About us / Contact

The Classical Music Network

Editorials

Europe : Paris, Londn, Zurich, Geneva, Strasbourg, Bruxelles, Gent
America : New York, San Francisco, Montreal                       WORLD


Newsletter
Your email :

 

Back

CD, DVD et livres: l’actualité de mars
03/15/2013


Les chroniques du mois




Must de ConcertoNet


   Pascal Amoyel interprète Alkan




 Sélectionnés par la rédaction


   David Stern dirige Zanaida de J.-C. Bach


   Le Quatuor Modigliani


   L’Edition Wagner d’Opus Arte




 Oui!

Claudio Arrau interprète Beethoven, Schumann et Brahms
Michael Oman et Nuria Rial interprètent Händel
Cinq œuvres de Mark-Anthony Turnage
Hansjörg Albrecht interprète et dirige Braunfels
Le Quatuor Gringolts interprète Braunfels et R. Strauss
D. Sinkovsky interprète Vivaldi
P. Herreweghe dirige Beethoven
Klaus Tennstedt dirige Brahms et Martinů
Natacha Kudritskaya interprète Rameau
Gábor Takács-Nagy dirige F. Martin
Marie-Claude Chappuis chante Caplet
L’ensemble vocal Aedes
Julie Fuchs chante Mahler et Debussy
Musique française par Claire Désert et Emmanuel Strosser
Elsa Grether et Ferenc Vizi interprètent Bloch et Pärt
Hugo Reyne interprète Vivaldi
Cinq trios de Kaija Saariaho
Hervé Niquet dirige M. d’Ollone




 Pourquoi pas ?

Le Magnifique de Grétry
Ivan Monighetti interprète Boccherini
La Maîtrise de la cathédrale de Strasbourg
Quatre œuvres d’Arnaud Petit
L’Ensemble Contraste interprète Bach




Pas la peine
L’Anti-Wagner sans peine de Pierre-René Serna
Adrian Boult dirige Mendelssohn et Brahms
Paavo Berglund dirige Brahms
Verdi et Wagner par Sylvie Oussenko
Nemanja Radulovic et Marielle Nordmann
Leonard Slatkin dirige Ravel




Hélas!
Barbara Frittoli chante Boccherini






L’entretien du mois



Pascal Amoyel







Le match du mois


         
Symphonies de Brahms: Berglund, Boult ou Tennstedt?





En bref


Un ballet de F. Martin tiré de l’oubli
Caplet: un beau Miroir
Quand Saariaho rime avec trio
Quand Boccherini rime avec Monighetti
Quand Boccherini ne rime pas avec Frittoli
La jeunesse debussyste et mahlérienne de Julie Fuchs
Désert et Strosser retournent en enfance
Les jeux verbaux de l’ensemble vocal Aedes
Bach tout en Contraste
Vivaldi en Vendée
Stéphane Denève célèbre Poulenc
A la découverte de Bloch avec Elsa Grether
Ravel à Lyon: début décevant
Le Rameau moderne de Natacha Kudritskaya
Trésors cachés de la musique sacrée française
Verdi et Wagner pour les novices (et encore)
Nemanja Radulovic: mauvais genre
Max d’Ollone: jamais trois sans quatre
Arnaud Petit: «Nervoso»... ma non tanto





Un ballet de F. Martin tiré de l’oubli





Les admirateurs de Frank Martin ne manqueront pas ce premier enregistrement du Conte de Cendrillon (1941), composé juste après Le Vin herbé et créé en 1942 par Paul Sacher. Ce ballet en trois actes et d’un peu moins de 70 minutes présente la particularité de recourir à un orchestre de modestes dimensions (entre autres deux saxophones, un célesta et un piano) et à quatre chanteurs qui interviennent épisodiquement. Cette musique vive, acerbe et spirituelle est représentative du langage de Martin: recherché mais ni avant-gardiste ni rétrograde. D’une propreté helvétique, l’interprétation de l’Orchestre de la Haute école de musique de Genève, dirigé par Gábor Takács-Nagy, et des solistes (Clémence Tilquin, David Hernandez Anfruns, Varduhi Khachatryan, Alexandra Hewson) offre de nombreuses satisfactions (Claves 50-1202). SF




