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01/16/2012
Robert Schumann : Papillons, opus 2 – Sonate pour piano n° 1, opus 11 – Kinderszenen, opus 15 – Phantasie, opus 17 – Waldszenen, opus 82 – Thema mit Variationen («Geistervariationen»), opus posthume

András Schiff (piano)
Enregistré au Reitstadl de Neumarkt (juin 2010) – 138’36
Double album ECM New Series 2122/23 – Notice de présentation en anglais et en allemand






Irremplaçable András Schiff. Le pianiste hongrois (né en 1953) livre un Schumann inclassable, remettant sur le métier des partitions qu’il fréquente depuis longtemps (lire, par exemple, ici), questionnant le texte sans jamais tomber dans l’incongru: une force tranquille mais lyrique, érudite mais intègre. On ouvre grands les yeux devant ces Papillons électrisés – aux ailes peut-être trop tranchantes – mais qui dessinent des courbes lumineuses et captivantes. On ne perd jamais le fil de la Première Sonate – dont ConcertoNet avait déjà salué l’éloquence en concert –, tant le jeu du pianiste témoigne d’une maîtrise supérieure du propos schumanien.


Si le discours est parfois empreint d’une certaine dureté, il recèle surtout une angoisse sourde. Et si la fluctuation des tempos et la conduite de la pulsation devraient dérouter par leur liberté, elles ne tournent jamais à la trahison de la partition – mais à la transfiguration d’un texte patiemment décrypté. Ainsi de Scènes d’enfants que l’on croit d’abord timides et que l’on comprend vite moins pudiques que gênées: vision nostalgique d’une enfance triste et solitaire. Version insolite – à l’image de Scènes de la forêt faussement sereines (tel ce «Chasseur aux aguets», inquiétant prédateur) mais un rien austères – bien qu’András Schiff se fasse évidemment moins bûcheron que sculpteur! Ainsi, de même, des ultimes Variations fantômes – hypnotisantes par leur pulsation haletante mais inexorable, d’une intimidante puissance de concentration, hantées par une folie sourde et impénétrable.


Ainsi, enfin, d’une Fantaisie évanescente, qui coule comme de l’eau de roche, dont la moindre note paraît scintiller avec légèreté et transparence. Son dernier mouvement est d’ailleurs joué deux fois, la seconde dans une nouvelle version du Lansgam getragen final issue d’un manuscrit corrigé par Schumann, que l’interprète a pu consulter – dès 1975 – à la bibliothèque Széchényi de Budapest et dont la coda recèle «une grande surprise» («A la suite d’un grand accelerando, Schumann aboutit à une plage d’accalmie sur un accord de septième diminuée (...) et, après une pause (point d’orgue) qui semble durer indéfiniment, il revient au thème de la fin du premier mouvement (...). Avec cette fin, Schumann parvenait à boucler son œuvre: le début et la fin se rencontraient, à la manière des Variations Goldberg de Bach ou de la Sonate opus 109 de Beethoven»).


Décidemment, après Alexander Lonquich dans des Kreisleriana névrosées et angoissantes, ECM sort des sentiers battus en proposant le Schumann d’András Schiff, qui emprunte un chemin bien singulier pour réunir Florestan et Eusebius au terme d’un voyage déroutant, exigeant, profondément stimulant.


Gilles d’Heyres

 

 

 

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