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L’orchestre kaléidoscopique de Magnus Lindberg

Paris
Cité de la musique
03/09/2018 -  
Magnus Lindberg : Arena 2 (*) – Souvenir
Iannis Xenakis : Palimpsest (*)
Gérard Grisey : Modulations
Christian Rivet : Etoile Double (création)
Brian Ferneyhough : Time and Motion Study I

Alain Billard (clarinette basse), Eric-Maria Couturier (violoncelle), Nicolas Crosse (contrebasse)
Ensemble Intercontemporain, Matthias Pintscher, Magnus Lindberg (*) (direction)


M. Lindberg (© Saara Vuorjoki/FIMIC)


Le principe du «Grand soir» et de ses deux entractes prolonge certes le concert bien au-delà des 23 heures, mais a le mérite de creuser l’éloquence d’une programmation, voire de dessiner un arbre généalogique. Celui de Magnus Lindberg (né en 1958) plonge ses racines dans différents terreaux.


Dialogues entre groupes standards de timbres (vibrato dûment proscrit chez les cordes) et homorythmies se partagent la primauté dans Palimpsest (1979), avec des percées remarquées de la percussion sauvage de Samuel Favre et du piano régi par les mouvements browniens de Sébastien Vichard. La musique de Iannis Xenakis (1922-2001) conserve intact son effet «coup de poing»! On perçoit, décantée, son influence sur celle de son cadet Magnus Lindberg, sensible à «la dynamisation des masses» (François-Gildas Tual): Arena 2 (1996) ne compte que seize musiciens, mais l’on croirait en entendre davantage tant l’orchestration (très cuivrée) alterne textures saturées et perspectives radieuses, propulsée par l’énergie d’une écriture virtuose pour les instruments. Plus récente, la pièce Souvenir (2010), créée par Alan Gilbert et le New York Philharmonic au moment où Lindberg était «en résidence» auprès de la phalange américaine, est caractéristique de sa dernière manière. Ses détracteurs lui reprochent son postmodernisme (polarités tonales, figures mémorisables, poussées lyriques); nous frappe surtout chez le Finlandais cette faculté à élaborer une partition entièrement personnelle à partir d’un matériau parfois hétéroclite. Si la direction du compositeur a quelque chose de l’austérité d’un garde-barrière, elle est palliée par la capacité à surréagir de l’Ensemble intercontemporain.


Une fois encore, Matthias Pintscher s’affirme comme un très grand chef. En témoigne son interprétation d’une rare urgence dramatique de Modulations (1977), une œuvre que les musiciens de l’EIC connaissent bien depuis son inscription au répertoire par Pierre Boulez (qui l’a enregistrée chez Erato). Le geste est souple, mais la conduite est sûre. Rarement la musique – souvent jouée de manière extatique et dénervée – de Gérard Grisey (1946-1998) aura sonné avec une telle intensité.


De l’intensité, il en faut pour venir à bout de Time and Motion Study I (1971-77) de Brian Ferneyhough (né en 1943), qui exige du clarinettiste (l’épatant Alain Billard) l’apport de dix doigts et d’une paire de lèvres résolus à ne pas monnayer leur effort! La salle plongée dans le noir lui confère une émanation singulière. Dès-lors, il est difficile de se souvenir de la création de Christian Rivet. Contrariant les attentes (une pièce sur mesure pour la virtuosité réputée des musiciens de l’EIC), son œuvre Etoile Double empile les miniatures atones et grevées de silences comme autant de satellites placés sur orbite... dont le centre nous a échappé.



Jérémie Bigorie

 

 

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