Caplet: un beau Miroir





Voici quelques mois seulement, une parution et une réédition venaient enrichir la maigre discographie du Miroir de Jésus (1923) d’André Caplet. Un bonheur n’arrive jamais seul, car une nouvelle version, venue de Suisse romande et publiée chez Mirare, est bien placée pour s’imposer comme la référence dans cette œuvre véritablement sui generis. Davantage encore qu’aux neuf chanteuses de l’Ensemble vocal de Lausanne fondé par Michel Corboz et dirigé ici par Jean-Claude Fasel, on le doit aux musiciens réunis autour du Quatuor Sine Nomine et à la mezzo Marie Claude Chappuis, qui a tout pour elle – le style, la diction, la justesse, l’expression. L’approche globale n’est pas infidèle aux influences debussystes et ravéliennes du compositeur, mais rarement cette musique aura paru à la fois si lumineuse et moderne – Messiaen s’annonce déjà. Mentionnons un travail éditorial soigné, comprenant (en français, anglais et allemand), une notice de Jean-Yves Bras ainsi que les textes chantés (MIR 160). SC




Quand Saariaho rime avec trio





Le Trio Zebra, en étroite collaboration avec Kaija Saariaho (née en 1952), présente cinq trios de la compositrice finlandaise, chacun pour une combinaison instrumentale différente comprenant un, deux ou trois instruments du trio à cordes. Le violoncelle d’Anssi Karttunen, interprète fort apprécié de Saariaho, est présent à chaque fois. Le Cloud Trio (2009), l’œuvre la plus récente, dédiée aux Zebra, est le seul qui les réunit (Ernst Kovacic au violon, Steven Dann à l’alto). Le mouvement perpétuel des nuages, aux formes qui se font et se défont sans cesse au plus léger vent, inspire la structure organique en arche de cette pièce en quatre volets, les jeux instrumentaux en écho, en métamorphose ou en ombre, leurs lignes délicatement agitées créant de fines textures fluctuantes. L’un suivant l’autre, seul, en duo ou en trio, l’alto, le violoncelle et le piano (Tuija Hakkila) de Je sens un deuxième cœur (un pendant à l’opéra Adriana Mater, 2003) participent au puissant élan d’une même phrase musicale pour ensuite partir en oblique, créant une polyphonie tantôt tumultueuse et violente tantôt aux longs étirements délicats, soyeusement enveloppés de résonances diaphanes. Si l’on met les deux œuvres en parallèle, s’en dégagent nettement les caractéristiques fondamentales de l’écriture de Saariaho. Les trois autres pièces révèlent le même soin porté au caractère distinct de chaque instrument, le même souci de couleur et de contraste, une même énergie jusque dans la douceur, une même mobilité agitée ou calme. Les tremblants miroitements de Cendres (sur le matériau de ...à la fumée, 1998) passent de la flûte alto (Mikael Helasvuo) au piano, les tremolos du violoncelle plus roboratifs. L’étrangeté menaçante du violoncelle et du piano de la version de chambre de Mirage (2007), qui s'inspire des incantations d’une Mazatèque chamane aux certitudes irréelles, vient en métatexte d’une soprano – Pia Freund – fantasque mais lumineuse. Les cinq Serenatas de 2008 opposent le sombre damas du violoncelle aux percussions cristallines (Florent Jodelet), le piano chromatiquement inventif aux antipodes des deux. Le style distinctif de Saariaho et son génie coloriste s’y déploient clairement (Ondine ODE1189-2). CL




