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Un doublé sous le signe de l’habileté

Nancy
Opéra
09/27/2016 -  et 29 septembre, 2, 4, 6 octobre 2016
Maurice Ravel : L’Heure espagnole
Giacomo Puccini : Gianni Schicchi

David Margulis (Torquemada, Gherardo), Eléonore Pancrazi (Concepción, La Ciesca), Gilen Goicoechea (Ramiro, Betto di Signa), Thibault de Damas (Don Inigo Gomez, Maestro Spinelloccio), Jean-Michel Richer (Gonzalvo), Adrien Barbieri (Gianni Schicchi), Laura Holm (Lauretta), Jérémie Schütz (Rinuccio), Yaël Raanan Vandor (Zita), Bozhidar Bozhkilov (Simone), Jennifer Michel (Nella), Oleg Loza (Marco), Alejandro Gábor (Ser Amantio di Nicolao le notaire), Lancelot Nomura (Pinellino), Mathieu Gourlet (Guccio), Elisée Alroy/Julien Nancey (Gherardino), Yves Breton (Buoso Donati)
Orchestre symphonique et lyrique de Nancy, Michael Balke (direction musicale)
Bruno Ravella (mise en scène), Annemarie Woods (décors et costumes), D.M. Wood (lumières)


L’Heure espagnole (© Opéra national de Lorraine)


Pour son ouverture de saison, l’Opéra national de Lorraine s’associe avec Nancy Opéra Passion, association qui soutient les jeunes chanteurs, entre autres par l’organisation de classes de maître avec des personnalités lyriques, à l’instar de Ludovic Tézier pour les deux dernières années. La structure, qui entretient avec l’institution nancéenne des liens également affectifs – le président est fils d’un ancien directeur de la maison, et a passé son enfance dans un appartement de fonction devenu depuis le bureau de la direction actuelle –, collabore pour la deuxième fois avec l’institution lorraine, après une Rondine sous la houlette de José Cura en 2012. La présente production met à l’affiche un doublé relativement usuel: L’Heure espagnole avant Gianni Schicchi.


La mise en scène de Bruno Ravella s’inscrit autour d’une vaste horloge qui condense habilement les significations de l’ouvrage de Ravel – et du livret de Franc-Nohain, lequel ne se montre pas avare de piquant. La machine résume asticieusement l’arrière privatif de la boutique, tandis que l’étage supérieur abrite la chambre conjugale où les dénudements de jambes excitent l’imagination du spectateur dans le sens de l’intrigue et de ses sous-entendus. On apprécie la maîtrise du rideau pour scander la dramaturgie, et le finale à la façon d’un Da Ponte mozartien en témoigne, où un portrait de Boccace vient appuyer la morale, empruntée au conteur italien, avant que le décor ne dévoile la chambre de Buoso Donati expirant devant son plat de pâtes. Le clin d’œil citationnel se retrouve avec une minitature de Dante côté jardin, sous le patronage duquel se place l’épilogue de Gianni Schicchi. L’horloge ravélienne se fait balcon sur Florence pour les jeunes amants: le travail d’Annemarie Woods sur les décors comme les costumes participe de l’intelligence d’une conception scénographique ingénieuse dans le rapprochement des deux pièces, jouant subtilement de l’artifice, avec un sens ludique bienvenu.



Gianni Schicchi (© Opéra national de Lorraine)


A l’exception du Gonzalvo de Jean-Michel Richer, qui se glisse sans peine dans la préciosité du poète amoureux, les interprètes de L’Heure espagnole – lesquels font montre d’une estimable maîtrise de la déclamation qui ne s’écarte guère de l’intelligibilité – reviennent dans Gianni Schicchi, revêtus alors pour la circonstance. Eléonore Pancrazi distille l’impatience séductrice de Concepción, dans laquelle elle se révèle irrésistible, avant d’endosser le manteau de La Ciesca. Avant de paraître en Betto di Signa, Gilen Goicocechea affirme une robustesse vocale en Ramiro à la mesure des muscles du muletier, sans en ignorer le lyrisme gauche. Thibaut de Damas habite la bedaine de Don Inigo Gomez avec une gourmandise égale à celle qu’il exprime dans la nasalité de Maesto Spinelloccio, le docteur. Torquemada aux confins de la niaiserie commerçante, David Margulis, lègue un Gherardo au diapason des attentes.


Le reste du plateau puccinien ne dépare point. On retiendra le couple formé par Laura Holm et Jérémie Schütz, Lauretta et Rinuccio empreints d’une juvénilité à même de susciter la bienveillance. La galerie des Donati affiche des couleurs, de la Zita confiée à Yaël Raanan Vandor à Oleg Loza, Marco, en passant par Bozhidar Bozhkilov et Jennifer Michel, respectivement Simone et Nella, sans oublier les interventions du petit Gherardino – dévolues à Elisée Alroy et Julien Nancey selon les représentations – ni bien entendu le Buoso mime d’Yves Breton, vrai-faux mort qui se réveille incidemment de sa torpeur létale. Mentionnons encore Alejandro Gábor, Lancelot Nomura et Mathieu Gourlet, notaire, coordonnier et teinturier venus comme témoins à la nouvelle rédaction du testament du défunt. Quant à Adrien Barbieri, qui fait ses débuts dans un rôle de premier plan, il souligne la vis comica de Gianni Schicchi avec un talent qui n’attend pas les années: la plénitude de la bouffonnerie va de pair avec celle de moyens prometteurs. A la tête de l’Orchestre symphonique et lyrique de Nancy, la direction de Michael Balke fédère les énergies et restitue l’essentiel de la vitalité de ce doublé d’ouverture.



Gilles Charlassier

 

 

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