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Une Bohème de plus

Liège
Opéra royal de Wallonie
06/17/2016 -  et 18, 19*, 21, 22, 23, 24, 25, 26 juin 2016
Giacomo Puccini: La bohème
Patrizia Ciofi*/Ira Bertman (Mimi), Gianluca Terranova*/Marc Laho (Rodolfo), Cinzia Forte*/Lavinia Bini (Musetta), Ionut Pascu (Marcello), Alessandro Spina (Colline), Laurent Kubla (Schaunard), Patrick Delcour (Alcindoro, Benoît), Stefano De Rosa (Parpignol), Pierre Nypels (Un sergente dei doganiere), Marc Tissons (Un doganiere)
Chœurs et Maîtrise de l’Opéra royal de Wallonie, Pierre Iodice (chef des chœurs), Orchestre de l’Opéra royal de Wallonie, Paolo Arrivabeni (direction)
Stefano Mazzonis di Pralafera (mise en scène), Carlo Sala (décors), Fernand Ruiz (costumes), Franco Marri (lumières)


(© Lorraine Wauters/Opéra royal de Wallonie)


L’Opéra royal de Wallonie termine sa saison avec deux piliers du répertoire coup sur coup : la Traviata en mai, seconde reprise d’une production de 2009, et La Bohème (1896) en juin, cette fois dans une nouvelle production, montée à Tel-Aviv il y a deux ans, la dernière représentation de l’ouvrage de Puccini, dans une mise en scène de Jean-Louis Pichon, datant de novembre 2010.


Voici de nouveau un spectacle typique de ce que ce théâtre propose d’habitude à son public. Forcément, le directeur général et artistique le met lui-même en scène. Stefano Mazzonis di Pralafera ne propose rien de neuf ou d’inattendu, mais l’idée de transposer l’action au lendemain de la Seconde Guerre mondiale a du sens. La scénographie restitue tant bien que mal l’atmosphère régnant dans les rues parisiennes à l’époque, avec soldats et filles de joie, ces dernières, aguicheuses et vulgaires, emmenées par des hommes élégamment vêtus ; malgré les clichés, l’esprit du livret est préservé. Cependant, comme souvent avec lui, le metteur en scène règle sommairement la direction d’acteur, très ordinaire, et cède à son péché mignon, celui d’ajouter de l’animation par peur du vide, ce qui parasite souvent les moments-clé où l’attention, dès lors, se disperse. Il néglige aussi la virtuosité et le potentiel théâtral du deuxième acte, les enfants de la Maîtrise demeurant dissimulés, comme s’il ne savait qu’en faire ; les jeunes choristes viendront tout de même saluer au baisser de rideau, avant l’entracte.


Le spectacle comporte quelques maladresses, la plus grossière étant l’apparition de Mimi malade au quatrième acte dans un véhicule militaire, alors que les bohémiens s’amusent, ce qui ruine l’impact dramatique induit par le brusque changement d’atmosphère dès que Musetta pénètre dans la mansarde ; par conséquent, la mort de Mimi laisse presque indifférent. Les décors ne se distinguent pas non plus pour de bonnes raisons : encombrants, longs à manœuvrer et peu esthétiques, ils consistent en toiles et panneaux représentant des photographies de façades parisiennes. Quelle distance sépare cette mise en scène de celle de Robert Carsen, admirée à Anvers en décembre, tellement plus vive, légère et émouvante en comparaison.


Double pour trois des principaux personnages, la distribution dispense des bonheurs divers. Malgré sa maîtrise et son engagement, Patrizia Ciofi se retrouve à contre-emploi dans le rôle de Mimi : la voix paraît entamée, voire astringente, dépourvue de fraîcheur, de délicatesse et de charme, les inflexions et le timbre demeurant plutôt ceux d’une tragédienne ; retenons plutôt sa Luisa ici-même il y un an et demi. La Musetta de Cinzia Forte ne convainc pas non plus, à cause de son aspect, celle d’une grande dame trop empruntée, et d’une voix sans les saveurs piquantes et acidulées attendues. L’instrument semble, a priori, mieux convenir, du moins faut-il l’espérer, pour Desdémone, que la soprano incarnera sur cette scène dans un an. C’est Gianluca Terranova qui livre la meilleure performance : le ténor, physiquement très crédible, mais mal apparié à cette Mimi, expose un timbre solaire et la voix, parfois trop puissante, accroche d’emblée ; il prend soin, en outre, de la précision de l’intonation et de l’intensité du phrasé. D’habiles chanteurs caractérisent assez finement les autres personnages : Marcello, Colline et Schaunard sympathiques d’Ionut Pascu, Alessandro Spina et Laurent Kubla ; Alcindoro et Benoît pittoresques de Patrick Delcour.


L’orchestre tient son rang sous la direction de Paolo Arrivabeni, qui confirme sa fine connaissance de ce répertoire. Le chef explore l’œuvre dans les détails, avec un sens de l’atmosphère, des alliages de timbres et de la nuance particulièrement apprécié, mais il a tendance, parfois, à trop ralentir et il ne modère pas toujours la puissance. Il aurait fallu alléger un peu plus la pâte sonore et raffiner la texture pour atteindre la perfection, mais cette exécution épousant étroitement le drame s’en approche de près. Cela ne suffit pourtant pas : lorsqu’un théâtre décide de monter un opéra aussi célèbre et aussi fréquemment programmé que La Bohème, il faut viser l’excellence.



Sébastien Foucart

 

 

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