Quand Boccherini rime avec Monighetti





Si l’on aligne les noms des grands solistes ayant interprété des concertos pour violoncelle de Boccherini, la popularité de certains d’entre eux ne fait aucun doute: Casals, Rostropovich, Du Pré, Bylsma, Wang, ... Dans une optique d’interprétation baroque ou, du moins, authentique, les gravures signées par Anner Bylsma, que ce soit avec l’ensemble canadien Tafelmusik (Sony) ou avec ses comparses néerlandais du Concerto Amsterdam (Teldec), Tim Hugh pour les deux premiers volumes, Raphaël Wallfisch pour le troisième (tous deux chez Naxos), s’avèrent être les plus convaincants. Le présent disque, réunissant des enregistrements réalisés en janvier 1993, met en valeur un autre soliste, Ivan Monighetti (né en 1948), plutôt connu pour ses affinités avec le répertoire contemporain (en particulier Penderecki). Son jeu, dominé par une fine élégance, est excellent: sans jamais trahir de problème de justesse (même lorsque le violoncelle s’aventure dans un registre relativement aigu), il ancre parfaitement Boccherini dans le répertoire classique, témoignant en maintes occasions d’une liberté de jeu plus qu’appréciable. Ainsi, la cadence de l’Allegro concluant le Deuxième Concerto est idéale. On pourrait toutefois apprécier un peu plus d’âpreté, voire de rudesse, dans le jeu des mouvements rapides (l’Allegro concluant le Premier Concerto), mais ces couleurs sont plutôt laissées à l’orchestre, l’Akademie für Alte Musik de Berlin, rompu à ce répertoire: bref, une lecture tout à fait recommandable (Berlin Classics «Reference Gold» 0115032BC). SGa




Quand Boccherini ne rime pas avec Frittoli





Le Stabat Mater est une des pièces vocales les plus célèbres de Boccherini. La version initiale, datant de 1781, fut remaniée en 1800 pour adjoindre notamment à la partie de soprano des voix de mezzo et de ténor: en l’espèce, c’est la version initiale qui nous est proposée. L’affiche de ce concert était prometteuse, connaissant les indéniables talents de la soprano italienne Barbara Frittoli, notamment dans le répertoire verdien; la déconvenue est donc d’autant plus grande. Tout d’abord, la voix est victime d’un vibrato quasi incessant (en particulier dans le «Stabat Mater » introductif et dans le «Quando corpis») qui nuit en grande partie au caractère épuré et méditatif de ce chant. Surtout, elle est trop opératique dans bien des passages (le «Cujus anima»), ce qui constitue à nos yeux une indéniable faute de genre: elle ne convainc donc guère, si ce n’est dans les dernières mesures du «Quando corpis», où la déploration atteint son paroxysme. Côté orchestre, la prestation des «Virtuoses du Théâtre de la Scala», dirigés par Mattia Rondelli, n’est pas non plus à la hauteur, souffrant notamment d’attaques de cordes assez laides («Quae moerebat») quand il ne s’agit pas, purement et simplement, d’une justesse en perdition comme c’est en particulier le cas dans le «Quis est homo». Bref, on oublie bien vite cette parution qui ne fait aucune ombre à la version, si touchante celle-ci, d’Agnès Mellon accompagnée par Chiara Banchini (Harmonia Mundi). Les compléments du présent disque (l’air Misera, dove son! et la Sinfonia n° 18 en fa majeur) sont globalement de meilleur niveau que le Stabat Mater mais n’en justifient pas pour autant l’achat, Chiara Banchini (encore elle) et les siens ayant fait incomparablement mieux (Sony Classical 88697479712). SGa




