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10/15/2012
«Dieter Klöcker. L’explorateur à la clarinette»
Franz Anton Hoffmeister : Concerto pour clarinette et orchestre en si bémol majeur[2]
Theodor Baron von Schacht : Concerto pour clarinette et orchestre en si bémol majeur [2]
Franz Danzi : Sextuor pour deux clarinettes, deux cors et deux bassons en mi bémol majeur [3]
Franz Schubert : Der Hirt auf dem Felsen, D. 965
Franz Lachner : Auf Flügeln des Gesanges
Louis Spohr : Six Chansons allemandes, opus 103
Johann Christoph Vogel : Symphonie concertante en si mineur pour clarinette, basson, deux hautbois, deux cors et cordes [2]
Karl Friedrich Abel : Concerto pour violon, hautbois, clarinette et orchestre en si bémol majeur [2]
Johann Georg Heinrich Backofen : Symphonie concertante pour deux clarinettes et orchestre en la majeur, opus 10 [1, 2]
Franz Danzi : Symphonie concertante pour clarinette, basson et orchestre en si bémol majeur [2]
Wolfgang Amadeus Mozart : Sérénade en si bémol majeur pour deux clarinettes, deux cors et deux bassons, KV 196 f [3] – Cor sincerum [4] – Jesu dulcis memoria [4] – Domine Deus salutis meae [4] – Die Hoffnung dient zum Stabe [4] – Sérénade en mi bémol majeur pour deux clarinettes, deux cors et deux bassons, KV 226 [3]

Dieter Klöcker (clarinette), Helen Donath (soprano), Jaap Schröder (violon), Pierre W. Feit (hautbois), Waldemar Wendel [1] (clarinette), Karl-Otto Hartmann (basson), Klaus Donath (piano), Concerto Amsterdam, Jaap Schröder (direction) [2], Consortium Classicum, Dieter Klöcker (direction) [3], Sukùv komorní orchestr, Klaus Donath (direction) [4]
Enregistré en 1972, en 1982 (Schubert, Lachner, Spohr) et en 1987 (Mozart [4]) – 240’15
Coffret de quatre disques Acanta 233355 – Notice bilingue (allemand et anglais)





Quelle bonne idée! C’est le premier réflexe qui vient à l’amateur de compositions pour clarinette lorsqu’il commence à écouter ce très généreux coffret de quatre heures consacré, à travers plusieurs pièces, au talentueux Dieter Klöcker (1936-2011) dont le décès, outre qu’il est arrivé trop tôt, est malheureusement passé inaperçu. Et pourtant quel artiste! Issu d’une famille de musiciens, attiré dès l’âge de sept ans par le son velouté de la clarinette, il entame des études musicales solides, couronnées par plusieurs prix, en dépit d’une santé fragile qui a failli, dans l’après-guerre, lui faire définitivement perdre la vue. Cofondateur du Consortium Classicum en 1965, il ne mena jamais de carrière soliste au sein d’un grand orchestre mais préféra être un défricheur du répertoire classique et préromantique consacré à la clarinette. De manière infatigable, il s’acharna donc à exhumer concertos et sérénades, musique de chambre et morceaux les plus divers pour son instrument fétiche. Grâce à lui, on peut ainsi écouter aujourd’hui quelques bijoux comme ce Concerto pour deux clarinettes de Hoffmeister (au sein d’un disque splendide consacré aux concertos pour clarinette pour les chapelles royales et impériales de Vienne et de Berlin, publié chez Koch) ou des concertos de Pedro Solère (Orfeo). Pour cela, déjà, merci Monsieur Klöcker!


Le choix des œuvres présentées ici est varié et peut se subdiviser en trois parties.


La première est consacrée à des pièces intimistes où la clarinette converse avec un piano et une voix. C’est bien évidemment le cas du Pâtre sur le rocher (1828) de Schubertn qui est la dernière œuvre achevée du compositeur. On passera assez rapidement sur cette version qui, sans être déshonorante, se situe nettement en dessous des témoignages laissés par Margeret Price ou Christa Ludwig (avec Gervase de Peyer à la clarinette chez EMI) pour ne citer que deux très belles interprètes de ce célèbre morceau. Dans le lied Auf Flügeln des Gesanges de Franz Lachner (1803-1890), c’est Dieter Klöcker qui déçoit, plus que Helen Donath, le son de sa clarinette trahissant une vraisemblable faiblesse de l’anche qui lui donne quelques couleurs désagréables. Si Louis Spohr (1784-1859) est célèbre pour avoir composé plusieurs Concertos pour clarinette, il est également l’auteur de chansons où la clarinette et le piano, plus que des accompagnateurs, s’élèvent au rang de véritables partenaires. La plus belle des six données ici est peut-être «Sei still, mein Herz» («Calme-toi, ô mon cœur») où la relance de la mélodie vocale par la clarinette est du plus bel effet.


