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Le grand silence des orgues ibériques

Oviedo
Eglise Santa Maria La Real de la Corte
08/05/2014 -  
Johann Sebastian Bach : Dritter Theil der Clavierübung: Kyrie, Gott Vater in Ewigkeit, BWV 672, Christe, aller Welt Trost, BWV 673, Kyrie, Gott Heiliger Geist, BWV 674, Allein Gott in der Höhe, BWV 675, Fughetta super Allein Gott, BWV 677, Fughetta super Dies sind die heiligen Zehn Gebot, BWV 679, Fughetta super Wir Glauben, BWV 681, Vater unser im Himmelreich, BWV 683, Christ unser Herr zum Jordan kam, BWV 685, Aus tiefer Not schrei’ ich zu Dir, BWV 687, Fuga super Jesus Christus, unser Heiland, BWV 689, Quatre duos, BWV 802 à 805
Henry Purcell : Chaconne
Dietrich Buxtehude: Prélude et fugue en do mineur
Antonio Soler : Versos y fuga para el Te Deum
Adolfo Gutiérrez Viejo : Recercata sopra Alba

Adolfo Gutiérrez Viejo (orgue)


(© Stéphane Guy)


Pour entendre de l’orgue, il faut des instruments et des organistes. En Espagne, il y a des orgues, souvent flamboyants avec leurs tuyaux horizontaux en éventail (en chamade), prêts à hurler comme les trompettes de l’Apocalypse. Mais la plupart sont anciens (de l’époque baroque), quand ils n’ont pas été détruits lors durant la Guerre civile, nombre de partitions ayant disparu de leur côté auparavant lors de la «brillante» expédition napoléonienne... Beaucoup ne sont pas en état de fonctionner, ne sont pas entretenus et le mouvement de la renaissance de l’orgue symphonique au dix-neuvième siècle a peu touché le pays pour susciter de nouvelles créations. Quand ils sont susceptibles de fonctionner, ils restent en pratique inertes. Par exemple, l’orgue mécanique du dix-huitième siècle de l’église Santa María du monastère de Valdedíos, près de Villaviciosa sur la côte des Asturies, magnifiquement restauré récemment, qui ne dispose que d’un petit clavier (divisé) mais bénéficie de superbes harmoniques et cromornes, n’est joué que deux fois par an. S’agissant des organistes, il y en a peu; dans ces conditions, on ne fait appel qu’à des amateurs dévoués pour animer les offices, sur de fort médiocres harmoniums installés dans les chœurs des églises et cathédrales. Certes, il existe des passionnés, qui se battent pour faire vivre les orgues, mais le résultat peut se révéler assez contrasté.


Adolfo Gutiérrez Viejo, formé à Madrid, Sienne, Rome et Munich, ancien titulaire des orgues de la cathédrale de Leon et ancien professeur d’orgue à Alicante, fait partie de ceux-là. Malheureusement, il enfile, dans une église qui fait partie de l’ensemble religieux entourant la cathédrale d’Oviedo et partiellement repris par le musée archéologique, ses pièces comme des perles, sans autres pauses que celles qui lui sont nécessaires pour changer de partition et modifier ses registres. Il multiplie les approximations et les variations de tempos dans les pièces de Jean-Sébastien Bach (1685-1750), essentiellement des chorals extraits des Exercices pour clavier (Clavierübung) de 1739, au point qu’une partie du public, venu pourtant nombreux, s’interroge sur le sens du concert et finit par partir. La Fugue BWV 689, par exemple, devient sous les doigts de l’organiste une masse informe et criarde. Le Prélude et fugue de Dietrich Buxtehude (1637-1707), mené sans respiration aucune, n’est à vrai dire pas mieux interprété. L’interprétation n’est au demeurant en rien compensée par un effort pédagogique ; au profit de la littérature pour orgue par exemple – aucune des pièces choisies ne pouvant véritablement attirer vers le monde de l’orgue de nouveaux adeptes – ou au profit de l’instrument baroque, celui de l’église, dont on ne saura finalement rien. Aucun rapport avec les efforts faits le 1er août pour le concert offert par Roberto Fresco au monastère de Valdedíos, au début duquel le partenaire instrumental nous avait été présenté en détail. Certes, Adolfo Gutiérrez Viejo paraît plus à l’aise avec la Chaconne de Henry Purcell (1659-1695) et surtout les pièces d’Antonio Soler (1729-1783), brillantes et bondissantes, au point de faire penser parfois de façon surprenante à Louis-James-Alfred Lefébure-Wély (1817-1869), ou ses propres pages inspirées par sa petite-fille. Dans un style «ancien», celles-ci présentent des thèmes espagnols joliment arpégés et sont d’une gaité communicative. Elles ont moins le mérite d’achever de façon heureuse un concert somme toute assez décevant.


Décidément, le monde de l’orgue paraît être une terre de mission en Espagne.



Stéphane Guy

 

 

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