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Jeunes talents et formations originales

Prades
Eglise de Codalet et Abbaye Saint-Michel de Cuxà
08/04/2003 -  

Eglise de Codalet, 18 heures
Johann Sebastian Bach/Ferruccio Busoni : Chaconne en ré mineur
Frédéric Chopin : Nocturnes, opus 9 – Polonaise «Héroïque», opus 53
Manuel de Falla/Pavel Kochanski : Suite populaire espagnole
Piotr Ilyich Tchaïkovski : Souvenir d’un lieu cher, opus 42 – Valse 1877, opus 34
Felix Mendelssohn : Deux duos, opus 63
Hugo Wolf : Ganymed (*)
Robert Schumann : Trois duos
Henri Duparc : Phidylé (**)
Ernest Chausson : Deux duos, opus 11
Gabriel Fauré : Tarentelle

Geneviève Laurenceau (violon), Blandine Arnould* (soprano), Blandine Staskiewicz** (mezzo), Vahan Mardirossian (piano)


Abbaye Saint-Michel de Cuxà, 21 heures
Luigi Cherubini : Quintette à cordes
Francis Poulenc : Sextuor
Ernest Chausson : Concert, opus 21

Hagai Shaham, Olivier Charlier (violon), Bruno Pasquier (alto), Arto Noras, Raphael Wallfisch (violoncelle) [Cherubini], Jacques Zoon (flûte), François Leleux (hautbois), José Luis Estellés (clarinette), André Cazalet (cor), Milan Turkovic (basson), Christian Ivaldi (piano) [Poulenc], Gérard Poulet (violon), Jean-Claude Vanden-Eynden (piano), Quatuor Artis [Chausson]


La cinquante-deuxième édition du Festival Pablo Casals coïncide avec le trentième anniversaire de la disparition du violoncelliste, chef d’orchestre et compositeur catalan. Sous la direction artistique du clarinettiste Michel Lethiec, le festival propose, du 26 juillet au 13 août, vingt-neuf concerts qui, comme de coutume, réunissent dans des programmes essentiellement dédiés à la musique de chambre une prestigieuse escouade de musiciens venus pour le seul plaisir de jouer ensemble dans les lieux enchanteurs que l’art roman a laissés autour de Prades, à commencer par l’Abbaye Saint-Michel de Cuxà.


1. Jeunes talents à Codalet


Heureuse innovation de l’édition 2003, les communes voisines sont associées à l’événement et accueillent chacune à son tour le concert de dix-huit heures. Dans la petite église de Codalet, à la pimpante décoration baroque et rythmant les quarts d’heure de sa petite cloche aigrelette, quatre «révélations classiques» de l’ADAMI bénéficient d’une tribune dans le cadre prestigieux du festival et d’un public nombreux et enthousiaste venu entendre ce que l’on n’ose même plus qualifier d’échantillon de leur talent, puisque ce marathon durera près de deux heures et permettra tout juste aux spectateurs de rejoindre le concert suivant.


Vahan Mardirossian (vingt-huit ans) n’est plus, à proprement parler, une «révélation», celle-ci s’étant déjà opérée, voici quelques années, lors de la parution très remarquée d’un premier disque consacré à Schubert (Intrada). Il donne une lecture époustouflante de liberté et de virtuosité de la redoutable Chaconne de Bach transcrite par Busoni, frappant par sa capacité à suggérer une variété de climats successifs, depuis l’austère méditation jusqu’au romantisme le plus échevelé. L’acoustique est plus favorable au caractère intime des trois Nocturnes de l’opus 9 de Chopin: ni maniéré, ni alangui, mais à la fois souple et contrôlé, Mardirossian y fait preuve à la fois d’élégance et de sens dramatique, la main droite sachant se faire tantôt chantante, tantôt impérieuse. La Polonaise «Héroïque» qui met fin à ce mini-récital est toute de chic, de panache et de vaillance, avant que le pianiste ne se transforme en accompagnateur de luxe pour les trois autres jeunes artistes.


