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01/17/2012
Joseph Wölfl : Sonates pour pianoforte n° 1 en la mineur, n° 2 en ré mineur et n° 3 en la majeur, opus 6, n° 1 en mi bémol majeur, n° 2 en si bémol majeur et n° 3 en mi majeur, opus 15, en ré mineur, opus 27, en sol majeur, en ré majeur et en si mineur, opus 28, en do majeur, en ré mineur et en mi majeur, opus 33, n° 1 en sol majeur, n° 2 en la mineur et n° 3 en ré majeur, opus 54 – Grande sonate en do mineur – Duos pour pianoforte et harpe, opus 29, opus 37 et opus 44 – Trios pour pianoforte, violon et violoncelle n° 1 en ré majeur, n° 2 en mi majeur, et n° 3 en do mineur, opus 23

Elisabeth Balmas (violon), David Simpson (violoncelle), Laure Colladant (pianoforte), Catherine Michel (harpe)
Enregistré en novembre 1987 [4], du 21 au 23 mars 1990 [8], du 26 au 29 juin 1993 [1], en 1995 [5], en 1996 [9], du 5 au 7 juin 2000 [3, 6] et du 7 au 9 septembre 2001 [2, 7] – 474’38
Coffret de sept disques Integral Classic INT 221240/7 – Notice trilingue (français, anglais et allemand)





Voici un compositeur qui, petit à petit, sort de l’ombre. Après un disque exemplaire où l’on avait pu entendre trois de ses Concertos pour piano, compositions aussi inventives que conséquentes dans leur durée et leur agencement, voici un volumineux coffret qui permettra aux amateurs de se plonger dans la musique de chambre de Joseph Wölfl (1773-1812). Elève notamment de Leopold Mozart et de Michael Haydn, il se fit surtout connaître comme pianiste virtuose, technicien accompli et improvisateur de talent, capable d’en remontrer aux meilleurs, y compris à Beethoven dont il fut un rival célèbre dans le domaine pianistique. Disparu prématurément dans des circonstances qui nous demeurent encore inconnues à ce jour, Joseph Wölfl a surtout composé pour le pianoforte même si l’on connaît de lui également quelques symphonies et quatuors à cordes. Le coffret que nous propose ici Integral Classic comble un vide évident en nous permettant d’entendre un large éventail des œuvres que Wölfl a pu composer pour le pianoforte. Laure Colladant, interprète avisée du répertoire classique mais également contemporain, livre une anthologie du plus haut niveau qui réhabilite un compositeur encore trop méconnu.


Si Wölfl ne figure pas parmi les pianistes et compositeurs pour piano les plus connus de son époque (Hummel, par exemple, bénéficie clairement d’une plus grande notoriété), ce n’est pas tout à fait un hasard. Ainsi, certaines sonates sont dénuées d’intérêt: la mélodie du Finale de la Sonate opus 15 n° 2 est ennuyeuse car sans grande imagination; dans une moindre mesure, c’est également le cas de l’Andante de la Sonate opus 28 n° 2, fort convenu. En outre, certains traits et certaines tournures sont clairement inspirés par Mozart ou d’autres compositeurs de cette époque (on pense inévitablement à Haydn): de fait, la comparaison entre Wölfl et ses aînés s’avère plutôt cruelle pour ce dernier. L’Allegro de la Sonate opus 15 n° 1 alterne ainsi un thème bonhomme, presque pompier, avec des développements mélodiques rappelant certaines mélodies de l’enfant de Salzburg. Mais, derrière quelques discours convenus, Wölfl parvient également à développer des idées bien personnelles et livre à l’auditeur de véritables trouvailles. L’Allegro de la Sonate opus 6 n° 1 débute ainsi par des sonorités d’une belle profondeur, évoquant certains passages beethovéniens, alternant avec des phrasés davantage ancrés dans le classicisme dont Wölfl est évidemment issu, que ce soit dans la tournure générale ou dans la manière d’agrémenter ses phrases par quelque trille. Plusieurs passages sont emprunts d’une atmosphère dansante et guillerette, les rythmes pointés (troisième variation de Sonate opus 54 n° 1) succédant au caractère primesautier du Rondo Allegro de la Sonate opus 54 n° 2. A l’écoute des ces différentes œuvres pour pianoforte, on parvient sans peine à déceler quelques tendances du compositeur, outre celles que l’on vient de signaler: une main droite très libre tandis que la gauche fait seulement office de soutien à la mélodie (Rondo de la Sonate opus 33 n° 1), une véritable recherche de recueillement dans des motifs à la fois dépouillés (le très bel Allegro de la Sonate opus 28 n° 3) et mélancoliques (l’Andante cantabile de la Sonate opus 33 n° 3), l’amusement pris dans certains phrasés particulièrement entraînants (le Presto Rondo de la Sonate opus 6 n° 1)...


