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11/16/2009
Stefano Gervasoni : Least Bee – An, quasi una serenata con la complicitá di Schubert – Animato – Antiterra – Epicadenza – Godspell

Barbara Zanichelli (soprano), Silvana Torto (mezzo-soprano), François Volpe (percussion), Luigi Gaggero (cymbalum), Ensemble Mdi, Yoichi Sugiyama (direction)
Enregistré à Castrezzato (23-26 août 2007) – 76’04
æon AECD 0866 (distribué par Harmonia mundi) – Notice de présentation en français, anglais et allemand






La musique de Stefano Gervasoni, transparente et poétique, frôle à l’occasion la frontière du silence. Professeur depuis 2006 au C.N.S.M.D. de Paris, actif en Italie, en France et en Allemagne, le compositeur italien (né en 1962) est le créateur d’un univers fertile d’une expressivité intimiste tout à fait personnelle. La sélection, pour ce deuxième disque monographique, offre un excellent aperçu de sa production : les œuvres vont de 1989 à 2004, les effectifs de cinq instruments à un ensemble de douze, deux œuvres font appel à la voix et Epicadenza sollicite deux instrumentistes soliste et contre-soliste. Une collaboration étroite avec l’Ensemble Mdi de Milan apporte la touche italienne.


Pour les deux cycles de mélodies, Least Bee et Godspell, Gervasoni a recours à deux poètes américains, l’une d’un minimalisme puissamment symboliste, l’autre, à l’humour oblique, dessinateur d’un quotidien décalé au bord du surréel. Les traits impressionnistes des cinq poèmes d’Emily Dickinson correspondent bien au style fragmenté du compositeur – style fragmenté mais au constant élan. Au-delà des traits, musicien et poète créent une même profondeur de champ, cohérente, expressive et porteuse d’émotion. Les mots palpitent et vivent dans la lumière de la voix de Barbara Zanichelli, blanche, diaphane, tout à coup aux couleurs prismatiques ou aux effets travaillés de large vibrato composé. Pour le deuxième cycle, inspiré de quatre poèmes de Philip Levine, l’imagination musicale du compositeur fait appel à une voix intimiste, fragile et sensible pour créer une émotion poétique, légère comme le souffle du vent dans les frênes que tantôt elle incarne, lunaire comme Pierrot à son plus doux, soudain à son plus cruel, puis, changeant d’humeur, d’un trait de piano cet esprit créatif entraîne par touches éclatées vers une vision esquissée du monde syncopé du jazz. La mezzo-soprano Silvana Torto s’y prête à merveille, la présence de sa voix projetant au-delà des mélodies une chimère, un être vif-argent, gracile et touchant.


Par le préfixe de leur titre et par un effectif croissant, Stefano Gervasoni relie en cycle trois œuvres pour ensemble écrites entre 1989 et 1999, An, Animato et Antiterra, aux traits brisés mais à chaque fois plus longs. An va d’une consonance schubertienne à un pointillisme gervasonien, et cette fois ce sont les références au complice Schubert qui le plus se fragmentent. De part et d’autre, les motifs sont perpétuellement en devenir interrompu, magiquement resserrés dans un mystérieux élan. Comme son titre l’indique, Animato, instable, s’anime d’une vie secrète et intense aux éveils intempestifs, courses, trépignements et accalmies imposées, chaque son innovateur et expressif, coloré de modes de jeu inventifs et efficaces. Antiterra, aux mêmes caractéristiques mais aux envolées plus longues, exige néanmoins des interprètes la même conscience de l’autre. Effectivement, chaque œuvre puise sa cohérence dans un collectif interprétatif qui relie dans un même élan à travers intervalles et silences les gestes instrumentaux fragmentaires et les rythmes suspendus de l’écriture gervasonienne. Les musiciens de l’Ensemble Mdi maîtrisent ce ressenti partagé, mus comme un seul être protéiforme.


L’œuvre la plus récente et la plus longue de la sélection, s’intitule opportunément Epicadenza, remarquable par son effectif à la limite de l’étrange et par son climat d’esprit asiatique, proche de celui d’un Takemitsu. Pour percussion, deux trios (vents, cordes) et cymbalum, les sonorités mêmes rappellent celles de l’Orient – les sons impurs ou voilés du shakuhachi ou du biwa, le moelleux sec du shaku ou de l’ikko, les tintements lancinants du rin. L’impression se précise encore dans la douceur prolongée d’appels lointains, dans les étiolements insaisissables, les silences dynamiques et le cycle expressif de leur renaissance structurelle. Pris dans un ensemble original à haute densité poétique, les timbres richement composés (la flûte doublée par le cor, la complexité acide du cymbalum, l’ombre du son le plus cristallin...), le souffle, les rugosités, les envols colorés et les consonances les plus pures soulignent la fertilité et le raffinement d’une imagination sonore qui tend vers la lumière le sombre éclat d’une attente existentielle.


La sélection ici est tout à fait représentative du monde sonore de Stefano Gervasoni – on y trouve tous les extrêmes et toutes les délicatesses, la beauté du son apuré, l’inventivité des amalgames sonores, le mouvement comme le statisme, l’intériorité comme les traits les plus extravertis. Ce monde de contrastes trouve sa logique infaillible dans la clarté unique d’un esprit philosophique, quêteur et sensible. La révélation en est due à la finesse de la prise de son et dapprima à l’excellence des interprètes et à leur collaboration convaincue sous la direction inspirée de Yoichi Sugiyama.


Le site de Stefano Gervasoni
Le site de l’Ensemble Mdi


Christine Labroche

 

 

 

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