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"En hiver, mieux vaut raconter une triste histoire"

Bruxelles
Théâtre Royal de la Monnaie
12/10/1999 -  et 12*, 14, 17, 19, 21, 23, 26, 28, 30 décembre 1999, 2 janvier 2000
Philippe Boesmans : Wintermärchen
Dale Duesing (Leontes), Susan Chilcott (Hermione), Anthony Rolfe Johnson (Polixenes), Franz-Joseph Selig (Camillo/ Stimme des Orakels), Cornelia Kallisch (Paulina), Heinz Zednik (Green/ Die Zeit), Juha Kotilainen (Antigonus), Kris Dane (Florizel), Johanne Saunier (Perdita), Arthur Debski (Mamillius), Ismini Giannakis, Laurence Misonne, Djamilia Kamal Babaeva (Drei Hofdamen), Lorenzo Carola, Jacques Does (Zwei Hofherren), Lorenzo Carola, Juha Kotilainen (Taschendiebe), Laurence Misonne, Djamilia Kamal Babaeva (Zwei Böhmische Mädchen), Gerard Lavalle (Ein Böhmischer Soldat)
Luc Bondy (mise en scène), Erich Wonder (décors), Rudy Sabounghi (costumes), Alexander Koppelmann (lumières), Lucinda Childs (chorégraphie),Kuno Schegelmilch (perruques et maquillage), Renato Balsadonna (chef des choeurs),Aka Moon (Fabrizio Cassol, sax; Stéphane Galland, drums; Michel Hatzigeorgiou, bass),
Orchestre Symphonique et Choeurs de la Monnaie, Antonio Pappano

Après la réussite de Reigen en 1993 dans les mêmes lieux, la Monnaie renouvelle, en la surpassant, l'heureuse collaboration du compositeur Philippe Boesmans avec le metteur en scène et librettiste Luc Bondy. Là encore, le point de départ est une grande oeuvre littéraire, l'univers d' Arthur Schnitzler cédant la place à celui de William Shakespeare et de son Conte d'Hiver, plus étrange, plus éclaté dans la narration, plus mélangé dans les genres. Boesmans, dans sa musique, Bondy dans son adaptation (fidèle dans l'esprit malgré des modifications notables par rapport à la pièce) réussissent à restituer la complexité et la subtilité du sujet, tout en ajoutant une indéniable touche personnelle qui situe leur oeuvre dans une éclatante modernité.

Dans la première partie, à la Cour de Sicile, le Roi Leontes par sa jalousie maladive (il se persuade que son meilleur ami Polixenes, Roi de Bohème est l'amant de sa femme Hermione) provoque la mort de son fils et celle d'Hermione alors qu'elle met au monde une fille, Perdita, sauvée de justesse de ce même sort. Dans la deuxième, qui se passe seize ans plus tard, Perdita vit en Bohème, muette, ignorant tout de son passé et sur le point d'épouser Florizel, fils de Polixenes qui refuse cette union. Ils fuient en Sicile (Leontes y vit depuis accablé par le remords) où Perdita est reconnue devant tous par sa nourrice Paulina comme fille du roi, ce qui la fait accepter par Polixenes. Enfin, Paulina révèle une sculpture de glace d'Hermione que la musique anime. Cet happy end est nuancé par la sensation de Leontès que son délire pourrait menacer à nouveau.

La musique de Boesmans est inventive, limpide, virtuose et elle n'oublie pas de relier les notes aux émotions. Il écrit merveilleusement bien pour les voix, sans engendrer de monotonie et l'orchestration est de toute beauté (il faut dire que l'Orchestre de la Monnaie se surpasse dans les mains d' Antonio Pappano). Le livret de Luc Bondy et Marie-Louise Bischofberger est un modèle d'intelligence et d'habilité, réussissant à conserver la puissance dramatique du sujet de Shakespeare. L'opéra est chanté dans un allemand extrêmement bien prononcé par l'ensemble de la distribution. La scène en Bohème est particulièrement inventive: afin d'éviter le sentimentalisme excessif engendré par des personnages d'amoureux, Boesmans et Bondy distribuent le rôle de Florizel à un chanteur rock et celui de Perdita, devenue muette (hypothèse vraisemblable, en raison de son vécu traumatique) à une danseuse. La langue "étrangère" devient alors l'anglais et l'alternance entre des moments "rock" et des retours à l'écriture d'opéra est heureuse musicalement et dramatiquement. A noter enfin les éloquents décors d'Erich Wonder, paysage de glace en Sicile, et no man's land en Bohème.

Sur le plan vocal, il est réconfortant d'entendre des chanteurs évoluer dans des tessitures adaptées à leurs moyens et mettant en valeur leurs qualités. La distribution, d'une grande homogénéité, est cependant dominée par Dale Duesing, acteur-chanteur rare.

Les applaudissements enthousiastes du public démontrent parfaitement que l' opéra contemporain peut être de qualité et populaire, ce que la Monnaie nous rappelle régulièrement.



Christophe Vetter

 

 

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