La jeunesse debussyste et mahlérienne de Julie Fuchs





Julie Fuchs (née en 1984), qui vient de triompher salle Favart dans le rôle-titre de Ciboulette, choisit, pour son premier récital au disque, d’associer des genres à la fois opposés et complémentaires: l’inspiration populaire du lied germanique et l’atmosphère raffinée de la mélodie française. Mais le programme suggère davantage de rapprochements que de conflits, puisqu’il mêle des pages de jeunesse de deux compositeurs de la génération 1860, Mahler et Debussy: du premier, les cinq Lieder de 1880-1883 et quatre des tout premiers Wunderhorn-Lieder, dont l’important La Vie céleste (repris comme finale de la Quatrième Symphonie); du second, quatorze mélodies antérieures à l’obtention du prix de Rome (1884), dont Chanson espagnole en duo avec le ténor argentin Manuel Nunez Camelino. A l’aise en allemand, mais plus encore en français, soutenue avec une grande finesse par Alphonse Cemin (né en 1986), Julie Fuchs, attentive au texte, tour à tour gracieuse et piquante, suave et vive, est aussi jeune et fraîche que les deux compositeurs et leur musique. Si elle perd parfois en homogénéité et en précision dans l’aigu, son timbre, son naturel et sa musicalité ne peuvent toutefois que charmer (Aparté AP050). SC





Désert et Strosser retournent en enfance





A l’occasion de la Folle Journée de Nantes, Mirare édite des disques en rapport avec la thématique, cette année la musique française et espagnole des XIXe et XXe siècles. Claire Désert et Emmanuel Strosser interprètent quelques œuvres pour piano à quatre mains inspirées de l’enfance : Dolly de Fauré, Jeux d’enfants de Bizet, Petite suite de Debussy et Ma mère l’Oye de Ravel. Le plaisir est au rendez-vous grâce à un jeu doux et poétique. Le duo caractérise chacune de ces pièces avec finesse et clarté mais certaines d’entre elles paraissent un peu trop mécaniques comme «Pavane de la Belle au bois dormant». Un joli disque néanmoins (MIR 190). SF




Les jeux verbaux de l’ensemble vocal Aedes





Ludus verbalis de Rautavaara prête son titre à un projet de l’ensemble vocal Aedes qui comportera quatre volumes de musique sacrée et profane. La parution du deuxième volume conclut la partie profane, la présence du cycle Sacred and Profane (1975) de Benjamin Britten annonçant la suite. Le programme comprend sept recueils pour chœur. Quoique d’horizons très différents, les sept compositeurs, tous actifs au XXe siècle, jouent avec le sens et les sonorités des mots de poètes de tous les temps. A l’esthétique doucement plaintive mais non sans audace, A Yeats Trilogy (2011) est le fruit d’une commande d’Aedes à Philip Lawson (né en 1957), longtemps membre des King’s Singers. Si Aedes propose des recueils peut-être moins courus des six compositeurs plus célèbres, l’écriture mélodique et harmonique reste caractéristique de chacun. Britten, vocalement subtile et audacieux, et Martinů, qui cultive avec adresse le genre et la source populaire morave de ses Quatre madrigaux polyphoniques de 1959, illustrent des anonymes de leur pays à la langue savoureuse. Martin et Hindemith se plient aux rythmes variables d’une langue d’ailleurs, le premier celle de Shakespeare dans ses Songs of Ariel (1950) délicatement inventifs, le second traitant avec une souplesse raffinée des poèmes en français de R. M. Rilke (Six Chansons, 1939). Poulenc (Sept Chansons, 1936) s’adapte avec esprit aux mots et à l’imaginaire d’Apollinaire et d’Eluard. Ravel (Trois Chansons, 1915) garde son indépendance en écrivant ses propres textes déplorant la guerre, l’ensemble dans une veine d’antan finement réussie. Mathieu Romano dirige ses dix-huit chanteurs avec le souci de mettre en valeur le relief et le caractère particulier de chaque pièce de cet ensemble éclectique. La diction nette, Aedes cisèle les nuances harmoniques et la clarté des lignes. La beauté des voix aux timbres travaillés s’équilibre avec finesse, la limpidité vocale des sopranos, dont la soliste Agathe Boudet, un plaisir en soi (Eloquentia EL 1237). CL




