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Un Simon en plan rapproché

Bordeaux
Grand Théâtre
01/24/2016 -  et 27, 30 janvier, 1er*, 3 février 2016
Giuseppe Verdi : Simon Boccanegra
Tassis Christoyannis (Simon Boccanegra), Soloman Howard (Jacopo Fiesco), Rena Harms (Maria/Amelia), Joshua Guerrero (Gabriele Adorno), Alexandre Duhamel (Paolo Albiani), Cyril Rovery (Pietro), Davit Sumbadze (Un capitaine), Yeon-Ja Jung (Une servante)
Chœur de l’Opéra national de Bordeaux, Salvatore Caputo (chef de chœur), Orchestre national Bordeaux Aquitaine, Paul Daniel (direction musicale)
Catherine Marnas (mise en scène), Carlos Calvo (décors), Jean-Pierre Vergier (costumes), Michel Theuil (lumières)


(© Frédéric Desmesure)


Longtemps relativement laissé dans l’ombre d’Otello ou Don Carlo, Simon Boccanegra gagne enfin ces dernières années les faveurs de la scène. On pourra d’ailleurs observer que l’Opéra national de Bordeaux a choisi le destin du corsaire élu doge pour sa première collaboration avec la nouvelle directrice du Théâtre national de Bordeaux Aquitaine. Catherine Marnas a concentré sa scénographie autour de la figure éponyme de l’ouvrage, appuyée par un travail vidéographique où l’on suit, dans le Prélude par exemple, les linéaments des tourments qui agitent le visage soucieux de Simon. Pas plus que les costumes de Jean-Pierre Vergier, qui abstraient les rivalités politiques en opposant le bleu labeur de la plèbe au plus cérémonieux rouge patricien, le dispositif – presque – unique de Carlos Calvo ne sacrifie point au pseudo-réalisme d’époque, ni aux facilités de la transposition contemporaine, même s’il cède plus d’une fois, non sans efficacité d’ailleurs, aux sirènes de l’investissement de la salle. La blanche terrasse maritime aux vagues allures de piscine à linoléum devient, par le seul jeu des lumières ductiles réglées par Michel Theuil, salle du Conseil. Il est possible d’imaginer dans l’apparition de jeune fille, Maria, pendant que sa mère homonyme meurt dans un grabat en forme de balcon de fleurs descendu des cintres, une réminiscence du Macbeth réglé sur cette même scène par Giuseppe Frigeni en 2002. On pourra discuter la prédominance des teintes pastel dans un livret frappé de noirceur. Sans verser dans un minimalisme lavé de toute tension dramatique, la poétique du spectacle favorise la dimension évocatrice, sinon onirique, où dominent les ondulations de l’élément marin.


Devenu depuis quelques années l’un des incontournables barytons Verdi d’aujourd’hui, justement célébré par les maisons francophones – de Monfort dans Les Vêpres siciliennes genevoises en 2011 à son presque anthologique Posa de début de saison à l’auditorium Dutilleux – Tassis Christoyannis révèle un Simon Boccanegra habité, autant psychologiquement que vocalement. La richesse des harmoniques nourrit l’incarnation de la souveraineté généreuse et apaisante, sans éluder la sensibilité, sinon la fragilité du personnage, qui affleure à même la ligne mélodique. Par une inversion onomastique sans doute involontaire, Soloman Howard affirme un Fiesco puissant, qui gagnera vraisemblablement en définition dans les extrêmes de la tessiture, néanmoins aucunement négligés. Joshua Guerrero fait respirer l’impulsivité juvénile de Gabriele Adorno avec un lyrisme perceptible, tandis que Rena Harms, seule soliste de la distribution à ne pas être en prise de rôle, n’épargne pas toujours une relative acidité à son Amelia. Alexandre Duhamel se passe brillamment de la caricature où se réduit parfois Paolo, et fait valoir des moyens remarquables. Cyril Rovety contracte Pietro en une certaine rudesse qui n’entre pas en contradiction avec ce que l’on peut y attendre. Davit Sumbadze compose un Capitaine sans faiblesse, quand l’intervention de la Servante par Yeon-Ja Jung ne démérite pas davantage. Préparés magistralement par Salvatore Caputo, les chœurs résument vigoureusement la force de la foule et du peuple. Sous la baguette de Paul Daniel, l’Orchestre national Bordeaux Aquitaine confirme l’estimable travail que le chef anglais a réalisé avec sa phalange depuis son arrivée, dévoilant une appréciable densité des cordes et une sonorité admirablement charpentée, dans une synthèse entre couleurs et textures d’une belle consistance, au diapason du génie de la partition.



Gilles Charlassier

 

 

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