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01/06/2011
Joseph Haydn : Sonates n° 33, Hob.XVI.20 [1], n° 47, Hob.XVI.32 [3], n° 50, Hob.XVI.37 [4], n° 53, Hob.XVI.34 [3], n° 54, Hob.XVI.40 [4], n° 56, Hob.XVI.42 [3], n° 58, Hob.XVI.48 [2], n° 59, Hob.XVI.49 [1], n° 60, Hob.XVI.50, n° 61, Hob.XVI.51 [2], et n° 62, Hob.XVI.52 [4] – Fantaisie en ut majeur, Hob.XVII.4 – Adagio en fa majeur, Hob.XVII.9 [3] – Andante con variazioni, Hob.XVII.6 [4]

Alfred Brendel (piano)
Enregistré à Londres (septembre 1979 [1], juin 1982 [2], mars 1984 [3] et juillet 1985 [4]) – 202’10
Coffret de quatre disques Decca «The Originals» 478 1369 (distribué par Universal)






Joseph Haydn : Sonates n° 6, Hob.XVI.10, n° 13, Hob.XVI.6 [1], n° 31, Hob.XVI.46 [3], n° 38, Hob.XVI.23, n° 39, Hob.XVI.24 [2], n° 48, Hob.XVI.35, n° 50, Hob.XVI.37, n° 57, Hob.XVI.47 [3], n° 58, Hob.XVI.48 [2], n° 59, Hob.XVI.49 [1], n° 60, Hob.XVI.50 [2], et n° 62, Hob.XVI.52 [1]
Catherine Collard (piano)
Enregistré à Marseille (27 août et 31 octobre 1988 [1], 2-3 septembre 1990 [2] et 21-23 décembre 1992 [3]) – 179’18
Album de trois disques Lyrinx LYR 270 (distribué par Codaex)






Joseph Haydn : Sonates n° 53, Hob.XVI.34, n° 54, Hob.XVI.40, et n° 62, Hob.XVI.52 – Andante con variazioni, Hob.XVII.6
Anne Queffélec (piano)
Enregistré à Sion (30 septembre et 1er octobre 2001) – 63’32
Mirare MIR 104 (distribué par Harmonia mundi)






Joseph Haydn : Sonates n° 38, Hob.XVI.23, n° 53, Hob.XVI.34, n° 60, Hob.XVI.50, et n° 62, Hob.XVI.52 – Andante con variazioni, Hob.XVII.6
Zhu Xiao-Mei (piano)
Enregistré à Paris (juin 2008) – 70’02
Mirare MIR 076 (distribué par Harmonia mundi)





Un compositeur estimé davantage des musiciens que du public? Toujours est-il que le corpus pianistique de Haydn demeure mal servi au concert, où, dans le meilleur des cas, il est réduit, en début de récital, au statut d’échauffement ou de mise en bouche. Après une tonitruante «année Chopin» et une «année Schumann» plus en retrait, à l’orée d’une prometteuse «année Liszt», voici néanmoins quelques échos remarquables mais lointains de la bien discrète «année Haydn» que fut 2009, au travers de deux parutions récentes, confrontées à deux rééditions capitales.


Pour ce qui est des rééditions, les onze sonates (et trois autres pièces) gravées pour Philips entre 1979 et 1985 à Londres reprises dans la collection des «Originals» de Decca et accompagnées d’une notice très complète (en anglais, français et allemand) permettent de disposer de la quasi-totalité du legs haydnien d’Alfred Brendel, si l’on excepte le Concerto en ré enregistré voici un demi-siècle pour Vox et un récital mancunien paru il y a vingt ans chez Philips, comprenant la Trente-troisième sonate (1771), qui figure déjà dans le présent coffret, mais aussi la Trente-deuxième. De même, Lyrinx a regroupé en un seul album l’intégralité des témoignages laissés entre 1988 et 1992 par Catherine Collard (1947-1993): un disque de moins que Brendel, mais une sonate de plus, soit douze au total (dont seulement cinq en commun avec le pianiste autrichien) pour cette sobre réédition, assortie de quelques lignes de présentation de Roland de Candé et de quelques mots sur l’interprète (en français et en anglais).


Les nouveautés mettent en vedette deux musiciennes appartenant à la même génération que Catherine Collard. Zhu Xiao-Mei, célèbre pour son dévouement à Bach, n’en exprime pas moins, dans un entretien tenant lieu de notice (en français, anglais et allemand), un attachement ancien à Haydn: elle a sélectionné quatre sonates et l’admirable Andante à variations en fa mineur (1793), toutes œuvres qu’elle dit «liées à des souvenirs personnels très forts». Publié un an plus tard chez le même éditeur (Mirare), mais enregistré sept ans plus tôt, le programme d’Anne Queffélec, qui forma un temps un duo avec... Catherine Collard, est aux trois quarts identique à celui de Zhu Xiao-Mei et éclairé par une remarquable notice de Charles Johnston (en français, anglais et allemand), qui signait déjà en 2006 pour le même label le texte introductif du superbe récital haydnien d’Iddo Bar-Shai.


