About us / Contact

The Classical Music Network

Prades

Europe : Paris, Londn, Zurich, Geneva, Strasbourg, Bruxelles, Gent
America : New York, San Francisco, Montreal                       WORLD


Newsletter
Your email :

 

Back

Deux sextuors atypiques et un illustre quintette

Prades
Abbaye Saint-Michel de Cuxà
08/09/2003 -  

Josef Haydn/Johann Peter Salomon : Symphonie n° 94 «La Surprise» (*)
Wolfgang Amadeus Mozart : Quintette avec clarinette, K. 581 (+)
Krzystof Penderecki : Sextuor pour clarinette, cor, violon, alto, violoncelle et piano (#)


Jacques Zoon (*) (flûte), Michel Lethiec (+ #) (clarinette), André Cazalet (#) (cor), Erika Raum (#) (violon), Bruno Pasquier (#) (alto), Arto Noras (#) (violoncelle), Denis Weber (*), Christian Ivaldi (#) (piano), Quatuor Artis (* +).


Pour cette soirée à l’abbaye Saint-Michel de Cuxà, deux sextuors faisant appel à des formations assez peu pratiquées encadraient l’un des plus illustres quintettes du répertoire.


Notre époque ayant (re)découvert les délices des transcriptions et autres arrangements, la version pour flûte, quatuor à cordes et piano de la Quatre-vingt-quatorzième symphonie («La Surprise») de Haydn (1791) s’annonçait passionnante, d’autant qu’elle était le fait de Johann Peter Salomon, l’impresario londonien par l’intermédiaire duquel le compositeur écrivit notamment ses douze dernières symphonies. Or, dans son adaptation, Salomon, qui était par ailleurs un excellent violoniste, privilégie excessivement son instrument: non seulement le piano se borne à un discret accompagnement, mais surtout la flûte doit se contenter soit de doubler le premier violon, soit de jouer des voix secondaires d’un intérêt inégal (dont une phrase qui rappelle fâcheusement, à la fin du Menuet, La donna e mobile...).


Dans ces conditions, plutôt que d’exhumer cette relative rareté, on aura raté une occasion de mieux mettre en valeur Jacques Zoon (du solo au quatuor, la matière ne manque pourtant pas, de Jolivet à Mozart, en passant par Poulenc ou Debussy) ou le Quatuor Artis (dans un quatuor... de Haydn, par exemple), sans parler de Denis Weber, réduit à un bien piètre rôle. Ceci étant, avec vaillance et complicité, les musiciens, se cantonnant fort raisonnablement à une dimension chambriste et sans jamais tenter d’imiter vainement l’orchestre, s’inscrivent ainsi dans l’esprit du travail effectué par Salomon, qui prive sciemment Haydn de ses questionnements et de sa portée novatrice, pour transformer sa symphonie en une aimable sérénade livrée à de talentueux amateurs.


Toujours debout (à l’exception, bien entendu, du violoncelle), les membres du Quatuor Artis sont rejoints par Michel Lethiec pour un Quintette de Mozart (1790) remarquablement équilibré, tout à la fois allant et en demi-teintes, servi par un clarinettiste d’une exceptionnelle subtilité, tant par sa technique que par sa manière de se fondre dans un ensemble avec ses quatre partenaires. Interprétation qui, dans son essence même, rend donc justice au caractère éminemment maçonnique de l’œuvre, qui atteint une sorte de fraternité paisible et sereine – l’intensité spirituelle du Larghetto restera sans doute comme l’un des très grands moments de ce Festival – et qui aborde de façon nuancée les rares zones d’ombre plutôt que de les souligner ou de les dramatiser.


Krzystof Penderecki a lui aussi composé un Quintette avec clarinette (1993), mais c’est avec son Sextuor (2000) que le concert se concluait, célébrant ainsi avec plus de trois mois d’avance son soixante-dixième anniversaire. A trois de ceux qui l’ont déjà enregistré voici deux ans pour Naxos (Michel Lethiec, Bruno Pasquier et Arto Noras) se joignent André Cazalet, Erika Raum et Christian Ivaldi. Composé de deux mouvements d’une durée inégale (respectivement dix et vingt minutes), ce Sextuor, par sa grande maîtrise d’écriture, résout indéniablement le problème posé par une formation aussi spécifique.


Esthétiquement, en revanche, les avis seront sans doute plus partagés: à l’image du Second concerto pour violon (1995), le premier mouvement naît d’une même note répétée, presque comme un glas, pour traverser, de façon rhapsodique et non sans évoquer Chostakovitch, des atmosphères successivement sombre, sarcastique, violente ou plaintive. Le second mouvement, qui relègue le cor au fond de la scène durant une dizaine de minutes, paraît hanté par les fantômes du passé... et de quelques grands anciens: Bartok, Mahler et peut-être même tout le romantisme allemand, au travers de deux de ses plus illustres représentants, la clarinette et le cor. Une partie du public salue les interprètes et le compositeur par une standing ovation.



Simon Corley

 

 

Copyright ©ConcertoNet.com