Bach tout en Contraste





Arrangé, transcrit, adapté, réduit – Bach en a vu d’autres et s’est lui-même livré à l’exercice aussi bien avec les œuvres de ses contemporains qu’avec les siennes propres. L’Ensemble Contraste, dans une formation incluant désormais l’altiste Maria Mosconi, s’y met à son tour dans dix pièces originellement destinées au clavier (deux préludes de choral, la Passacaille et Fugue en ut mineur, un prélude du Clavier bien tempéré et la «Sinfonia» de la Deuxième Partita), à la voix (la «Sinfonia» et le chœur introductif de la Cantate «Weinen, Klagen, Sorgen, Zagen», le début du Motet «Singet dem Herrn» et l’air «Erbarme dich» de la Passion selon saint Matthieu, l’air Bist du bei mir) ou à un ensemble (le fameux «Ricercare à 6» de L’Offrande musicale que Webern a orchestré). Elles sont ici transcrites pour quatuor avec piano (cinq), trio à cordes (trois), alto et piano (une) ou piano seul (une) par son directeur musical, le pianiste (et chef) Johan Farjot (huit), son directeur artistique, le violoniste Arnaud Thorette (une), et le compositeur (et pianiste) Karol Beffa (une). Un Bach très zen, détaché et limpide, presque éthéré et immatériel, à la limite de la froideur et de la raideur (La dolce volta LDV 04). SC




Vivaldi en Vendée





Au sein du catalogue de Vivaldi, les concertos pour flûte font partie des œuvres sans nul doute les plus populaires: les noms accolés à certains d’entre eux (La tempesta di mare, La notte, Il gardellino) sont connus depuis des lustres et ravissent le public lorsqu’ils sont donnés en concert. Fondateur de la Simphonie du Marais et flûtiste émérite comme il l’a encore récemment prouvé dans Bach, Hugo Reyne (né en 1961) donne ici six concertos pour flûte à bec et flûte traversière du maître vénitien qui, bien qu’enregistrés en septembre 2010, ne doivent officiellement paraître qu’au début du mois prochain. Cette prestation aurait pu facilement passer inaperçue si Reyne n’avait pas eu l’intelligence de recourir à des instruments différents pour presque chaque concerto (seule une flûte alto Mayer est utilisée pour deux concertos, les RV 433 et RV 439), donnant ainsi à chacun ses couleurs, sa tonalité et son climat propres. Et, de fait, le résultat est on ne peut plus convaincant: ces partitions, parfois rabâchées jusqu’à l’ennui, retrouvent une nouvelle jeunesse et suscitent de nouveau l’attention. Il gardellino (qui existe également dans une version numérotée RV 90 pour trois violons) volette avec une grâce incroyable (écoutez le jeu entre le premier violon et la flûte dans le premier mouvement!), le Largo de La notte recouvre ses couleurs lugubres tandis que son mouvement central ébouriffe sans la caricature que l’on entend trop souvent. Autre élément attachant de ce disque, la dédicace des six concertos à des professeurs ou flûtistes admirés par Reyne (Frans Brüggen, Jean-Noël Catrice, flûtiste de l’ensemble Les Ménestriers, Pierre Paubon, décédé en 1995 et vénérable artisan de la renaissance du répertoire pour flûte à bec, ...), qui rend cet opus éminemment personnel et, pour cette seule raison, extrêmement précieux (Musiques à la Chabotterie 605012). SGa




Stéphane Denève célèbre Poulenc





2013 est aussi une «année» Poulenc, disparu voici cinquante ans: Stéphane Denève, qui s’est fait au disque une spécialité de la musique française, notamment au travers d’une intégrale Roussel très remarquée (Naxos), ne l’oublie pas. Avec son Orchestre radio-symphonique de la SWR de Stuttgart (menacé d’une absurde fusion avec son homologue de Baden-Baden), l’Ensemble vocal de la SWR et le Chœur de la NDR, il rend hommage – pour reprendre la célèbre formule de Claude Rostand – aussi bien au moine, avec une œuvre sacrée, qu’au voyou, avec un ballet libertin. Le chef français, qui a déjà consacré au compositeur un programme concertant (RCA), fait mouche aussi bien dans le Stabat Mater, enregistré en public en mars 2012 et agrémenté d’excellentes interventions de la soprano allemande Marlis Petersen, que dans Les Biches (non pas la Suite, mais, une fois n’est pas coutume, les 35 minutes de la musique intégrale avec chœur), quelques jours plus tôt en studio: un Poulenc stimulant, fin mais pas chichiteux, svelte et vigoureux, d’un fier néoclassicisme plutôt que d’un romantisme émollient (Hänssler Classic 93.297). SC





