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Rentrée élyséenne

Paris
Théâtre des Champs-Elysées
09/11/2008 -  et 8 septembre 2008 (Rimini)
Richard Strauss : Don Juan, opus 20
Ludwig van Beethoven : Concerto pour piano n° 3, opus 37
Johannes Brahms : Symphonie n° 4, opus 98

Rudolf Buchbinder (piano)
Sächsische Staatskapelle Dresden, Fabio Luisi (direction)



Fabio Luisi (© DR)


Comme en 2007 (voir ici), Fabio Luisi et l’orchestre de la Staatskapelle de Dresde ont mis Strauss et Beethoven à l’honneur, lors d’une mini-tournée européenne où la dernière symphonie de Brahms est donnée en plat de résistance, le programme de tournée faisant par ailleurs alterner les Troisième et Quatrième concertos de Beethoven (alors que le Premier concerto sera interprété, par la même équipe, lors d’une tournée américaine en novembre). Au risque de répéter des poncifs que l’on craint, en réalité, de voir un jour contredits, on prendra le temps de louer le son unique et miraculeux, charnu et incroyablement ample, des pupitres de cordes de la Staatskapelle, orchestre «en résidence» au Théâtre des Champs-Elysées (mais qui n’y reviendra malheureusement qu’une fois, le 12 juin avec Daniel Harding dans Schumann).


Ces qualités s’expriment d’emblée dans un splendide Don Juan (1889) de Richard Strauss, à la fois tranchant et souple. S’il peut parfois manquer de rondeur, le trait épais de l’orchestre sait ménager de fascinants dialogues (entre les cordes et la flûte notamment) et une tension permanente. De toute évidence, cette interprétation authentiquement straussienne repose sur une construction d’une grande clarté, où le chef principal de la Staatskapelle fait preuve d’une réelle maîtrise des masses sonores.


Le Troisième concerto pour piano (1803) de Beethoven est moins conquérant. On y admire la technique résolument beethovénienne de Rudolf Buchbinder, sa frappe si sûre, le délié impeccable de ses doigts, ses trilles superlatifs ainsi que, souvent, sa fougue et son panache (… style que le pianiste saura d’ailleurs superbement adapter aux improvisations sur des thèmes de Johann Strauss, données en bis). Pourtant, l’Allegro con brio est abordé dans un tempo presque laborieux, qui manque singulièrement de nerf, les instrumentistes apparaissant, du reste, moins irréprochables que dans Strauss. Le discours pianistique suscite des impressions divergentes : impressionnant davantage par la précision rythmique et la sûreté de la frappe que par la profondeur du message musical (souvent asséché), l’issue de la cadence offre à l’inverse un moment très émouvant de concentration et de dialogue entre les musiciens. Moins touchant parce que trop parfaitement construit, le Largo regarde vers le XVIIIe siècle plutôt que vers l’avenir. Si le Rondo: Allegro conclusif témoigne d’une meilleure adéquation de style entre le soliste et l’orchestre – ainsi que d’un certain humour parfois –, on ressort plus intéressé que conquis par ce Beethoven objectif et monolithique.


A peine entachée par quelques approximations (les cuivres notamment) au sein d’un orchestre néanmoins remarquable, la Quatrième symphonie (1885) de Brahms concluant le concert met en évidence la direction très narrative et le sens de l’architecture de Fabio Luisi. Fruit d’un patient travail de mise en place, l’interprétation de l’œuvre paraît monter progressivement en puissance. À un Allegro non troppo un peu alangui, trop séquencé et marqué par le prosaïsme de certains échanges, succède un Andante moderato dont ressort la belle homogénéité des cordes (jusque dans des pizzicati qui savent se faire à la fois touchants et sobres). Enchaînés l’un à l’autre, les deux derniers mouvements convainquent infiniment plus, parce le chef allume enfin le feu brahmsien dans un Allegro giocoso exaltant la maestria instrumentale de l’orchestre, ponctuée d’attaques d’une grande vivacité. Quant à l’Allegro energico e passionato - Più allegro, il est pris à bras-le-corps par un Fabio Luisi possédé et véhément, osant des tempos extrêmes pour mieux laisser chanter, dans l’immobilité des cordes, la douleur d’une flûte ou, au contraire, faire exploser le thème final, mené à un train d’enfer par des cordes superlatives. Malgré des rappels chaleureux, la Staatskapelle n’octroie aucun bis.


