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07/07/2014
Pascal Dusapin : Reverso, solo n° 6 pour orchestre – Uncut, solo n° 7 pour orchestre – Morning in Long Island, concert n° 1 pour grand orchestre
Orchestre philharmonique de Radio France, Myung-Whun Chung (direction)
Enregistré à la Salle Pleyel, Paris (10 décembre 2010 [Reverso] et 24 juin 2011 [Morning]) et à l’Auditorium de Lyon (25 janvier 2012 [Uncut]) – 62’32
Deutsche Grammophon DGG 4810786 (distribué par Universal) – Notice en français et en anglais





Après le Cycle des sept formes, sept Solos pour orchestre à la fois indépendants et interdépendants, Pascal Dusapin (né en 1955) lance un nouveau cycle de trois «concerts» pour orchestre par Morning in Long Island (2010), pour l’instant le seul composé. Si les Solos traitent l’orchestre comme un instrument unique, la différence entre eux relevant de l’instrumentation précise et plus encore du procédé principal qui devient la forme, ce Concert initial présente un orchestre plus éclaté, comme le genre peut l’exiger.


En tête de programme, les deux derniers Solos marquent la clôture du cycle, ouvrant ainsi la voie au commencement d’un deuxième. Malgré une construction en quatre moments distincts, quatre vagues qui se relaient en puissant reflux, Reverso (2005-2006) fuse en une longue ligne constante aux cordes qui naît du silence pour retourner au silence. La ligne se replie ou se dilate, s’étoffe ou s’étiole, s’ornemente à la harpe et se traverse d’éclats intempestifs venant de la percussion ou des cuivres. Dominé par les cuivres, Uncut (2008-2009), diamant brut aux éclats de fanfare sauvage, s’inspire du matériau aux petites échelles – «gammes» de quatre notes – des Solos précédents et file de nouveau une ligne complexe et ininterrompue, la violente pulsion en avant brutalement coupée in fine comme le passage du mur invisible du son précipite dans le silence d’un monde nouveau.


Le nouveau monde est à Long Island. L’inspiration de ce deuxième cycle sera la nature et Morning in Long Island découle d’un souvenir pénétrant de l’alchimie des lieux ressentie par un petit matin frais, souvenir qui remonte à octobre 1988. Dès lors, si ce n’était pour le quatrième mouvement («Swinging») aux rythmes de danse et aux percussions et cuivres plus latino-américains, l’œuvre approcherait le poème symphonique et évoquerait les lumières obliques, les ombres courant devant le soleil pâle d’un ciel cahoteux, les embruns sur les ailes du vent, la houle et le fracas des vagues parés de cris d’oiseaux au vol tournoyant. Dusapin crée d’avance ces impressions par son titre et par la réalité du souvenir mais, si les aspects programmatiques s’avéraient, les strates étoilées des trois premiers mouvements les mêlent intimement en de longues lignes irisées qui constamment se superposent et s’entrecroisent.


Au contraire des Solos, mouvements uniques à durée restreinte, le premier Concert est en quatre volets, sa durée légèrement supérieure aux sixième et septième Solos ensemble. La composition se fonde encore sur un développement linéaire complexe, lisse ou heurté, et sur des retournements analogues à ceux de Reverso, les valeurs cuivrées d’Uncut appuyées par un cor, une trompette et un trombone en trio concertant placé à distance de l’orchestre. Le trio lance le lumineux premier mouvement («Fragile»), aux longues tenues scintillantes, qui culmine en un bref «Interlude» plus sombre, plus rugueux. C’est une habile transition vers «Simplement», dont les variations d’intensité et de timbre s’animent progressivement d’effets percussifs pour basculer dans «Swinging», quatrième mouvement inattendu et peut-être inconfortable, moins félin et plus violemment saccadé que proprement swing.


L’impression malaisée de «Swinging», à la mise en place difficile, doit attendre une nouvelle version pour déterminer s’il s’agit d’effets volontaires ou d’un mouvement très éventuellement moins abouti ou si la raideur syncopée en incombe à la prestation. Sur l’ensemble du programme, Myung-Whun Chung mène les forces orchestrales avec fougue, chaque pupitre attentif au détail comme à la qualité des longues tenues diaprées. Plus sensuelle, peut-être, l’interprétation des deux Solos se compare favorablement à la version de Pascal Rophé à la tête de l’Orchestre philharmonique de Liège qui présente le cycle complet mais avec une prise de son moins détaillée et moins ample. L’interprétation de Morning in Long Island est celle de la création, menée avec une grande intensité expressive et avec volonté et conviction.


N’appartenant à aucun courant spécifique, Pascal Dusapin reste un compositeur à part, tout à fait indépendant. Il ne cherche ni à révolutionner le langage musical, ni à faire école mais les qualités de son langage personnel restent indiscutables. Le haut degré de sa science orchestrale n’est plus à prouver et les mélomanes se réjouiront de la découverte aussi bien de la première pièce du cycle des Concerts que de cette nouvelle version de pièces déjà célébrées.


Christine Labroche

 

 

 

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