A la découverte de Bloch avec Elsa Grether





La Première (1920) sombre et violente, la Seconde (1924) claire et mystique, les deux Sonates pour violon et piano de Bloch méritent de figurer au répertoire des violonistes: cela changerait de l’ordinaire. Remarquablement soutenue par Ferenc Vizi (né en 1974), Elsa Grether (née en 1980) les défend avec une force de conviction peu commune. La technique est solide et la sonorité pas désagréable mais, sur ce point, l’expressivité l’emporte sur la séduction. Le célèbre Nigun ne mérite guère de commentaire tandis que la dimension spirituelle de Fratres d’Arvo Pärt ne se manifeste presque pas à cause de passages trop rudes et épais. Dans son texte de présentation, Harry Halbreich témoigne de son enthousiasme habituel (Fuga Libera FUG 711). SF




Ravel à Lyon: début décevant





Après une intégrale Debussy et un album Messiaen avec son précédent directeur musical, Jun Märkl, l’Orchestre national de Lyon a poursuivi sa collaboration avec Naxos dans le répertoire français dès l’arrivée de son successeur, Leonard Slatkin, en septembre 2011: enregistré au lendemain d’un album Berlioz modérément intéressant, voici ce qui s’annonce comme le premier volume d’une anthologie consacrée à Ravel. Après Rosenthal, Martinon et Boulez, pour ne citer qu’eux, l’entreprise tient de la gageure: c’est ce que confirme hélas ce programme, essentiellement placé, hormis l’ouverture Shéhérazade et le Menuet antique, sous le signe de l’Espagne (Pavane pour une infante défunte, Alborada del gracioso, Rapsodie espagnole, Pièce en forme de habanera, Boléro). La formation lyonnaise ne manque pas de finesse, collectivement comme individuellement – les solos de Boléro constituent toujours un excellent test à cet égard – mais la direction trop souvent fade et aimable, parfois même molle et complaisante, du chef américain amène à s’interroger sur la logique aussi bien économique qu’artistique de telles publications (8.572887). SC




Le Rameau moderne de Natacha Kudritskaya





A la suite du succès de son projet «Le Maître et l’Elève» (voir ici, ici et ici) et toujours dans le but de soutenir de jeunes musiciens, le Festival 1001 Notes (l’association Opus 87) lance un nouveau projet qui est de permettre à de jeunes solistes de talent de toucher une plus large audience par le moyen d’un premier disque. Attachée depuis ses études à Kiev à la musique française de Couperin à Dusapin, Natacha Kudritskaya (née en 1983) a parachevé sa formation au CNSM de Paris auprès d’Alain Planès, Henri Barda et Jacques Rouvier. Pour 1001 Notes, elle choisit d’interpréter deux suites pour clavecin de Rameau, comprenant principalement des pièces de caractère à la française. Après un travail de recherche approfondi à Royaumont, la pianiste ukrainienne reste convaincue, comme Alexandre Tharaud avant elle, que, si le clavecin accuse la vérité de ces pièces, ce «n’est pas [leur] unique vérité»» et son interprétation de la Suite en ré (seconde du deuxième recueil, 1724) et la Suite en la (première du troisième recueil, 1728) sur piano moderne Yamaha révèle des possibilités de brillance, de souplesse, de nuance et d’expressivité qui ne trahissent ni l’esprit instrumental et poétique de ces pièces ni «la mécanique des doigts» si ardemment enseignée par le compositeur. On écoute avec plaisir l’acuité et le caractère personnel du jeu de Natacha Kudritskaya, qui lui ont valu le prix Robert Casadesus en 2009 et qui donnent lieu à ce récital capté en septembre 2012 et tout à fait prometteur (1001Notes03). CL




