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03/26/2023
« The Unreleased Masters »
Richard Wagner : Tristan und Isolde (extraits) [1] – Wesendonck-Lieder [2]
Richard Strauss : Quatre derniers lieder, AV 150 [3]
Joseph Haydn : Berenice, che fai ?, Hob. XXIVa.10 [4]
Hector Berlioz : La Mort de Cléopâtre, H 36 [4]
Benjamin Britten : Phaedra, opus 93 [4]

Jessye Norman (soprano), Hanna Schwarz (mezzo), Thomas Moser, Ian Bostridge (ténors), Gewandhausorchester Leipzig [1], Berliner Philharmoniker [2, 3], Boston Symphony Orchestra [4], James Levine [2, 3], Kurt Masur [1], Seiji Ozawa [4] (direction)
Enregistré en public à Berlin (1989 [3], 1992 [2]) et en studio à Boston (1994 [4]) et à Leipzig (1998 [1]) – 165’25
Coffret de trois disques Decca 4852984


Must de ConcertoNet





Alimentant quelques polémiques mais à la grande satisfaction de ses fans, l’éditeur phonographique Decca publie trois disques d’enregistrements jamais publiés du soprano américain Jessye Norman disparu en 2019 à 74 ans.


On savait Jessye Norman perfectionniste. L’immense artiste américaine à la stature de déesse et aux sourires ravageurs à la scène pouvait se transformer au studio en personnage de cauchemar pour ses managers, directeurs artistiques et ingénieurs du son, et ceci par pure exigence artistique. Si sa discographie est abondante et couvre des genres très variés, de la mélodie française aux spirituals du gospel, un certain nombre d’enregistrements couvrant particulièrement neuf ans de la fin de sa carrière virent à leur parution s’opposer le véto formel de cette diva de l’opéra des dernières décennies du XXe siècle. Parmi eux, des extraits de Tristan et Isolde de Wagner, rôle qu’elle n’avait jamais tenu à la scène et dont elle avait chanté au Festival de Salzbourg en 1988 avec les Wiener Philharmoniker sous la direction de Herbert von Karajan une Mort d’Isolde d’anthologie, heureusement captée et publiée et qui reste aujourd’hui à notre avis la meilleure de toute la discographie (Deutsche Grammophon). Isolde était pour elle « le fruit défendu, juste à sa portée mais pas entièrement » car elle savait qu’elle n’aurait jamais la résistance vocale de chanter au théâtre ce rôle écrasant. Aussi, quand fut décidé en 1998 un enregistrement de studio sous la direction de Kurt Masur avec le somptueux Orchestre du Gewandhaus et une distribution à sa hauteur (Thomas Moser, Hanna Schwarz, Ian Bostridge), on crut que l’on allait tenir une intégrale. Mais nuages et tensions s’accumulèrent rapidement, aboutissant à l’abandon du projet d’intégrale puis à son véto catégorique après l’audition des premiers montages. L’écoute des principaux extraits des trois actes la montre dans une forme éblouissante et ne fait qu’attiser les regrets...


Le deuxième disque réunit les gravures de deux cycles de lieder avec orchestre : les Quatre derniers lieder de Richard Strauss et les Wesendonck‑Lieder de Wagner, deux pièces maîtresses dont elle avait gravé plusieurs versions, mais il s’agit de deux enregistrements de concerts berlinois avec les Berliner Philharmoniker dirigés par James Levine respectivement en 1989 et 1992. Si les Wesendonck reçurent son approbation, la chanteuse butta sur les Quatre derniers lieder. L’écoute soigneuse permet de deviner qu’une note de « Frühling » ne lui parut pas digne de son impeccable art du chant mais l’ensemble est considérable compte tenu des conditions du direct ; son interprétation n’en a peut‑être jamais été aussi intense, même dans l’enregistrement de studio mythique réalisé à Dresde avec Kurt Masur en 1982.


Le troisième disque réunit un trio de reines mythologiques, la scène de Bérénice de Haydn, la Cléopâtre de Berlioz et la cantate Phèdre de Britten, toutes trois enregistrées en studio avec l’Orchestre symphonique de Boston dirigé en 1994 par Seiji Ozawa. S’il en existe d’autres versions éparses, leur réunion en un même projet est exceptionnelle et en justifie la parution tardive, dans ce cas retardée par une insatisfaction du soprano sur le mixage du Berlioz, qui a donc été modifié pour cette sortie.


La publication a été rendue possible par l’accord de la fondation philanthropique crée par Jessye Norman et particulièrement de son frère James Norman, « préférant faire passer les intérêts représentés pour la fondation au‑dessus des considérations artistiques ». Rien de tel pour alimenter une polémique, notamment dans le New York Times. Si la question se pose souvent dans les milieux littéraires, quelques précédents fameux ont été l’objet de controverses dans le musical notamment pour les familles de Carlos Kleiber ou Sergiu Celibidache, sans parler du cas de Maria Callas, dont certains éditeurs « pirates » ont exploité jusqu’aux dernières des bandes qui n’étaient pas toujours dignes de la grande probité de cette interprète. La question reste donc entière quant à la validité de la publication de matériel censuré. Dans le cas de ces enregistrements de Jessye Norman, on préfère penser qu’au‑delà des polémiques, les inconditionnels y trouveront leur bonheur.


Olivier Brunel

 

 

 

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