La deuxième partie, la plus intéressante car c’est tout de même là que réside le grand intérêt de ce coffret, réside dans les deux disques consacrés aux concertos méconnus pour clarinette ou, pour certains d’entre eux, pour clarinette et un ou plusieurs autres instruments solistes.
Le premier disque commence par le très talentueux Franz Anton Hoffmeister (1754-1812) qui, outre la clarinette, avait notamment composé des concertos à l’attention de la contrebasse et surtout de l’alto. Dieter Klöcker a souvent fréquenté Anton Hoffmeister, que ce soit par le biais de ses quatuors ou de ses Sinfonias concertante pour deux clarinettes (dont il a donné chez Orfeo une magnifique gravure sous la direction de son comparse Johannes Moesus, en sus du Concerto en si majeur). Brillant premier Allegro, lyrique Adagio, virevoltant et espiègle Rondo: Allegro: la facture classique du concerto ne doit pas masquer la maîtrise des possibilités de la clarinette à l’époque, le tout étant ici magnifiquement servi par Dieter Klöcker. Tout aussi méconnu, le Concerto en si bémol majeur de Theodor von Schacht (1748-1823), issu du très beau disque que Dieter Klöcker avait consacré à ce compositeur en gravant, outre le présent opus, deux autres concertos dont un pour deux et même un pour trois clarinettes (Orfeo). De belle dimension (un premier mouvement de plus de onze minutes), ce concerto est tout aussi caractéristique de cette époque où tout est attendu (introduction par l’orchestre, thème exposé à deux ou trois reprises par le soliste, cadence, et final orchestral) mais l’oreille se laisse tout de même portée par ces mélodies fort agréables. Franz Danzi (1763-1826) a beaucoup composé pour les bois, tout spécialement pour la flûte et le basson. Ce Sextuor pour deux clarinettes, deux bassons et deux cors est assez anecdotique dans l’œuvre de ce compositeur et chef d’orchestre allemand; sans grande recherche, il peut très facilement être oublié.
Le second disque recèle également quelques perles. La première symphonie concertante de Vogel (1756-1788), dont on connaît quelques œuvres symphoniques (on se précipite sur le disque que leur a consacrées Matthias Bamert chez Chandos) et l’opéra La Toison d’or, est assez banale pour l’époque. Clarinette et basson se partagent les solos, l’orchestre ronronnant doucement sans chercher à dynamiser un style fort convenu. Le concerto de Karl Friedrich Abel (1723-1787) est plus séduisant, preuve que ce virtuose de la viole de gambe avait bien d’autres cordes à son arc: la clarinette passe au second plan parmi les solistes, le hautbois et le violon étant prépondérants tout au long de l’œuvre, tout spécialement dans un très mozartien premier mouvement. On regrettera néanmoins une prise de son visiblement vieillotte, qui contribue à coup sûr à ne pas rendre pleinement justice à cette pièce classique. Le Concerto pour deux clarinettes de Johann Georg Heinrich Backofen (1768-1830) est une très belle pièce, témoignant des réels talents de ce clarinettiste dont Klöcker a d’ailleurs enregistré plusieurs concertos (deux disques cpo). Le principe des concertos pour deux clarinettes à cette époque (on écoutera notamment ceux de Crusell, Krommer, Stamitz, Hoffmeister et quelques autres) est assez simple: deux solistes qui occupent tour à tour la première place, l’un s’arrogeant la mélodie tandis que l’autre accompagne (toujours de façon virtuose), soutenu par un petit orchestre attentif. Eh bien, c’est ce que nous avons là et cette musique est vraiment des plus plaisantes: écoutez en priorité le très beau Rondo conclusif où chacun s’en donne à cœur joie, du hautbois au cor en passant par les cordes. Encore une fois, Backofen n’était peut-être pas un génie mais il composait de la belle musique, mettant parfaitement en valeur les timbres et possibilités technique de son instrument de prédilection: n’en demandons pas davantage! Compositeur plus connu, on retrouve Franz Danzi, auteur de plusieurs Sinfonias concertante, la plus célèbre étant certainement celle pour clarinette et flûte, ayant d’ailleurs donné à deux enregistrements de haut vol respectivement signés Jean-Pierre Rampal et Paul Meyer d’une part, James Galway et Sabine Meyer d’autre part. La présente œuvre, dont les trois mouvements sont joués enchaînés sans aucune pause, associe à la clarinette non la flûte mais le basson; sans que la partition ne privilégie vraiment l’un sur l’autre, les deux solistes s’amusent avec virtuosité et nous enchantent de la première à la dernière note.


Troisième partie de ce coffret, le dernier disque est consacré à Mozart, dont on sait combien il aimait la clarinette et dont, bien évidemment, on connaît les pages magnifiques qu’il a consacrées à cet instrument. La Sérénade KV 196 f présentée ici est pourtant d’une authenticité douteuse. Datant peut-être de 1775, c’est une œuvre agréable qui, notamment dans son mouvement lent, témoigne d’une grande attention portée aux divers pupitres, chacun étant traité à part égale même si, par ses sonorités plus aiguës, ce sont les clarinettes qui surnagent. Sont ensuite présentés plusieurs airs de concerts pour voix, clarinette solo et orchestre, à commencer par le très beau Cor sincerum, dont on peut entendre une très belle interprétation par Gerti Zeumer sous la baguette attentionnée de Klaus Tennstedt (Profil Hänssler). Sans atteindre le miracle de l’air de Sextus dans La Clémence de Titus dont la mélodie est d’ailleurs exactement la même que celle de l’air Jesu dulcis memoria également présenté ici, cette page est magnifique et Helen Donath en donne ici une version très convaincante, témoignant de ses affinités avec l’enfant de Salzbourg. Dieter Klöcker est, pour sa part, tout à son affaire et complète l’équipe de la plus belle manière. Quant au Divertimento KV 226, il illustre à merveille l’esprit malin et galant que pouvait avoir Mozart dans certaines compositions, les instruments jouant continuellement à cache-cache entre eux. Dieter Klöcker entraîne avec conviction ses comparses du Consortium Classicum dans les cinq mouvements de ce divertimento qui, on l’aura tout de même compris, ne fait pas l’intérêt de ce disque. Pour une fois que Hoffmeister ou quelques autres doivent être privilégiés à Mozart, ne boudons pas ce petit pied de nez...


Le site du Consortium Classicum


Sébastien Gauthier

 

 

 

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