About us / Contact

The Classical Music Network

Vienna

Europe : Paris, Londn, Zurich, Geneva, Strasbourg, Bruxelles, Gent
America : New York, San Francisco, Montreal                       WORLD


Newsletter
Your email :

 

Back

L’effet Dvorák

Vienna
Konzerthaus
03/10/2024 -  et 11* mars 2024

10 mars 2024 – et 6 (Madrid), 12 (Hamburg) mars 2024
Antonín Dvorák : V přírodě, opus 91, B. 168 – Concerto pour violon, opus 53, B. 108 – Symphonie n° 8, opus 88, B. 163


11 mars 2024 – et 11, 12, 13 octobre 2023 (Praha), 13 (Hamburg), 17 (München), 18 (Erlangen) mars 2024
Antonín Dvorák : Karneval, opus 92, B. 169 – Concerto pour piano, opus 33, B. 63 – Symphonie n° 9 « Z nového světa », opus 95, B. 178


Augustin Hadelich (violon), András Schiff (piano)
Ceská filharmonie, Semyon Bychkov (direction)


(© Petr Kadlec)


Quatrième étape d’une ambitieuse tournée européenne qui va d’Espagne à Paris via de nombreuses étapes allemandes mais aussi à Bruxelles, ce cycle de deux concerts proposé à Vienne offre un splendide aperçu du travail accompli par Semyon Bychkov avec la Philharmonie tchèque depuis 2018. Chaque programme, entièrement consacré à Dvorák, d’une structure traditionnelle (ouverture, concerto, symphonie), révèle en fait, tel un kaléidoscope, la plasticité interprétative que Bychkov parvient à insuffler à ses musiciens.


On ne peut imaginer de contrastes plus marqués que dans les deux concertos. Le premier soir, une vision très classique est suggérée par le violoniste Augustin Hadelich, qui cultive une sonorité lumineuse, sincère et sans excès. L’intransigeance volontaire du tempo dans le premier mouvement semble parfois contraindre les espaces de liberté du soliste, et il faudra attendre le deuxième mouvement pour l’entendre chanter avec plus de souplesse, et toucher le cœur de la nostalgie tchèque ; le troisième mouvement explose d’exubérance sur une base de rythmes, d’accentuations et d’articulations implacables. Le second soir est en revanche révolutionnaire. András Schiff ausculte la partition pour la présenter avec une cérébralité radicale et inédite. L’Allegro agitato suscite une succession d’interrogations anxieuses : articulation martiale à la limite de la sécheresse, suspensions qui frôlent le statisme... est‑ce une tentative de dé‑composition, ou la révélation d’une œuvre trop souvent marginalisée ? Passé le choc initial, le coup de génie s’impose rapidement aux auditeurs ; le mouvement lent en particulier, d’une intériorité et d’un dépouillement brucknériens, où les ornements du piano viennent s’insérer au sein de lignes orchestrales millimétrées, émerge comme l’un des points culminants de ces deux soirées. Bien plus qu’une interprétation, András Schiff et Semyon Bychkov semblent nous donner à voir en direct la fabrique d’un tissu musical.


Les ouvertures, conçues par le compositeur comme les volets d’une trilogie, jouent la carte de la diversité. La nature présentée par les Tchèques est d’une approche assez terrienne, rendue bucolique par des interventions de vents riches en personnalités. La vitalité de l’Ouverture Carnaval est immédiatement séduisante : l’articulation est précise, les couleurs chatoyantes.


Le sens de la structure de Semyon Bychkov est particulièrement apparent dans les symphonies. Quoiqu’infiniment mobile, instillant à chaque note de subtiles touches de couleurs, et prenant parfois des options interprétatives radicales (admirables interventions musclées des pupitres de vents), le discours musical du chef reste d’une sublime cohérence et projette une spontanéité immédiatement séduisante.


Dans un monde parfait, on rêverait d’une troisième soirée consécutive avec l’Ouverture Othello, le Concerto pour violoncelle et la Septième Symphonie. Reste ce que l’on peut appeler un « effet Dvorák » : il est apparent que cette musique rend heureux ! Les musiciens, qui pourraient sûrement jouer ces partitions à rebours, prennent leur pied comme le ferait un orchestre de jeunes ; les couples assis dans le public s’embrassent amoureusement ; et même les ronchons viennois finissent par échanger un sourire amical à leur voisin de rangée.



Dimitri Finker

 

 

Copyright ©ConcertoNet.com