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Insipide et prématurés

Montpellier
Opéra-Comédie
12/26/2014 -  et 28 décembre 2014, 2, 4, 6, 8 janvier 2015
Wolfgang Amadeus Mozart : Idomeneo, K. 366
Brendan Tuohy (Idomeneo), Marion Tassou (Ilia), Anna Manske (Idamante), Clémence Tilquin (Elettra), Antonio Figueroa (Arbace), Nikola Todorovitch (Grand-Prêtre de Neptune, Premier Troyen), Jean-Vincent Blot (La voix de Neptune), Véronique Parize (Première femme crétoise), Alexandra Dauphin (Seconde femme crétoise), Jean-Claude Pacull (Second Troyen), Marion Fiévet, Ida Dudenhoffer, Gaëtan Guérin, Pablo Labigne (figurants)
Chœur et chœur supplémentaire de l’Opéra national Montpellier Languedoc-Roussillon, Noëlle Gény (chef de chœur), Orchestre national Montpellier Languedoc-Roussillon, Sébastien Rouland (direction musicale)
Jean-Yves Courrègelongue (mise en scène), Mathieu Lorry-Dupuy (décors), Yashi (costumes), John Torres (lumières)


(© Marc Ginot)


Se soumettre à quelque épure scénographique pour souscrire à une certaine «modernité» n’a rien de nouveau, ni de blâmable en soi, et il n’est point nécessaire d’avoir travaillé avec Robert Wilson pour laisser la lumière créer le sens. Encore faut-il que celui-ci puisse affleurer. Ce qui ne semble pas nécessairement le cas avec la production d’Idoménée réglée par Jean-Yves Courrègelongue. A sa décharge, il convient de rappeler combien mettre en scène l’opus de Mozart se révèle périlleux, et maintes prétentions s’y sont heurtées avec insuccès, l’un des plus fameux naufrages restant celui d’Iván Fischer, à la fosse et au plateau à Garnier en 2002.


Ces précédents ne consolent guère hélas. Sans s’attarder sur une direction d’acteurs plus que balbutiante, les décors de Mathieu Lorry-Dupuy puisent sans discernement perceptible dans un vaste bric-à-brac où la piscine évoque Warlikowski, la chaise et les banquettes dix-huitième ont emprunté à Carsen, et la table de divination autour de décombres tente peut-être de se souvenir du cube de Bondy. Les costumes de Yashi, cravate, tailleurs, robe du soir et tenues de ville, ne parviennent guère à transsubstantier leur statut d’objet de consommation, à quoi se réduit leur contemporanéité. Les lumières croient imiter Wilson, mais en ont oublié la magie. Au-delà du beau et du laid, le spectacle se distingue par une insipidité exemplaire.


Distribué comme un atelier de jeunes chanteurs, le plateau vocal s’expose à plus de risques que de promesses, même si elles ne manquent pas, en particulier avec l’Eletta de Clémence Tilquin, douée d’un indéniable potentiel théâtral comme d’une musicalité certaine: gageons que trilles et vocalises gagneront en souplesse et en rondeur au fil des ans – le dernier air, «D’Oreste, d’Aiace», privilégie le dessin au naturel. Ceux d’Arbace ne déméritent pas, même si là réside la principale qualité d’un Antonio Figueroa assez en retrait. Prématurées s’avèrent également la prise de rôle de Marion Tassou, Illia à la fraîcheur encore trop verte pour laisser s’épanouir sa séduction juvénile, comme l’Idamante bien pâle d’Anna Manske en adolescent androgyne. Seul l’Idoménée de Brendan Tuohy ne paraît pas trop précoce, dont le chant honnête tirerait vraisemblablement bénéfice d’une mise en scène plus aboutie – son «Fuor del mar» affirme une appréciable persévérance.


On ne s’attardera pas sur les figures secondaires: Nikola Todorovitch disgracie le Grand-Prêtre de Neptune dans une émission nasale, et forme avec Jean-Claude Pacull une paire troyenne pour le moins étrange, quand Véronique Parize et Alexandra Dauphin font une apparition en deux femmes crétoises. L’intervention de la Voix de Neptune par celle de Jean-Vincent Blot remplit son office des coulisses.


Sébastien Rouland essaie d’assez louable manière de faire sonner l’Orchestre national Montpellier Languedoc-Roussillon selon les canons baroqueux. La dynamique impulsée se disperse cependant dans une rythmique d’allure cyclothymique. Si le travail sur la sonorité aboutit à des résultats plutôt heureux avec les bois, les cordes résistent dans une inélégance acide et décharnée que l’on croyait rangée dans les archives, tandis que les cuivres découvrent surtout leur justesse inconsistante. La mise en place recèle des marges de progression indubitables. Les chœurs, préparés par Noëlle Gény, ne le démentiront pas.



Gilles Charlassier

 

 

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