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Myung-Whun Chung à Toulouse

Toulouse
Halle aux Grains
03/06/2003 -  
Félix Mendelssohn : Concerto pour violon en mi majeur, op. 64
Gustav Mahler : Symphonie n°1 « Titan »

Renaud Capuçon (violon)
Orchestre Philharmonique de Radio France, Myung-Whun Chung (direction)

Cette saison des Grands Interprètes n’a rien à envier aux plus grandes villes européennes ! Après l’Orchestre du Théâtre Mariinsky de Saint Pétersbourg, l’Orchestre National de France et les deux principales formations symphoniques de Milan, la Halle aux Grains accueille l’Orchestre Philharmonique de Radio France et son directeur musical, le chef sud-coréen Myung-Whun Chung.

Myung-Whun Chung, récemment récompensé aux victoires de la musique classique, nous offre la primeur de ce concert donné le lendemain soir au Théâtre des Champs-Elysées à Paris : le Premier concerto pour violon de Mendelssohn ainsi que la Première symphonie de Mahler. Un programme à la composition originale ! Le concerto, pure tradition du romantisme, rencontre la musique de Mahler, perpétuellement nourrie de paradoxes et de déchirements. Doit-on voir ici un lien entre cette opposition des styles ? Est-ce la vision de deux compositeurs résolument tournés vers l’avenir, leur élargissement de la musique aux voix solistes et chœurs, ou encore leur réputation de capellmeister ? Autant de chemins à explorer...

Cette première partie, œuvre majeure du répertoire pour violon solo, a été confiée à Renaud Capuçon, dont le talent et la virtuosité ont su propulser ce jeune prodige de 27 ans au devant de la scène musicale.

"Œuvre de jeunesse" pourrait bien décrire ce deuxième concerto pour violon. Mais attention à ne pas voir ici quelconque connotation péjorative. Cette grande page musicale démontra l’étonnante maturité musicale de Félix Mendelssohn, âgé alors de 29 ans quand naquis cette mélodie qui ne le quitta plus. Elle est un véritable rayon de soleil où s’entremêlent idylle, romance, charme mais aussi force et virtuosité. Jeunesse également par l’interprétation vivante, pleine de ferveur, de Renaud Capuçon et Myung-Whun Chung.

Les tempi empruntés sont énergiques, notamment à la fin du premier mouvement et du final, mais cet effet de contraste ainsi accentué n’est pas désagréable, bien au contraire. Belle union également de l’orchestre avec le soliste, élément central, présent du début à la fin, conteur privilégié de cette "romance sans parole". Maestro Chung est un accompagnateur vif mais aussi attentif qui ne laisse pas déborder son orchestre en présence du soliste. Renaud Capuçon s’impose d’emblée par un jeu d’une incroyable puissance mais néanmoins très pure. L’Andante du deuxième mouvement et quelques passages du premier en furent de bons exemples ; les sonorités célestes de ce stradivarius de 1721 ayant appartenu à Fritz Kreisler sont de toute beauté et on retrouve ici un lyrisme et une chaleur excellemment soignés. Egalement soignés, les arpèges agités qui trouvent l’inspiration chez Paganini, ne paraissent pas bousculés et les appuis quasi inexistants accentuent d’autant plus la fluidité et la légèreté de ces passages délicats. Soulignons également l’excellente prestation des bois qui ont su se rapprocher du soliste dans des sonorités très Mozartiennes.

Hormis un léger décalage entre soliste et orchestre dans un final plein de fougue, impertinence de la jeunesse et ça et là quelques lourdeurs superflues, cette interprétation loin de la routine a conquis le public et fut une grande source de plaisir saluée par un tonnerre d’applaudissements. Difficile alors pour Renaud Capuçon de quitter la scène sans nous gratifier d’un morceau solo, une mélodie de Gluck bien touchante.

Les symphonies de Mahler sont autant de messages qui symbolisent l’histoire du monde, la nature, la vie, la mort, la tendresse, la cruauté, et j’en passe, reflets d’un personnage plein d’espoirs mais aussi d’angoisses. Voilà pourquoi il est important de comprendre la musique de Mahler avant de l’entendre, Mahler qui à mes yeux reste le compositeur moderne par excellence.

Quatre mouvements pour quatre thématiques, quatre grandes idées qui ne se superposent pas et qui ont chacune un sens propre. La sonorité pianissimo des violons soutenant un la aigu est tout simplement divine. Le tempo est généreux et c’est une douce sensation de plénitude qui emplit ce lieu. Imaginons l’éveil de la forêt à l’aube d’une magnifique journée de printemps. Cette forêt est à la fois mystérieuse et mélancolique, comme en témoigne les multiples ré-expositions du thème, toujours différentes et contrastées. Quel dommage que cette poésie soit troublée par des cuivres à la précision rythmique douteuse et dont la justesse m’a à plusieurs reprises interloqué ! Dommage aussi l’entrée sur scène, pendant le mouvement, des trompettes jouant des coulisses pour un effet lointain très bien rendu. La vie prend rapidement le dessus et saluons clarinettes, flûtes, haut bois, tout un pupitre de bois sacrément en forme et très attentif pour une parfaite interprétation de chants d’oiseaux.

Le deuxième mouvement évoque les ländler, les valses paysannes. Ceci dit, difficile d’entrevoir une quelconque danse dans ce scherzo entrecoupé de motifs pleins de force, mais dont la densité attendue par les cuivres n’était pas au rendez-vous. C’est bien dommage car le thème des cordes, d’une interprétation et d’une sonorité tout à fait intéressante invitait au mouvement, même si le tempo me semblait plus lent que d’accoutumée.

L’atmosphère s’assombrit, devient sinistre. Les timbales marquent un rythme lancinant. Le sublime solo de contrebasse est un raffinement de cette symphonie. Mahler a voulu donner un autre esprit à cette marche funèbre, comme pour démystifier la mort. A deux reprises, c’est un thème tzigane gai et enjoué qui vient troubler cette atmosphère. L’énergie n’était malheureusement pas suffisante et le contraste quelque peu terni excepté pour les excellentes interventions ironiques et sarcastiques du clarinettiste.

Le final fut de toute beauté. La lecture par Myung-Whun Chung claire et très soignée, met en valeur des fortissimi intenses et la précision des attaques, saisissant ainsi la dimension tragique mais néanmoins glorieuse de ce mouvement. La dernière mesure m’a d’ailleurs rappelé le molto vivace de la Neuvième symphonie, hymne à la paix, de Beethoven.

Une impression donc mitigée de ce « titan » de la musique Mahlerienne qui n’a en rien boudé le plaisir du public à saluer Maître Chung et son orchestre. « Il va être difficile de vous quitter sans vous jouer un petit morceau », et c’est un extrait de Carmen (j’ai définitivement arrêté de chercher un « liant » à ce programme !!!) qui a brillamment clôturé ce concert.



Fabrice Candia

 

 

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