Après la salle Pleyel (voir ici), le Théâtre des Champs-Elysées a donc réussi à lancer sur les meilleures bases sa saison 2008-2009, une saison au cours de laquelle les deux salles parisiennes rivaliseront de prestige, l’avenue Montaigne affichant une ribambelle de chefs (Christie, Davis, Gatti, Gergiev, Harding, Jansons, Paavo Järvi, Jurowski, Masur, Mehta, Minkowski, Muti, Ozawa, Rattle, Salonen, Saraste, Temirkanov, Thielemann), chanteurs (Alagna, Antonacci, Bostridge, DiDonato, Fleming, Florez, Hampson, Jaroussky, Kaufmann, Keenlyside, Kirchschlager, Lafont, Mattila, Naouri, Petibon, Quasthoff, Scholl, Terfel, Villazón, von Otter), pianistes (Aimard, Anderszewski, Angelich, Berezovsky, Grimaud, Kissin, Kovacevich, Lugansky, Luisada, Moravec, Muraro, Paik, Pires, Ranki, Rudy, Say, Sokolov, Tharaud, Volodos, Zacharias) et autres solistes (Ax, Capuçon, Fischer, Khachatryan, Kremer, Mullova, Mutter, Pahud, Repin) pour le moins distingués.


Environ deux cents représentations se succéderont, dont un certain nombre devraient créer l’événement – à commencer par un Rosenkavalier de luxe (Thielemann/Munich… avec rien moins que Renée Fleming, Sophie Koch, Diana Damrau, Franz Hawlata, Franz Grundheber et même Jane Henschel), une Armide de Lully menée par une équipe dont on attendra beaucoup (emmenée par William Christie et Les Arts Florissants, dans un spectacle signé Carsen/Gallotta, avec une distribution idéale sur le papier) ou encore le rare Béatrice et Bénédict de Berlioz par le National et l’archi-spécialiste Colin Davis. La programmation du Théâtre des Champs-Elysées continuera donc de faire la part belle à l’opéra et à l’oratorio (notamment baroques), sans négliger la musique symphonique, réussissant la gageure de ne programmer – une fois n’est pas coutume – aucune symphonie de Mahler (… dont seuls sont à l’affiche en octobre les Wunderhorn Lieder et Lieder eines fahrenden Gesellen par Thomas Hampson avec l’Orchestre du Festival de Verbier, ces derniers étant à comparer avec ceux qu’ils chantera à Pleyel avec l’Orchestre de Paris en mars). De même, on ne manquera pas de mettre en regard le cycle Prokofiev de Temirkanov (Saint-Pétersbourg) avec celui de Gergiev (LSO) salle Pleyel.


S’il faudra attendre février pour goûter à la traditionnelle et prestigieuse résidence de l’Orchestre philharmonique de Vienne, les deux formations-piliers des Champs-Elysées occuperont largement les soirées du jeudi (rentrée de l’Orchestre national de France le 18 septembre avec Daniele Gatti, son nouveau directeur musical) et du mardi (rentrée de l’Ensemble orchestral de Paris le 16 septembre, avec un hommage au regretté Armin Jordan)… sans oublier les quatre après-midis du dimanche laissées à l’Orchestre Lamoureux. Les orchestres étrangers devraient également capter l’attention du mélomane parisien (Philharmonia et Philharmonique de Londres, Radio Bavaroise et Philharmonique de Munich…), de même que certains récitants de luxe : Gérard Depardieu dans Lélio (Muti/National), Isabelle Huppert dans Le Martyre de Saint Sébastien (Gatti/National) ou Denis Podalydès qui lira des extraits d’Etre sans destin d’Imre Kertész lors d’une représentation animée par Pierre-Laurent Aimard dans le cadre de l’année Messiaen.


Le site du Théâtre des Champs-Elysées
Le site de l’Orchestre de la Staatskapelle de Dresde
Le site de Fabio Luisi
Le site de Rudolf Buchbinder



Gilles d’Heyres

 

 

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