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Idominable

Paris
Opéra National de Paris - Garnier
04/08/2002 -  11, 14, 17, 20, 23, 26, 29 avril, 2 mai
Wolfgang Amadeus Mozart : Idoménée
Marcus Brenciu (Idoménée), Mary Mills (Ilia), Christine Goerke (Idamante), Susan Graham (Idamante), Michael Myers (Arbace), Donald Litaker (Prêtre)
Ivan Fischer (mise en scène et direction), Jean-Marc Stehlé (décors et costumes), Yves Bernard (lumières), Yvette Bozsik (chorégraphie)
Orchestre et choeurs de l'Opéra National de Paris

Même ceux qui goûtent modérément la tarte à la crème sur la dictature du metteur en scène, et regrettent au contraire de ne guère voir à l'opéra de théâtre authentique, pouvaient accorder à Ivan Fischer et Jean-Marc Stehlé un préjugé favorable. Un chef d'orchestre, immergé dans le drame musical, qui agence le plateau, pourquoi pas, même si les précédents furent rarement heureux (un seul nom vient d'ailleurs à l'esprit, celui de Gardiner dans Cosi au Châtelet) ? Un décorateur dont l'univers de toiles peintes et de machines suscite le rêve par la vérité de la scène et non les artifices du réalisme, n'était-ce pas pour Idoménée un choix d'évidence ?
Quand le rideau se lève sur le gribouillage qui aplatit la prison à l'avant-scène, on espère encore une défaillance passagère. Très vite, hélas, se confirme l'impression que Stehlé a chargé les mauvaises toiles sur ses cintres et ses chariots : indoniaiseraies sorties du Roi de Lahore ou de Lakmé, et même cuirassés tombant du ciel avec le même à propos que ceux des Marx Brothers dans Une Nuit à l'opéra ! D'autant que tout cela est fort mal éclairé, que les costumes ne valent pas mieux, la direction d'acteurs faisant passer celle de Josée Dayan et Jeanne Moreau dans Attila pour un modèle d'intensité expressive et de subtilité dramatique. Le comble du grotesque est cependant atteint dans les ballets, où défilent, sous nos yeux incrédules, troupeaux de dauphins, hippocampes et méduses, un Cupidon demi nu et peinturluré façon Benoît Magimel du Roi Danse, et même un petit Mozart en perruque qui fait le grand écart au rideau final !
Le plus sinistre cependant est que ce bric à brac stylistique trouve sa correspondance dans la fosse, et révèle chez Fischer, qu'on a sincèrement admiré en d'autres occasions, une conception d'Idoménée pour le moins confuse. Des tempos judicieux, une vitalité bienvenue ne masquent pas l'absence de contrastes et d'un vrai lyrisme au profit de maniérismes qui renvoie constamment au singspiel de Zaïde ou de L'Enlèvement (que le rapport Idoménée - Ilia tente d'ailleurs maladroitement d'évoquer sur la scène). Cette optique, surprenante dans une tragédie aussi puissante, n'a même pas l'excuse d'une réalisation idoine, l'épaisseur de pâte, la laideur des sonorités et les multiples imprécisions donnant de l'orchestre de l'Opéra une image assez inhabituelle.
La distribution masculine ne rachète guère la soirée, Marcus Brenciu se trouvant constamment dépassé par les exigences du rôle titre. Les dames nous consolent ; May Mills n'est pas une mozartienne grand style, et pourrait être plus concernée par les affres de son personnage, mais sa belle et forte voix, menée avec franchise, fait impression. Susan Graham affronte vaillamment les extrêmes de la tessiture, et dispense dans le haut médium des couleurs enivrantes, phrase avec finesse (tant pis pour l'intonation parfois incertaine des récitatifs) et laisse transparaître une sensibilité dont le chef, lui, ne se soucie que modérément. Même devant l'inchantable (les lignes crucifiantes d' Idol mio ou les ultimes vocalises de sa scène finale) Christine Goerke reste une Elettra splendide, rude et majestueuse de timbre, insolente de souffle, d'un dramatisme naturel dont une véritable direction d'acteurs n'eût pas manquée de tirer parti.



Vincent Agrech

 

 

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