Face à ces diverses atmosphères, Laure Colladant livre une lecture variée comme il convient, oubliant toute chausse-trappe technique pour se concentrer sur la seule mélodie, pour un résultat extrêmement convaincant. L’instrument, un Filippo Molitor fabriqué à Naples et restauré par le maître d’art viennois Johannes Carda (dont Laure Colladant n’est autre que l’épouse), sonne bien même si certaines notes résonnent étrangement (la dernière note de l’Allegro con spirito de la Sonate opus 33 n° 1, ou celle de la sixième variation de la Sonate opus 54 n° 1) et si certains timbres font presque penser à une harpe. Il n’en demeure pas moins que l’instrument rend parfaitement justice aux couleurs (la noirceur de l’Allegro moderato de la Sonate opus 54 n° 2, en la mineur, par exemple) et aux intentions des partitions qu’il nous est ici donné d’entendre.


Le sixième disque de ce coffret offre une alliance a priori peu commune: trois Duos pour piano et harpe. Pourtant, plusieurs compositeurs de la période charnière entre les XVIIIe et XIXe siècles avaient déjà écrit de tels duos: citons par exemple les pièces de François Naderman (1781-1835), fils du célèbre facteur de harpe Jean Henri Naderman, de François Boieldieu (1765-1834) ou du Tchèque Jan Ladislav Dussek (1760-1812). Le Duo opus 37 est agréable à écouter, notamment un troisième mouvement bien espiègle où les deux instruments sont véritablement traités sur un pied d’égalité alors que l’on aurait pu craindre que le pianoforte ne tirât la couverture à lui. Le Duo opus 44 met également les deux protagonistes sur un même niveau, l’entente et même la connivence entre Laure Colladant et la harpiste Catherine Michel étant évidentes. L’Andante est d’une sublime délicatesse et met encore une fois parfaitement en valeur les deux musiciennes de cette pièce méconnue; il en va de même dans le Rondo, dansant et entraînant comme il sied à une musique que l’on devait jouer dans le cadre cossu de quelque salon noble ou bourgeois. Le dernier duo est également un modèle de cette musique de salon que servent si bien Laure Colladant et Catherine Michel.


Le septième et dernier disque du coffret offre cette fois-ci à l’auditeur trois Trios pour violon, violoncelle et pianoforte, type de formation à la fois plus commun et plus connu que dans le disque précédent. Accompagnée par Elisabeth Balmas (qui occupait déjà en 1996 le poste de premier violon solo de l’Orchestre philharmonique de Radio France) et par David Simpson (pilier des Arts florissants et membre du Quatuor Atlantis), Laure Colladant propose donc trois œuvres qui, avouons-le, présentent nettement moins d’intérêt que les autres disques de cette anthologie. Les mélodies sont assez peu recherchées (l’Allegro molto du Deuxième Trio, assez laborieux dans sa conception) et les conditions d’enregistrement (qui ne nous sont d’ailleurs aucunement précisées dans la notice que l’on aurait d’ailleurs aimé plus étoffée tant sur le compositeur que sur les pièces présentées) ne sont pas toujours flatteuses, livrant notamment un son de violoncelle assez peu agréable à l’oreille comme dans cet Allegro maestoso du Premier Trio.


Pour autant, en dépit de ce dernier disque assez décevant, on ne peut que saluer l’entreprise globalement réussie de Laure Colladant qui contribue à réhabiliter de manière décisive Joseph Wölfl dont la musique mérite plus qu’une oreille distraite.


Le site de Laure Colladant
Le site d’Elisabeth Balmas


Sébastien Gauthier

 

 

 

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