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Parfum parisien de l’entre-deux-guerres

Avignon
Opéra
03/27/2015 -  
Jean Rivier : Ouverture pour une opérette imaginaire
Marcel Lattès : Arsène Lupin banquier: Intermezzo
Arthur Honegger : Les Aventures du roi Pausole, H. 76: Suite
Louis Beydts : Hue! – La S.A.D.M.P (La Société Anonyme des Messieurs Prudents)

Isabelle Druet (Elle), Mathias Vidal (Le Gros Commerçant), Jérôme Billy (Henri Morin), Thomas Dolié (Le Comte Agénor de Machinski), Dominique Côté (Le Grand Industriel)
Orchestre régional Avignon Provence, Samuel Jean (direction musicale)
Christophe Mirambeau (mise en espace)




Injustement négligée, victime directe du mépris d’une certaine avant-garde, la musique française de l’entre-deux-guerres réserve de fort belles pages, à l’esprit leste, sans complexe à l’égard des influences qui l’innervent. L’Opéra d’Avignon a choisi d’en proposer un aperçu gastronomique avec un concert autour de La S.A.D.M.P (La Société Anonyme des Messieurs Prudents) de Louis Beydts, sur un livret de Sacha Guitry, le tout mis en espace et en verve par Christophe Mirambeau.


Introduite par un panorama alerte qui ressuscite la société musicale au tournant des années trente, la première partie offre ainsi une mise en bouche apéritive, avec l’Ouverture pour une opérette imaginaire de Jean Rivier, foisonnante de vivacité et d’entrain mélodique. Neveu du père d’Arsène Lupin, Marcel Lattès s’est emparé du gentleman cambrioleur pour en faire le héros d’une adaptation lyrique, Arsène Lupin banquier, dont l’Intermezzo offre un délicat et tendre aperçu. De ses Aventures du roi Pausole, Arthur Honegger a tiré une Suite restée apparemment inédite au concert jusqu’alors – on ne peut que saluer l’initiative de Samuel Jean et de l’Orchestre régional Avignon Provence de faire entendre cette partition à l’inventivité aussi renouvelée qu’expressive.


Après la courte ballade au rythme finalement assez paisible de Hue!, juste avant l’entracte, vient le plat de résistance, l’opéra-bouffe de Louis Beydts, La S.A.D.M.P – dont le titre fut ingénieusement détourné en «Société des Admirateurs de Madame Printemps», laquelle devait quitter Sacha Guitry quelques mois plus tard –, créée en 1931 au cœur d’un programme réunissant six pièces du dramaturge français au Théâtre de la Madeleine. On retrouve dans le texte nourri d’assonances, l’élégance irrévérencieuse de leur auteur – à l’instar du dimanche, «le jour du bon vieux» – sa fantaisie facétieuse – l’étymologie du prorata qui viendrait du «mot latin dont on fit le verbe rater». La fluidité de la musique, son raffinement, son efficacité consommée, font le reste: forme et fond constituent une alchimie qui prélude à une féconde collaboration, allant jusqu’au cinéma.


Avec une économie maximale de moyens – de simples pancartes pour annoncer les noms ou illustrer les fleurs, portées par les personnages eux-mêmes, dans le meilleur esprit du sketch – la scénographie invite le spectateur dans cette comédie brillante, à la moralité délicieusement piquante. D’autant qu’elle est admirablement servie par une distribution au fait du style. Henri Morin, le premier amant que l’on devine préféré quand la coquette lui suggère de venir parfois par l’escalier, s’affirme avec le ténor consistant de Jérôme Billy, tandis que le Gros Commerçant frémit par la faconde haut perchée de Mathias Vidal. Thomas Dolié imite avec gourmandise le quatrième âge du comte Agénor de Machinski, et Dominique Côté exprime comme il convient la suffisance du Grand Industriel. Quant à Isabelle Druet, elle prend dignement le relais de la création du rôle de la femme simplement nommée Elle.


Poursuivant avec les éditions Actes Sud un cycle autour de trois comédies musicales écrites par Sacha Guitry inauguré par L’Amour masqué l’an dernier, l’Orchestre régional Avignon Provence et Samuel Jean font retentir avec un plaisir communicatif les saveurs de la partition, dont on attend impatiemment la gravure, prévue à la suite du concert, avant O mon bel inconnu de Reynaldo Hahn la saison prochaine. On ne saurait souligner assez ce pertinent exemple d’originalité de la part de maison avignonnaise.



Gilles Charlassier

 

 

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