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Hermétique et pénible

Gent
Opera Vlaanderen
04/18/2017 -  et 20, 22, 23* (Gent), 30 avril, 3, 5, 6 mai (Antwerpen) 2017
Chaya Czernowin: Infinite Now (création)
Karen Vourc’h (soprano), Kai Rüütel (mezzo-soprano), Noa Frenkel (alto), Terry Wey (contre-ténor), Vincenzo Neri (baryton), David Salsbery Fry (basse), Didier de Neck, Roy Aernouts, Gilles Wellinski, Oana Solomon, Patrick Bartsch, Benjamin Lew-Klon (acteurs)
Symfonisch Orkest Opera Vlaanderen, Titus Engel (direction)
Luk Perceval (mise en scène), Philip Bussmann (décor, vidéo, lumières), Ilse Vandenbussche (costumes)


(© Annemie Augustijns)


Depuis quelques années, des spectacles célèbrent le centenaire de la Première Guerre mondiale. En 2014, à la Monnaie, Shell Shock de Nicholas Lens n’avait pas totalement convaincu en raison d’une musique impersonnelle et d’une mise en scène trop esthétisante: cette production animée de bonnes intentions peinait à émouvoir. Deux ans et demi plus tard, à l’Opéra des Flandres, Infinite Now de Chaya Czernowin (née en 1957), créé dans le cadre d’Opera21, festival d’opéra contemporain et de théâtre musical, ne touche en revanche absolument pas et même exaspère au plus haut point.


La compositrice israélienne collabore à cette occasion avec Luk Perceval, qui signe sa première mise en scène d’opéra. Assemblant des textes d’Erich Maria Remarque (A l’Ouest rien de nouveau) et Can Xue, le livret, en quatre langues (français, néerlandais, anglais, allemand) et projeté au fur et à mesure, trouve son origine dans Front, spectacle monté par Perceval en 2014. Sans trame classique, cet ouvrage hermétique totalise six actes, un de plus que dans un grand opéra à la Meyerbeer, et dure pas moins de deux heures et demie, quasiment autant que Carmen; le tout sans entracte, ce qui met la patience des spectateurs à très rude épreuve. Nombre d’entre eux quittent d’ailleurs leur siège après même pas une heure, alors que la salle est loin d’être remplie en ce dimanche après-midi.


Ce spectacle d’une rare prétention suscite l’ennui et l’agacement: abstraction totale de la scénographie, qui ne montre visuellement rien de la guerre, nature trop absconse du texte, lenteur désespérante des déplacements. Et le terme de musique semble impropre: il s’agit, plutôt, d’une sorte de magna bruitiste produit par un orchestre et un dispositif électronique de l’IRCAM, les parties vocales demeurant pratiquement dépourvues de lyrisme. Faut-il rappeler aux mauvais esprits que dissonance et laideur ne forment pas nécessaire des synonymes? Sans le support de la scénographie, épurée et esthétique, la valeur intrinsèque de la partie sonore paraît donc faible, sinon inexistante.


Les concepteurs entendent manifestement traduire la souffrance et la peur des combattants et des proches restés en arrière et reproduire, certes de manière cérébrale et calculée, l’abasourdissant fracas des combats, sans tomber dans la trivialité, et tout en suggérant que ce conflit épouvantable trouve un prolongement dans les guerres futures et actuelles. Mais cette production froide et insensible, archétypale par sa radicalité, constitue probablement la manière la plus efficace de dégoûter de la musique contemporaine les personnes les moins averties car elle en donne une image défavorable et trompeuse. Lors des saluts, assez polis, finalement, avec, tout de même, quelques signes d’enthousiasme de personnes sans doute extrêmement ouvertes d’esprit, les six chanteurs, les six acteurs et l’orchestre, placé sous la direction compétente de Titus Engel, font heureusement preuve de conscience et de maîtrise.


Pour rendre hommage aux combattants et prendre toute la mesure de cette effroyable tragédie, il vaut mieux se rendre sur des sites de la Grande Guerre, comme, par exemple, en France, l’Ossuaire de Douaumont et le Mémorial de Verdun, au lieu de s’infliger cette expérimentation pénible.


Le site de Chaya Czernowin
Le site de Luk Perceval



Sébastien Foucart

 

 

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