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12/13/2022
Luigi Cherubini : Les Abencérages ou L’Etendard de Grenade
Anaïs Constans (Noraïme), Edgaras Montvidas (Almanzor), Thomas Dolié (Alémar), Artavazd Sargsyan (Gonzalve, Le troubadour), Philippe-Nicolas Martin (Kaled), Tomislav Lavoie (Alamir), Douglas Williams (Abdérame), Lóránt Najbauer (Octaïr, Le héraut d’armes), Agnes Pintér (Egilone), Purcell Kórus, Orfeo Zenekar, Győrgy Vashegyi (direction)
Enregistré dans la salle de concert Béla Bartók du Műpa, Budapest (7‑9 mars 2022) – 169’08
Livre et trois disques Bru Zane BZ 1050 – Notice en anglais et en français





On ne peut qu’être fasciné par la liste interminable d’artistes venus chercher la gloire musicale à l’étranger avec plus ou moins de bonheur, et tout particulièrement à Paris. Parmi eux, le cas des compositeurs issus de la péninsule italienne surprend plus encore, tant la virtuosité n’avait pas bonne presse dans notre pays depuis Lully et son art déclamatoire laissant davantage de place au théâtre. Au gré des nombreuses controverses entre tenants de la tradition et réformateurs, tout au long du XVIIIe siècle, les partisans des deux camps s’affrontent, ce que Bru Zane a déjà largement documenté avec les enregistrements consacrés à Sacchini, Salieri et, dans une moindre mesure, Spontini.


On se réjouit que le trente‑quatrième volume de la collection honore enfin la figure de Luigi Cherubini (1760‑1842), lui qui passa les cinquante‑cinq dernières années de sa vie en France, obtenant la naturalisation et tous les honneurs académiques dus à son éminente carrière. Cherubini se joua habilement des nombreux changements de régime à partir de 1789, tout en restant le protégé du futur Louis XVIII. Les succès éclatants se suivent ainsi entre Lodoïska (1794), un ouvrage admiré de Beethoven, Médée (1797) et surtout Les Deux Journées (1800). Moins apprécié ensuite, notamment par Napoléon, le compositeur cherche à rejoindre Vienne, mais échoue à séduire le prince Nicolas II Esterházy avec sa monumentale Messe solennelle en ré (1811), spécialement composée à son attention (voir le superbe enregistrement réalisé par Frieder Bernius en 2001).


C’est dans ce cadre d’incertitude que le compositeur s’attelle à la composition de l’un de ses plus vastes ouvrages, Les Abencérages (1813), pour l’Opéra de Paris. L’échec relatif du projet le conduit ensuite à un silence lyrique de près de vingt ans, interrompu avec son dernier opéra Ali Baba ou Les Quarante Voleurs (voir la production de l’Opéra national du Rhin et de l’Athénée en 2010‑2011) – un échec retentissant.


Par rapport à ses succès des années 1790, le style de Cherubini a évolué en 1813 vers une attention plus soutenue à l’harmonie, admirablement étagée par les vents : l’orchestre est ainsi davantage un acteur du drame et plus seulement un soutien docile des chanteurs. A la baguette, on retrouve Győrgy Vashegyi, plus connu en tant que partenaire du Centre de musique baroque de Versailles, avec lequel il a gravé de nombreux disques consacrés à l’art de Rameau, notamment (Naïs, Les Fêtes de Polymnie, Dardanus). En rejoignant les équipes de Bru Zane pour une incursion dans le préromantisme, le chef hongrois fait ressortir les nombreuses sonorités savantes de l’orchestration de Cherubini, mais néglige quelque peu les contrastes entre verticalités, moins saillantes que dans la version abrégée de Peter Maag (Arts Archives, 1975).


Hormis la coupure d’une partie des ballets, l’ouvrage bénéficie ici d’une édition complète, ce qui constitue son atout décisif. La distribution vocale, de bonne tenue, peine toutefois à apporter un relief particulier à l’ensemble. Malgré un timbre charnu et agréable, Anaïs Constans (Noraïme) manque ainsi de variété au niveau interprétatif, tandis qu’Artavazd Sargsyan (Gonzalve, Le troubadour) pèche par un volume insuffisant pour assumer son double rôle avec conviction. On lui préfère l’Almanzor d’Edgaras Montvidas, crédible dans ses élans, au vibrato maîtrisé (contrairement à d’autres enregistrements précédents avec le Palazzetto) ou encore l’Alémar de Thomas Dolié, toujours aussi solide dans ses différentes interventions. L’excellent Chœur Purcell, très sollicité par la partition, apporte un soutien décisif, en portant un soin à la nécessaire diction.


Florent Coudeyrat

 

 

 

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