Geneviève Laurenceau (vingt-six ans) commence avec la Suite populaire espagnole, arrangement par le violoniste Pavel Kochanski (1887-1934) de six des Sept chansons populaires espagnoles (1915) de Falla, avec style, sans excès d’espagnolades, et même une expression remarquablement dépouillée dans Nana et Asturiana. Rarement données dans leur intégralité, les trois pièces constituant Souvenir d’un lieu cher (1878) de Tchaïkovski, dédiées à sa protectrice, Madame von Meck, ne seront pas davantage l’occasion du déballage de sucreries auxquelles elles pourraient si facilement se prêter: se déployant davantage que dans les miniatures de Falla, le jeu de la violoniste française parvient à conjuguer bon goût et fidélité à l’esprit du texte, tandis que la délicieuse et pétillante Valse 1877 lui permet également de mettre en valeur ses ressources techniques.


Enfin, c’est le chant qui est à l’honneur, avec la soprano Blandine Arnould (vingt-quatre ans), claire et radieuse, usant parcimonieusement du vibrato, dans Ganymed de Wolf, et la mezzo Blandine Staskiewicz, dont la voix homogène sur l’ensemble de la tessiture, aux aigus parfaitement maîtrisés, et au timbre sans doute plus mûr que celui de sa camarade, offre une vision altière de Phidylé de Duparc. Ces deux mélodies s’inscrivaient dans un fort beau bouquet de lieder et duos allemands (Mendelssohn, Schumann, Wolf) puis français (Duparc, Chausson, Fauré – les deux premiers n’étant d’ailleurs pas insensibles aux sirènes wagnériennes), dont l’inspiration était résolument nocturne et estivale, depuis deux duos de Mendelssohn évoquant l’un Le Songe d’une nuit d’été, l’autre une barcarolle, jusqu’à la brillante Tarentelle conclusive de Fauré.


2. Formations originales à Saint-Michel de Cuxà


Le concert du soir faisait se succéder trois différentes séries de musiciens dans trois œuvres écrites pour des formations assez peu pratiquées: le quintette à deux violoncelles, le sextuor pour instruments à vent et piano, le quatuor avec violon et piano.


Les quatuors de Cherubini ont parfois la faveur du concert ou du disque, mais pourquoi son Quintette (1837), qui leur est postérieur, n’est-il pas plus souvent interprété? En effet, ne s’autorisant que quelques rares concessions au goût de l’époque et malgré le recours à des procédés quelque peu répétitifs, le compositeur italien réserve des surprises de tous ordres: l’envergure (trente-cinq minutes), une belle partie dévolue au premier violoncelle, le choix de la tonalité (mi mineur), un geste initial quasi mahlérien (début de la Deuxième symphonie), les silences, les brusques changements d’atmosphère et parfois même les thèmes, les modulations, le contrepoint ou la dimension symphonique font que l’on est proche de l’univers de Beethoven, de Mendelssohn et, surtout, de Schubert. Il est vrai qu’il est servi avec enthousiasme et finesse par un bel ensemble de musiciens complices (Hagai Shaham, Olivier Charlier, Bruno Pasquier, Arto Noras et Raphael Wallfisch).


Avec la fine fleur (Jacques Zoon, François Leleux, José Luis Estellés, André Cazalet, Milan Turkovic) des meilleurs orchestres (Boston, Munich, Paris, ...) et l’irréprochable Christian Ivaldi, le Sextuor de Poulenc est un véritable feu d’artifice de précision, de sonorités de rêve. C’est merveille que de voir ces fortes individualités s’amuser ensemble pour souligner le côté ludique, stravinskien et lyrique de la partition.


De même, dans le Concert de Chausson, personne n’aura eu la tentation de tirer la couverture à lui: ni le chaleureux Quatuor Artis, ni le probe Jean-Claude Vanden-Eynden, ni surtout Gérard Poulet, au son tout de pudeur et de pureté, au jeu noble, aux phrasés d’une musicalité jamais prise en défaut, qui siéent tout particulièrement à cette œuvre. D’une exceptionnelle hauteur de vues, cette approche intense, tendue jusqu’à la libération finale, privilégie un caractère inquiet, grave et solennel, y compris dans la Sicilienne, bissée, perdant ici la dimension salonarde ou même fauréenne qui lui est généralement accordée.


Ce concert sera diffusé sur France-Musiques le mardi 19 août à 12 heures 35.




Simon Corley

 

 

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