About us / Contact

The Classical Music Network

Zurich

Europe : Paris, Londn, Zurich, Geneva, Strasbourg, Bruxelles, Gent
America : New York, San Francisco, Montreal                       WORLD


Newsletter
Your email :

 

Back

Un Wozzeck magistral

Zurich
Opernhaus
09/13/2015 -  et 16, 19, 22, 25, 29 septembre, 6 octobre 2015
Alban Berg : Wozzeck, opus 7
Christian Gerhaher (Wozzeck), Brandon Jovanovich (Tambourmajor), Mauro Peter (Andres), Wolfgang Ablinger-Sperrhacke (Hauptmann), Lars Woldt (Doktor), Pavel Daniluk (1. Handwerksbursch), Cheyne Davidson (2. Handwerksbursch), Martin Zysset (Der Narr), Gun-Brit Barkmin (Marie), Irène Friedli (Margret), Alessandro Reinhart*/Nino Dührkoop (Mariens Knabe), Tae-Jin Park (Ein Bursche)
Chor der Oper Zürich, Kinderchor, Jürg Hämmerli (préparation), Philharmonia Zürich, Fabio Luisi (direction musicale)
Andreas Homoki (mise en scène), Michael Levine (décors et costumes), Meta Bronski (collaboration costumes), Franck Evin (lumières), Kathrin Brunner (dramaturgie)


(© Monika Rittershaus)


Magistral ! Le mot n’est pas galvaudé pour qualifier la nouvelle production de Wozzeck qui vient d’ouvrir la saison 2015-2016 de l’Opernhaus de Zurich. Une nouvelle production qui a été accueillie par un tonnerre d’applaudissements enthousiastes le soir de la première. Le coup de génie d’Andreas Homoki, metteur en scène et par ailleurs directeur de l’Opernhaus, c’est d’avoir choisi de transposer le chef-d’œuvre d’Alban Berg dans un théâtre de marionnettes, pour en souligner à l’excès le côté grotesque et absurde. Il conçoit Wozzeck comme une farce cynique et grinçante, loin de la descente aux enfers crue et réaliste d’un pauvre bougre qui se mue en meurtrier. Dans un immense cadre de couleur jaune se démultipliant à l’infini pour former une perspective étourdissante, les personnages, visibles jusqu’à la ceinture, ne sont clairement pas maîtres de leur destin, on tire les ficelles à leur place. Le capitaine, le tambour-major et le docteur sont des caricatures risibles de l’establishment, alors que Marie est une jeune fille écervelée et frustrée, à la sensualité débordante. Wozzeck apparaît comme un clown triste, clairement dépassé, lui aussi, par les événements qui l’entourent, mais qui a le sourire narquois du Joker de Batman. Dans ses visions, il voit les autres personnages de l’histoire se multiplier pour l’accabler. Le drame est programmé, certes, mais non sans beaucoup d’humour et de nombreux grincements de dents, à l’intérieur d’un espace clos stylisé à l’extrême. Saisissant !


Pour son premier Wozzeck, le chef Fabio Luisi offre une lecture très analytique, claire et transparente, qui fait entendre tous les détails de l’ouvrage, avec, de surcroît, une précision rythmique impressionnante pour cette partition complexe. L’effectif orchestral est énorme, mais la fosse est abaissée, si bien que les chanteurs ne doivent jamais forcer. Christian Gerhaher signe une prise de rôle exemplaire en Wozzeck. Spécialiste du lied et de Mozart, ce chanteur, qu’on voit peu sur les scènes d’opéra, est particulièrement expressif dans ses interventions, dans les intonations qu’il imprime à chaque mot ; son timbre lyrique et moelleux donne un côté terriblement humain et émouvant à son personnage. La Marie de Gun-Brit Barkmin dispose d’une voix particulièrement ample et sonore, mais ce qui frappe surtout, c’est l’implication de l’interprète dans son personnage, qui passe de la provocation et de l’excès aux remords et à la mélancolie. Parmi les nombreux rôles secondaires, il convient de citer le capitaine de Wolfgang Ablinger-Sperrhacke, comble de fourberie et d’hypocrisie. On l’a dit, tout dans ce spectacle est extrême. A n’en pas douter, ce Wozzeck restera dans les annales de l’Opernhaus.



Claudio Poloni

 

 

Copyright ©ConcertoNet.com