Trésors cachés de la musique sacrée française





S’appuyant depuis 2009 sur une «école maîtrisienne» qui permet aux élèves, du cours préparatoire à la troisième, de concilier leur cursus scolaire et leurs activités musicales, la Maîtrise de la cathédrale de Strasbourg s’intéresse, sous le titre «Trésor de Joie», au répertoire sacré français. Sous la houlette de Cyprien Sadek, directeur musical depuis 2009, et accompagnée par Gilberto Scordari (né en 1977), organiste de la basilique des Saints-Apôtres où cet enregistrement a été réalisé, les vingt-six chanteurs offrent un parcours fort intéressant parmi ces compositeurs qui ont diversifié et enrichi une musique jusqu’alors trop souvent confite en sulpicianisme: Poulenc (Priez pour paix) fait ici figure de célébrité, mais si les noms de Jehan Alain (Ave Maria), Caplet (Salutation angélique), Duruflé (Notre Père et une belle Méditation posthume pour orgue) et Ropartz (Vierge Sainte) sont évidemment familiers, c’est l’occasion de les entendre dans des œuvres plus rarement données. Un Ubi caritas (2011) commandé à Pascal Reber (né en 1961), titulaire du grand orgue de la cathédrale, et plusieurs pièces de Jean Langlais (1907-1991) satisferont les esprits curieux, mais on saluera plus encore le choix de la Messe brève du bien oublié Pierre de Bréville (1861-1949). Initiative d’autant plus opportune que malgré des voix encore assez vertes et pas toujours bien placées, le travail d’ensemble se révèle d’excellente qualité (Jade 699 772-2). SC




Verdi et Wagner pour les novices (et encore)


        


Parus chez Eyrolles, ces ouvrages de deux cents pages environ retracent la vie et l’œuvre de ces deux géants de l’art lyrique. Sylvie Oussenko (avec la collaboration de Gabriel Bacquier pour Verdi et de François Poncet pour Wagner) recourt à un style simple et direct mais, à la longue, l’abondance de points d’exclamation finit par agacer, de même que les petites digressions et autres comparaisons hasardeuses («Le théâtre d’opéra a toujours été en avance sur le cinéma. Puccini [...] inventera le premier western spaghetti avec La fanciulla del West, Wagner avec sa Tétralogie ira beaucoup plus loin que Le Seigneur des anneaux, Mozart en compagnie de son Don Giovanni, Weber avec Der Freischütz pulvérisent le fantastique des romans de Stephen King»). L’auteur sous-entend que le niveau baisse à Bayreuth («Autant passer sous silence nombre des productions actuelles») – hors sujet – et apporte de nombreux détails domestiques pour rendre les compositeurs sympathiques. Le lecteur apprendra ainsi le nom des animaux ayant appartenu à Wagner (par ailleurs assez porté sur les plaisirs charnels, apprend-on). Structuré en courts chapitres regroupés en parties tout aussi brèves, le texte (aéré) comporte de nombreux encadrés pour définir un terme, éclairer un fait historique ou présenter un personnage, ce qui ralentit la lecture et la rend désagréable. Ces livres, qui se présentent comme des manuels scolaires peu avenants (aucune illustration), se referment avec le sentiment frustrant de n’avoir pas suffisamment pénétré la vie et l’œuvre de ces compositeurs. Annexé à chacun d’eux, un disque comporte quelques extraits de témoignages souvent historiques, surtout pour Wagner (1936 pour le plus ancien), et quelques mélodies chantées par... Sylvie Oussenko. Wagner a droit à une discographie très succincte: l’auteur y recommande par exemple Bernstein (sic) mais ne cite pas Solti. Au vu de la richesse de la bibliographie, la très faible plus-value de ces livres pose question. A la rigueur, le novice pourra les parcourir, mais il n’y reviendra probablement pas. SF