Face à ces quatre florilèges d’importance quantitativement inégale, les confrontations, tantôt à deux, tantôt à trois – et parfois même à quatre, dans la Soixante-deuxième (1794), l’une des trois dernières écrites par Haydn – se révèlent passionnantes, même si leur enseignement principal est une confirmation. Mais une confirmation éclatante: si les retrouvailles avec des références aussi consacrées que Brendel et Collard est parfois source de déception, rien de tel ici, bien au contraire, car chacun a fait sienne cette musique avec une diversité d’approche qui en illustre parfaitement la richesse, bien loin des clichés d’un «papa Haydn» bonhomme, gentillet et facile.


A tout seigneur, tout honneur, les qualificatifs se pressent et se bousculent pour qualifier le jeu de Brendel: éloquence, expression, humour, profondeur, sévérité au besoin, tout semble y être, grâce aussi à un clavier – magnifiquement enregistré – d’une richesse époustouflante. Aucune sonate ne se détache, ou, pour dire les choses plus positivement, aucune ne traduit de relative faiblesse, tant chacune paraît idéalement caractérisée par cette conciliation toujours réussie de minutie et de hauteur de vue. Si, à l’occasion, un furtif éclairage suggère quelques-uns de ses autres compositeurs de prédilection, ici Schubert – Soixante-et-unième (1795) –, là Beethoven – Soixantième (1795) –, voilà bien un Haydn qui ne trouve sa justification qu’en lui-même et qui possède sa propre personnalité.


Chez Catherine Collard, sans doute moins favorisée par la prise de son, il est aisé de reconnaître l’élève d’Yvonne Lefébure, Yvonne Loriod et Germaine Mounier dans un jeu typiquement «français», plus rapide, plus sec et plus économe. Mais on y trouve également plus de nervosité, de rebond, de persiflage, d’espièglerie, de rhétorique, de contrastes et de sens dramatique: une approche plus scarlattienne, plus lumineuse, moins romantique, en somme, que fait par exemple apparaître une édifiante comparaison avec son aîné dans la Cinquante-neuvième (1790) et qui réserve des moments d’intense jubilation, comme dans l’éblouissant Finale de la Trente-neuvième (1773). Tout en s’aventurant dans des œuvres «de jeunesse», comme les miniatures Sixième (1767) et Treizième (1766), la pianiste française pose davantage de questions – ou en laisse davantage suspendues, comme dans l’Andante con espressione de la Cinquante-huitième (1789). Difficile, il est vrai, de ne pas conserver à l’esprit les circonstances pénibles et émouvantes ayant présidé à l’enregistrement du dernier volet, quelques mois avant sa disparition prématurée, qui confèrent une résonnance particulière au Largo e sostenuto de la Cinquantième (1780), d’une bouleversante noblesse, et, plus encore, à l’Adagio de la Trente-et-unième (1770) – un des joyaux de cette série, qu’elle est pourtant la seule à avoir choisie –, interminablement étiré (près de 13 minutes). Fascinant, dans un tout autre style.


Face à de tels monuments, les deux parutions plus récentes sont loin de démériter, mais elles donnent du compositeur une vision plus respectueuse de son image traditionnelle. Zhu Xiao-Mei ne cherche pas midi à quatorze heures et défend un Haydn qui se «méfie de la métaphysique», franc, vigoureux, presque costaud et brutal, plus littéral, assez allant, y compris dans les mouvements lents – son Andante à variations ne se confond jamais avec un Adagio – mais aussi plus sage et sérieux. Dès lors, quand le parallèle est possible avec les deux références précédemment évoquées, il ne tourne pas à son avantage, comme dans la Cinquante-troisième (1778), chère à son cœur pour l’avoir étudiée en Chine dès l’âge de onze ans, mais où Brendel fait preuve d’une bien plus grande variété de ton, ou dans la Trente-huitième (1773), qui, sous les doigts de Collard, vit et pétille de tout autre manière. Techniquement irréprochable, Anne Queffélec n’est pas loin, quant à elle, de trouver un juste milieu entre Brendel et Collard, mais elle manque parfois de naturel, se perdant dans des effets trop recherchés, au risque d’en paraître décorative et affectée. La plus lente dans l’Andante à variations, elle peine cependant à tenir ce tempo, sans atteindre l’évidence de Brendel ou même la simplicité de Zhu.


Simon Corley

 

 

 

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