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L’axe siculo-américain

Palermo
Teatro Politeama Garibaldi
04/22/2016 -  
Giovanni d’Aquila : The Ghost of Banquo (création)
Nino Rota : Divertimento concertant pour contrebasse et orchestre
Aaron Copland : El Salón México
Leonard Bernstein : Symphonic Dances from West Side Story

Alberto Bocini (contrebasse)
Orchestra sinfonica siciliana, Alberto Maniaci (direction)


A. Maniaci (© Stefania Grigoli)


Le Théâtre Politeama Garibaldi (950 places) est la principale salle de concert de Palerme. Construit en plein centre de la capitale sicilienne de 1865 à 1891 dans un style néoclassique d’inspiration pompéienne, initialement pour des spectacles populaires en plein air – la salle est quasiment circulaire –, il accueille, depuis 2001, l’Orchestre symphonique sicilien, créé en 1958. On avait pu entendre cet orchestre dans les années soixante-dix lorsque son directeur artistique était le regretté claveciniste et musicologue Roberto Pagano, esprit pétillant et toujours d’une exquise courtoisie. On se souvient ainsi avec émotion d’un concert dirigé un soir d’été brûlant par Eliahu Inbal dans la cour de l’archevêché de Cefalù à l’instigation de l’inénarrable Pepita Misuraca, petite femme d’une folle énergie, sans doute brouillonne et naïve mais qui fit beaucoup pour la vie culturelle locale.


L’orchestre est aujourd’hui particulièrement actif puisqu’il se produit au Politeama, en saison, deux fois par semaine, avec des chefs tournant beaucoup, probablement trop d’ailleurs, et sa programmation est aussi éclectique qu’intéressante, réservant souvent une belle part à la musique contemporaine. Pourtant, curieusement, ConcertoNet n’avait encore jamais rendu compte de ses prestations. Le concert de ce soir, dirigé par Alberto Maniaci, compositeur, pianiste et chef d’orchestre palermitain né en 1987, était l’occasion de réparer cette lacune.


Il débuta par une création de Giovanni d’Aquila (né en 1966), compositeur sicilien lui aussi et déjà prolifique, d’œuvres d’ailleurs souvent affublés de titres en anglais. La chose était évidemment compréhensible pour Le Fantôme de Banquo, ancien compagnon de Macbeth, assassiné sur ses ordres et qui vient le hanter au banquet du troisième acte de la pièce de Shakespeare. Il s’agit d’une œuvre commandée par la Fondazione Orchestra Sinfonica Siciliana, le compositeur devant écrire une sorte d’ouverture. Le but était atteint : théâtrale pour ne pas dire cinématographique, l’œuvre, parfaitement tonale et dénuée d’originalité, est divisée en trois sections où le moto perpetuo, les cordes stridentes, les timbales insistantes participaient à l’atmosphère noire recherchée tout en laissant attendre autre chose.


Après les saluts du compositeur, le programme se prolongeait ensuite assez naturellement par une pièce de Nino Rota (1911-1979). Les Italiens sont convaincus que son génie musical dépasse le cadre de la musique de film, domaine auquel son nom restera attaché à tout jamais. Il est vrai que sa production sans rapport avec le cinéma est énorme. Son Divertimento (1973) fait par exemple partie de ses... douze concertos ou pièces assimilées. Gentiment néoclassique, l’œuvre composée sur plusieurs années et rassemblant des pièces initialement écrites pour diverses occasions voire à but pédagogique manque une nouvelle fois de cohérence. L’Allegro initial met en avant les cordes et on apprécie la clarté des lignes mélodiques dessinées par les flûtes mais la contrebasse d’Alberto Bocini (assez laide, semblant récupérée de quelque palais palermitain décati) développe un discours bavard et fanfaron, au demeurant pas toujours juste. La Marche est plus convaincante, Elle fait curieusement penser à Pierre et le Loup de Prokofiev, le contrebassiste démontrant cette fois une belle fluidité, avant une Aria intense tandis que l’orchestre devient singulièrement ample. On ne s’en étonnera pas en apprenant, dans les notes du programme, assez bien faites, que cette Aria provient en fait d’un thème écrit pour le film Docteur Jivago dont l’accompagnement sonore ne fut finalement pas de la main de Nino Rota (mais de Maurice Jarre). Le Final reste le seul moment où se noue un dialogue, vif et un peu intéressant entre le soliste et l’orchestre. Le bis proposé par Alberto Bocini suscita cependant d’avantage l’attention : variations sur des variations classiques connues, imaginatives, flirtant avec le jazz, elles étaient articulées autour de trois moments, l’élément central entièrement composé de pizzicati étant l’occasion pour Alberto Bocini de démontrer une belle virtuosité en jouant notamment avec la caisse de son instrument. Peut-être le meilleur moment du concert.


Si les Italiens demeurent d’ardents défenseurs de Nino Rota, les Américains restent attachés à l’un de leurs rares compositeurs « classiques » du début du vingtième siècle, Aaron Copland (1900-1990), sans qu’on comprenne aussi toujours bien pourquoi. Etait proposé en seconde partie El Salón México (1936), pièce symphonique fortement inspirée par des thèmes populaires mexicains, sur commande de Roosevelt, et ignorant, comme Rota, ostensiblement même, la seconde école de Vienne. Le pot-pourri, fétiche d’un célèbre Italien cherchant à plaire au public américain – Arturo Toscanini – n’est pourtant en rien déplaisant. On regretta simplement, lors du concert, une tenue des vents un peu moins parfaite que précédemment.


Après Copland, il était naturel de passer à son ami et interprète privilégié Leonard Bernstein (1918-1990), représenté par des danses extraites de son célèbre West Side Story (1961), arbre qui, là, cache trop souvent la forêt des autres compositions de l’auteur. Le jeune chef Alberto Maniaci donne de sa personne en dansant sur son estrade pour insuffler le rythme qui convient. Les cordes sont parfaites, sauf dans le Final passablement brinquebalant, et le tout reste au total bien enlevé. On ne pouvait que déplorer, dans ces conditions, la très faible assistance : le public, à l’orchestre, était aussi nombreux que l’orchestre sur la scène... Attristant et incompréhensible pour une ville de près de huit cent mille habitants. Le programme et les artistes méritaient assurément mieux.


Le site d’Alberto Maniaci
Le site de l’Orchestre symphonique sicilien



Stéphane Guy

 

 

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