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03/09/2010
Michael Tippett : A Child of Our Time
Indra Thomas (soprano), Mihoko Fujimura (alto), Steve Davislim (ténor), Matthew Rose (basse), London Symphony Orchestra & Chorus, sir Colin Davis (direction)
Enregistré en public à Londres (16 et 18 décembre 2007) – 65’59
LSO Live SACD LSO0670 – Présentation trilingue, texte en anglais





En 1938, un étudiant juif polonais assassine à Paris un diplomate allemand, déclenchant la sinistre Nuit de cristal. Bouleversé, le pacifiste Michael Tippett compose, à trente-trois ans, A Child of Our Time, où il recueille l’héritage de la tradition chorale anglaise, issue elle-même de Haendel et de Bach, qu’il revisite par le recours au negro spiritual, témoignage d’une autre persécution – les negro spirituals ont fait ensuite l’objet d’une édition séparée, sans l’accompagnement d’orchestre. Une heure de musique où la tension ne s’émousse pas, malgré le découpage en récitatifs, airs et ensemble selon la pratique baroque, où l’on croise les figures de l’étudiant, de sa mère restée en Allemagne, de sa tante et de son oncle, qui échouent à empêcher son geste désespéré. L’occasion, pour le compositeur, de mettre en garde contre la violence et de délivrer un message d’espoir : l’œuvre s’ouvre sur l’arrivée de l’hiver et s’achève sur l’annonce du printemps, l’un étant issu de l’autre, puisque « le froid de l’hiver signifie la chaleur intérieure ». Après avoir sollicité T.S. Eliot, Tippett écrivit lui-même le texte de son œuvre, tirant le titre de l’oratorio d’Ein Kind unserer Zeit, un roman d’Ödön von Horváth, un autre exilé qui fuit le nazisme un peu partout en Europe et dont on brûla les livres « dégénérés » en Allemagne.


Présenté dans la collection « LSO Live », le présent CD est l’écho de concerts donnés en décembre 2007 au Barbican Center. Nul, sans doute, n’était mieux qualifié que sir Colin Davis, créateur de plusieurs œuvres de Tippett, pour rendre justice à ce A Child of Our Time créé en 1944. L’oratorio baigne dans une atmosphère tendue, sombre, parfois violente, sans que la puissance nuise à la clarté de la texture ou à l’âpreté des rythmes – les chœurs des persécuteurs et des persécutés, dans la deuxième partie, impressionnent beaucoup. Récemment entendue dans le War Requiem de Britten à Pleyel, Indra Thomas séduit par les reflets fauves d’une voix dont le vibrato se fait envahissant à la fin, inférieure à la Jessye Norman poignante, à l’aigu glorieux, de l’enregistrement de 1975, dirigée par le même Davis. C’est là que le bât blesse : le chef britannique ne s’égale pas lui-même, plus dramatique, plus contrasté avec les forces de la BBC – il existe aussi une version captée à Dresde. Janet Baker était aussi plus habitée qu’une Mihoko Fujimura distanciée dans l’émotion, Richard Cassilly était plus puissant, plus théâtral que Steve Davislim et Matthew Rose, malgré sa noirceur et son mordant, n’égale pas John Shirley-Quirk, dont le Récitant angoissé creusait davantage le texte.


On ne niera pas les très grandes qualités de ce nouveau Child of Our Time, mais il confirme, s’il en était besoin, les risques que l’on court à remettre un ouvrage sur le métier quand on a déjà donné le meilleur de soi-même.


Didier van Moere

 

 

 

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