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L’amour interdit selon Fabien Gabel

Paris
Philharmonie 1
02/14/2015 -  
Richard Wagner : Das Liebesverbot: Ouverture – Tristan und Isolde: Prélude et Mort d’Isolde
Richard Strauss : Don Quixote, opus 35
Claude Debussy : Suite de «Pelléas et Mélisande» (arrangement Erich Leinsdorf)

Antonio Meneses (violoncelle)
Orchestre de Paris, Fabien Gabel


F. Gabel (© Gaëtan Bernard)


« Love stories » : c’était bien le moins que pouvait choisir, pour un week-end de la Saint-Valentin, une Philharmonie toute neuve qui doit, comme on dit, se constituer une clientèle. Mais comme les grandes histoires d’amour, dans l’art et la musique, sont plutôt en rupture avec la morale, le programme du premier des deux concerts de l’Orchestre de Paris s’intitulait « l’amour interdit »... A vrai dire, on n’avait pas besoin de ça pour écouter Wagner, Strauss et Debussy. Ni pour entendre Fabien Gabel : aujourd’hui chef de l’Orchestre symphonique du Québec, on l’avait repéré comme assistant de Kurt Masur, certains de ses concerts étaient restés dans les mémoires, comme l’intégrale du Livre de la Jungle de Koechlin à Radio France en 2006, et il vient de conquérir avec Carmen le public de l’Opéra d’Oslo. Va donc pour « l’amour interdit »...


Hors-d’œuvre pétillant, à la petite percussion facétieuse, l’Ouverture de La Défense d’aimer, d’un Wagner de vingt-deux ans, lorgne vers Nicolai et Auber : elle bondit et vibrionne, pleine d’un irrésistible panache, témoignant déjà de la maîtrise du jeune chef français, précis et assuré dans sa gestique.


La maîtrise, il en faut pour le Don Quichotte de Strauss ! Direction assez analytique, polyphoniquement très claire, remarquable aussi par la qualité de la pâte sonore – ceci n’allant pas toujours avec cela. Le lyrisme straussien s’épanouit naturellement, sans surenchère, fruit sans doute d’une volonté d’équilibre, qui ne lisse pas la musique mais lui garde ses saveurs – sautillements des bois de Dulcinée, ironie des bassons des Moines... Equilibre de la forme également : très soucieux des enchaînements, Fabien Gabel privilégie la continuité du flux plutôt que d’accentuer à l’excès les contrastes, ce qui découdrait des Variations construites sur un même « thème chevaleresque ». Soliste de la troisième version Karajan, Antonio Meneses joue dans le même esprit, sonorité noble et généreuse, jeu concentré, à l’opposé des échappées fantasques et picaresques d’un Rostropovitch, bien assorti, pour Sancho, à l’alto superbe d’Ana Bela Chaves.


Debussy après Strauss ? La Suite de Pelléas et Mélisande alors qu’on peut entendre, parallèlement, l’opéra à Bastille ? Dans l’arrangement d’Erich Leinsdorf, de surcroît ? Si le travail d’un Marius Constant reste évidemment plus « debussyste », celui du chef américain, héritier de la grande tradition germanique, qui privilégie les atmosphères sombres et, par les choix opérés, « parsifalise » la partition, s’insère peut-être mieux entre Don Quichotte et Prélude et Mort d’Isolde... Heureusement, le chef évite malgré tout de « wagnériser » davantage la chose, faisant bien avancer la musique, à laquelle il conserve son pouvoir de suggestion. Pas de hiatus, du coup, quand on aborde Tristan, où la balance entre la sensualité de la pâte et la clarté de la forme s’avère très heureuse, avec, pour le Prélude comme pour la Mort d’Isolde, un impeccable dosage des crescendos.



Didier van Moere

 

 

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