airs pour le ténor et la soprano en plus d’un air commun à ces deux derniers: on est loin des deux autres Passions où les airs solistes sont beaucoup plus nombreux! Qu’il s’agisse de Marta Mathéu (à la voix un rien aigrelette dans son premier air «Er kommt, er ist vorhanden»), de Raffaele Pé ou de Reinoud Van Mechelen, les trois solistes chantèrent leurs airs avec professionnalisme mais aucun d’entre eux ne nous aura fait chavirer. Tel ne fut pas le cas en revanche de La Capella Reial de Catalunya d’où étaient issus plusieurs solistes occasionnels, et surtout du chœur d’enfants Amics de la Unió! Parfaitement préparé par Josep Vila i Jover, ce dernier (un des meilleurs chœurs d’enfants au monde) étonna d’emblée par la maturité de ses sonorités à tel point que le regard cherchait l’espace d’une seconde les sopranos et altos adultes tant le côté enfantin des voix avait disparu. D’une grande souplesse et d’une non moindre réactivité, doué de toutes les intonations possibles, implorant («Bin ich’s?» demande-t-il au Christ pour savoir si c’est lui qui va plus tard Le trahir), moqueur («Weissage uns»), doté souvent d’une ampleur assez impressionnante («Ich will hier bei Dir stehen», concluant la première partie de la Passion), il démontra d’extraordinaires qualités justifiant son statut actuel.


Moins sollicité ou, surtout, moins mis en valeur que dans bien d’autres œuvres ou programmes conçus par Jordi Savall, Le Concert des Nations n’en fut pas moins excellent, à l’image de son violon solo Manfredo Kraemer, qui accompagna avec beaucoup de justesse l’air de la soprano «Angenehmes Mordgeschrei!». Dirigé avec toujours beaucoup de retenue par son chef habituel, il participa donc pleinement à la réussite d’une soirée où le public (fidèle jusqu’au dernier siège, comme souvent pour la venue de Jordi Savall) clama son enthousiasme, sans doute davantage à l’adresse des artistes (voire du seul chef) que d’une œuvre dont on espère un jour trouver enfin le manuscrit, authentique cette fois-ci.


Le site de Jordi Savall, du Concert des Nations et de la Capella Reial de Catalunya
Le site de Marta Mathéu
Le site de Raffaele Pé
Le site de Reinoud Van Mechelen
Le site de David Szigetvári
Le site de Konstantin Wolff
Le site de Victor Sordo
Le site du chœur d’enfants Amics de la Unió



Sébastien Gauthier

 

 

Copyright ©ConcertoNet.com