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Le ballet triomphe: annonçons sa victoire!

Paris
Théâtre du Châtelet
06/12/2005 -  et les 13 et 15 juin 2005.
György Ligeti : Essais
Jean-Philippe Rameau : Pigmalion

Cyril Auvity (Pigmalion), Valérie Gabail (Céphise), Cassandre Berthon (Cassandre Berthon), Magali Léger (l’Amour)
David Salle & Clifton Taylor (décors), Peter Speliopoulos (costumes), Clifton Taylor (lumières), Karole Armitage (chorégraphie et mise en scène)
Ballet de Lorraine
Orchestre et Choeur du Concert Spirituel
Hervé Niquet (direction)

Dans le cadre du festival des Régions, le théâtre du Châtelet accueille un spectacle composé d’un ballet sur les Essais de Ligeti et de Pigmalion de Jean-Philippe Rameau créé à Nancy au cours de la saison 2004-2005. La confrontation entre musique contemporaine et musique baroque est assez surprenante mais Karole Armitage, metteur en scène et chorégraphe, lie les deux oeuvres avec beaucoup d’habileté. Esthétiquement le résultat est magnifique qui compense une petite déception au niveau des voix.



Le rideau se lève sur les Essais de Ligeti sous forme de chorégraphie. La musique n’est pas “en direct” puisqu’elle est enregistrée mais il est agréable de retrouver les voix de Katalin Karolyi, de Christiane Oelze ou de Malena Ernman ainsi que le piano de Pierre-Laurent Aimard. Karole Armitage crée un ballet simple et qui épouse complètement la musique du compositeur: les danseurs expliquent la partition, la vivent et tentent de donner une lecture superposée à celle des voix et des musiciens. Il s’agit d’une série de petites saynètes qui racontent chacune une histoire, un moment de la vie et des chanteurs différents participent à un passage précis pour se retrouver à la fin avec des torches dans une danse nocturne et sombre. Les décors sont blancs, très simples également et très bien choisis avec les costumes car tout l’ensemble joue sur le blanc et le noir: les danseurs portent des caleçons noirs et un haut gris-blanc. Les gestes chorégraphiques ne sont pas violents mais expressifs, ils sont assez lents et ressemblent à des caresses. Une expérience très intéressante, - et surtout très belle - qui permettra peut-être de découvrir la musique contemporaine sous un autre angle.


Pigmalion est un modèle d’élégance, de douceur et de pureté. Les costumes sont somptueux par leur sobriété. Céphise porte une robe stricte dans une couleur assez sombre, ce qui cadre bien avec le personnage puisqu’elle se présente comme une sorte de furie amoureuse de Pigmalion. L’Amour, aérien et léger, porte une robe évaporée dans le bleu clair tandis que Pigmalion revêt le costume traditionnel de sculpteur, très ample et également dans les bleus. Mais le costume le plus réussi et le plus intelligent est sans conteste celui de la Statue: toute la robe est couleur crème mais à partir de la taille, le tissu est froissé, tordu et se confond avec le socle sur lequel la statue est posée. L’illusion est parfaitement rendue et on a véritablement l’impression de découvrir une statue non terminée. On est bien loin des productions, certes magnifiques mais un peu kitsch tout de même, de Philippe Lenaël présentées à Versailles dans les années 80. Les chanteurs sont secondés par des danseurs qui commentent l’action: quand Céphise vient crier sa colère, des danseurs la tirent dans tous les sens. Cette mise en scène est très physique et repose sur des gestes gracieux des chanteurs qui, il faut le reconnaître, déploient des dons insoupçonnés de souplesse et d’élégance: Magali Léger, certes ancienne danseuse, décoche des flèches aux personnages avec grande grâce.
Les voix sont un peu décevantes mais c’est peut-être dû à un système de sonorisation: elles ont beaucoup trop de puissance pour le théâtre et en même temps se perdent. Cyril Auvity brosse le portrait d’un Pigmalion doux, amoureux et élégant et il se joue assez facilement des difficultés de la partition. Dans l’air si périlleux “Règne Amour”, il exécute toutes les vocalises avec une facilité confondante, sans omettre une note. La voix du chanteur a beaucoup évolué ces derniers temps et elle a une puissance que l’on ne lui connaissait pas encore. Il est maintenant prêt à aborder des rôles plus lourds, davantage dans le répertoire de ténor que dans celui de haute-contre.
Valérie Gabail apporte une voix beaucoup plus corsée et charnue que d’habitude avec un joli phrasé et surtout un engagement sans faille: elle rage devant Pigmalion, elle se bat pour son amour…
Magali Léger est toujours excellente, virtuose dans l’âme mais elle parvient à donner une vie aux vocalises. Sa voix est agile, riche en couleurs et elle campe un Amour plein de malice surtout lorsqu’elle essaie de rapprocher les deux amoureux.
Cassandre Berthon met sa jolie voix au service de ce joli personnage de la statue et c’est très agréable à écouter. Malheureusement les aigus sont un peu courts et la prononciation n’est pas très soignée.

La direction d’Hervé Niquet est vive, énergique et très inspirée. Son interprétation a beaucoup évolué par rapport à son enregistrement et il met bien plus d’enthousiasme et d’intensité dramatique. Pendant près d’une heure, il mène ses chanteurs et son orchestre à une cadence vive, carrée mais musicale. Les musiciens sont excellents et racontent une histoire avec les contrebasses qui accentuent quelques notes, etc…



Le pari de Karole Armitage est amplement réussi et elle parvient à mettre en scène un opéra baroque avec intelligence et inspiration alors que cette oeuvre est soumise à un certain nombre de règles très strictes du XVIIème siècle. Un superbe spectacle qui bénéficie d’un accueil très favorable du public amplement mérité. Puisse ce genre d’expérience se renouveler avec autant de talent!



A noter:
- En 1993, Hervé Niquet a enregistré un magnifique Pigmalion, avec, dans les rôles principaux, Jean-Paul Fouchécourt et Sandrine Piau, chez Virgin.
- A l’occasion des commémorations de Charpentier à l’automne dernier à Versailles, Hervé Niquet a monté une Médée en version semi-concertante dont l’enregistrement vient de paraître en DVD.


Manon Ardouin

 

 

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