Nemanja Radulovic: mauvais genre





Sous le titre «Après un rêve...», Nemanja Radulovic (né en 1985) s’associe à Marielle Nordmann (née en 1941), l’épouse de son mentor Patrice Fontanarosa, pour un album de pièces de genre qui se conclut bien sûr par la célèbre mélodie de Fauré. Hormis la Fantaisie de Saint-Saëns, les arrangements se taillent la part du lion – Chopin (Nocturne en ut dièse mineur), Tchaïkovski (Romance de La Dame de pique), Bartók (Danses populaires roumaines), Ravel (Pièce en forme de habanera), Massenet (Méditation de Thaïs) – dans ce disque d’à peine une heure où le violoniste ne manque jamais d’abattage mais se fait parfois vraiment trop plaisir, comme s’il venait donner la sérénade d’une table à l’autre de quelque cabaret slave. Mais comme dans tout récital qui se respecte, l’«accompagnatrice» est mise en vedette dans trois œuvres en solo: sa transcription du bref triptyque La Cathédrale et d’une Etude de concert d’Agustín Barrios (originellement pour guitare) ainsi que Le Sylphe de Karl Oberthür (Transart TR174). SC




Max d’Ollone: jamais trois sans quatre





Il aura fallu quatre tentatives à Max d’Ollone (1875-1959) pour remporter le prix de Rome. A l’exception de Daphné (1894), le quatrième volume que le Palazzetto Bru Zane consacre à ce concours comporte les cantates qu’il a soumises au jury: Clarisse Harlowe (1895), qui a remporté le deuxième prix, Mélusine (1896), non récompensé (ce qui a provoqué une vive indignation, comme l’explique Alexandre Dratwicki), et Frédégonde (1897). Du beau travail, surtout la dernière, bien enlevée et judicieusement agencée sur le plan thématique. Le langage et l’orchestration restent traditionnels: il paraît vain de déceler chez cet élève de Massenet la moindre trace de génie, même en germe. Composés pour le concours d’essai, les brefs chœurs avec orchestre présentent un intérêt documentaire: dans l’ordre chronologique, L’Eté, Hymne, Pendant la tempête et Sous-bois. Envoi de Rome, Les Villes maudites (1899) s’écoutent sans déplaisir mais, décidément, l’orchestration, bien comme il faut, ne constitue pas le trait dominant du métier du compositeur. Sous la direction d’Hervé Niquet, solistes, chœur et orchestre exécutent cette musique de façon très acceptable. Patrice d’Ollone retrace la carrière de son grand-père après son séjour à la Villa Médicis mais passe sous silence l’un ou l’autre aspect de sa vie comme la présidence de la section musique du Groupe Collaboration. Cette publication pointue et impeccablement présentée s’adresse aux mordus de musique française (Ediciones Singulares ES1010). SF




Arnaud Petit: «Nervoso»... ma non tanto





Fabrice Marandola (né en 1972), qui forme avec Kristie Ibrahim le Duo Akrostick, consacre un disque monographique à Arnaud Petit (né en 1959). Si près du vent (2009) et ses deux marimbas d’une virtuosité ludique et haletante contrastent avec Fantosmes (2011), pièce aux climats plus variés où les timbres du vibraphone et du marimba se fondent de manière délibérément ambiguë. Elève de Schaeffer, Reibel et Berio, le compositeur se plaît à associer à la percussion l’informatique et l’électroacoustique, comme dans Concertino Nervoso (2008), qui donne son titre à ce bref album (moins de 45 minutes): sertis entre deux mouvements où – comme dans Song from Waves (2005), une pièce plus brève qui conclut le programme – les onomatopées, cris, bruitages et paroles éparses dans diverses langues évoquent la Symphonie pour un homme seul, les trois mouvements centraux s’inscrivent en revanche dans une dimension plus expressive et lyrique. La soprano canadienne Julieanne Klein y chante de façon inégalement agréable à l’oreille un texte (en français) quasiment incompréhensible, en raison d’un accent qui, selon Arnaud Petit, «en rend la perception plus mystérieuse» (Le Chant du monde LDC 278 1155). SC




La rédaction de ConcertoNet

 

 

Copyright ©ConcertoNet.com