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Pour Wagner surtout

Baden-Baden
Festspielhaus
10/31/2015 -  
Richard Wagner : Die Walküre (Acte I)
Anton Bruckner : Symphonie n° 5

Annette Dasch (Sieglinde), Klaus Florian Vogt (Siegmund), Liang Li (Hunding)
Bamberger Symphoniker, Jonathan Nott (direction)


(© Andrea Kremper)


En concert on fait volontiers précéder une symphonie de Bruckner par une première partie brève : quelques lieder avec orchestre, un « petit » concerto de Mozart... sont des mises en route apéritives courantes. Mais là, c’est le premier acte entier de La Walkyrie qui est proposé. L’affiche est (trop ?) copieuse, au risque de faire capituler même des appétits musicaux d’ogre.


Avouons que passé ce conséquent Wagner notre attention a sombré, dissuadée par une Cinquième Symphonie de Bruckner engluée dans un effectif énorme (l’Orchestre symphonique de Bamberg complété par de nombreux renforts), de surcroît en forme moyenne (une relative insécurité du côté des cuivres). Jonathan Nott s’intéresse moins aux alliages de timbres que de progresser de forte en forte jusqu’à la conclusion de chaque mouvement. Or la ligne d’horizon semble reculer à mesure que le discours tente d’avancer, et surtout cette lecture épisode par épisode n’essaie jamais de camoufler le principal défaut d'une symphonie répartie par blocs, assemblés avec un art de la transition que l’on peut qualifier poliment de lacunaire, Ajoutons que pour un couplage avec Wagner, on a choisi ici l’opus brucknérien le moins ouvertement wagnérien du lot, ce qui est un peu curieux !


Revenons à une première partie plus attrayante, même si là non plus les Bamberger Symphoniker ne sont pas dans un bon jour. Quelques accidents, des élans un peu bridés, y compris dans un Prélude plus agité que vraiment tonique : il faut du temps, en fait presque jusqu’au début du duo final, pour que les tâtonnements cessent, en dépit de la direction toujours claire et élégante de Jonathan Nott. Cela dit, il s’agit d’un orchestre de bonne tradition allemande et ce Wagner-là a le mérite de rester cohérent : assurément une mise en valeur appréciable pour les deux belles voix qui constituent le principal attrait de la soirée.


Version de concert mais pas de pupitre pour les chanteurs, qui restent debout près du podium et assurent un semblant de présence scénique. Par chance ces deux jumeaux/amants sont très crédibles, même en habit et robe du soir. Un peu réservée, Annette Dasch n’est pas une Sieglinde incandescente mais elle chante joliment bien, avec sa technique irréprochable de soprano lyrique. Est-ce suffisant ? On peut en débattre longuement, comme ceux qui reprochèrent à Herbert von Karajan d’édulcorer ce rôle en le confiant naguère à Gundula Janowitz, qui était avant tout une divine mozartienne. En l’état, et aussi grâce à un placement favorable devant l’orchestre, le résultat est défendable, même s’il ne faut pas compter sur cette héroïne pour pousser des cris d’extase amoureuse à la Leonie Rysanek. Clairement, on n’est pas au même rayon. Aucun problème de crédibilité en revanche pour le Hunding guttural et brutal de Liang Li, qui a les moyens de l’emploi.


Le cas de Klaus Florian Vogt est encore différent. Une véritable puissance d’émission est au rendez-vous, d’autant plus qu’avec le temps la voix semble avoir conquis davantage d’assurance et de couleurs, devenue un peu plus sombre mais restée percutante. On se rapproche même un rien d’un heldentenor plus classique, avec aussi malheureusement le début de nasalisation qui affecte souvent ce type de technique, petit défaut de placement qu’il faudrait éviter de laisser trop s’installer. Mais surtout, à ce stade d’un processus de maturation très intéressant (conduira-t-il un jour Vogt à ce Tristan de rêve, poétique comme une enluminure médiévale, que l’on continue à espérer ?), la luminosité de cette voix, voire son aptitude à placer pertinemment chaque mot du texte en avant avec une fantastique aisance, digne d’un comédien dramatique déclamant la langue de Goethe, restent continuellement exceptionnels. Après avoir déjà écouté deux fois le Siegmund de Klaus Florian Vogt en scène, cet acte de La Walkyrie isolé confirme un talent extrêmement attachant, voire unique en son genre dans ce rôle aujourd’hui.



Laurent Barthel

 

 

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