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Violence et noirceur

Nantes
Théâtre Graslin
06/09/2002 -  et 11, 13. juin 2002
Giuseppe Verdi : Don Carlo
Philip Skinner (philippe II), Manon Feubel (Elisabeth de Valois), Marek Torzewski (Don Carlo), David Wakeham (Marquis de Posa), Nina Romanova (La Princesse Eboli),
Jean-Jacques Cubaynes (Le Grand Inquisiteur), Delphine Fisher (Tebaldo), Vincent Pavesi (Un Moine), Antoine Normand (Le Comte de Lerme), Thierry Dran (Un Héraut)
Choeurs et Maîtrise de l’Opéra de Nantes, Orchestre National des Pays de Loire, Dominique Trottein (direction)
Philippe Godefroid (mise en scène)


On sait que Schiller dans sa tragédie (1787) et les librettistes de Verdi ne se sont pas trop embarrassés d’exactitude historique pour ce Don Carlo créé à Paris en 1867. C'est pourquoi Philippe Godefroid (directeur de l’Opéra de Nantes) s’est autorisé à faire de même, et a fait fi des modèles traditionnels pour sa dernière mise en scène à Graslin avant fermeture pour travaux jusqu'à l'été 2003. Toute sa conception repose sur la préséance et l’énorme poids du pouvoir religieux sur ceux de la royauté, en présentant l’ouvrage par le biais de la reconstitution des faits au travers d’un procès inquisitorial. Le ton dramatique, lourd et étouffant est donné dès le prologue où on aperçoit Philippe II poignardant son propre fils Don Carlo ...au son d’un seul glas au milieu de l’ensemble des personnages toujours présents sur scène quelle que soit l’action. A chaque tableau aux lumières grises et bleutées, resteront : un immense christ en croix, le grand inquisiteur en habit très rouge brandissant une petite croix à chaque pas, l’ensemble de la cour royale et de l’inquisition en costumes à l’iconographie non estampillée... très sombres, les chœurs assis dans les stalles du tribunal aux visages couverts de masques noirs impressionnants. Au moment où la princesse Eboli entonne la chanson du voile ou chanson mauresque «Nei giardin del bello» des gardes la saisissent et l’attachent au pied de la croix. Le Grand inquisiteur n’est plus un vieillard mais un homme jeune d’allure altière tandis que Philippe II est, lui, un vieillard courbé, tremblant ressemblant plus au Pape actuel qu’à un Grand d’Espagne. Le roi après avoir essayé de «forcer» la Reine qui le repousse violemment, devrait être seul dans sa chambre or son monologue «Ella giammai m’amo» interprété au milieu de cette foule de personnages, perd de son intensité émotionnelle. Posa ne meurt plus d’un coup d’arquebuse dans la prison mais est trucidé par deux gardes en noir toujours au pied de la croix. Au final juste avant le baisser de rideau Philippe II tue non seulement son fils mais aussi son épouse la Reine !!


Il est certain que cette mise en scène est très chargée de détails inventifs mais à trop vouloir prouver, on ne prouve rien ! Le spectateur essaie à chaque instant de saisir le sens des situations. Cette accumulation de gestes violents, de personnages, le décor très sombre, deviennent pesant et oppressant, sans doute au détriment de la partition de Verdi d’une richesse rare. Néanmoins vocalement cette œuvre a été défendue correctement.
Manon Feubel, (Aïda remarquée à Orange en 2001) est un soprano lyrique, certes très enveloppée physiquement (d'autant plus qu’on l’affuble d’un immense manteau de cour au col de fourrure très imposant) a interprété Elisabeth d’une façon magistrale. Elle a fait triompher son air «Tu che la vanita» avec une puissance convaincante en entrée pour terminer sur des pianissimi où l’émotion se faisait ressentir à chaque note. La mezzo soprano Nina Romanova a enthousiasmé le public en lançant son «o don fatal» avec une voix emplie de cruauté, rage, jalousie et douleur. Philip Skinner (Philippe II), a une belle voix chaude de baryton basse. Jean-Jacques Cubaynes a su donner à son interprétation toute l’autorité demandée par le rôle du Grand Inquisiteur. Posa était campé par David Wakemam, voix remarquable de volume, de phrasé, un vrai baryton central, malheureusement un peu gêné par la mise en scène qui n’a pas permis aux spectateurs de l’applaudir personnellement, en particulier au moment de sa mort à l’acte IV. Le ténor Marek Torzewski, vaillant Don Carlo avec parfois des écarts de justesse, a débuté avec des demi-teintes agréables mais qui manquaient d’amplitude en finale au moment de ses adieux à Elisabeth, sans doute était-il fatigué par ce rôle qui réclame une force continuelle, mais aussi une mélancolie amoureuse, et une fragilité qui ne transparaissaient pas.
Les Chœurs et la Maîtrise de l’Opéra de Nantes, l’Orchestre National des Pays de Loire étaient dirigés par Dominique Trottein qui a su dégager les passages fortissimi de l’autodafé tout en ne couvrant jamais les chanteurs.


Cette nouvelle production clôt la saison de l’Opéra de Nantes. A la veille d'une importante mutation liée à la création du syndicat mixte "Angers-Nantes", Philippe Godefroid ne prévoit pour la nouvelle hors les murs que deux spectacles lyriques Bohème (27, 29 novembre, 1er décembre 2002 et Wozzek (17, 19 janvier 2003) à la Cité des Congrès.





E.G. Souquet

 

 

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