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Programme venu du froid

Paris
Théâtre du Châtelet
04/03/2014 -  
Arvo Pärt : Fratres
Edvard Grieg : Concerto pour piano en la mineur, opus 16 – Peer Gynt, Suite n° 1, opus 46
Carl Nielsen : Aladdin, Suite, FS 89

Valentina Lisitsa (piano)
Orchestre national de France, Kristjan Järvi (direction)


V. Lisitsa (© Gilbert François)


Au vu du programme du dernier concert de l’Orchestre national, on pouvait craindre une avalanche de musique glaçante devant un énoncé aussi nordique que Pärt (Estonie), Grieg (Norvège) et Nielsen (Danemark), un voyage dans deux siècles de musique scandinavo-baltique plutôt original et inhabituel. Mais, passée la froideur relative de la pièce d’Arvo Pärt, pas la plus déprimante que l’on ait entendue de ce compositeur, le voyage menait vers les saveurs à peine postromantiques du Concerto pour piano de Grieg et de sa Première Suite de Peer Gynt pour aboutir à tout un pittoresque d’exotisme revu par un nordique avec la Suite d’Aladdin de Carl Nielsen.


Fratres pour orchestre à cordes et percussion (1977) d’Arvo Pärt, donnée dans sa version remaniée en 1991, est une œuvre de très belle facture polyphonique dont l’inspiration britténienne n’est pas dissimulée et le propos très spirituel. Osera t-on dire que les musiciens de l’Orchestre national ont paru si concernés et appliqués dans cette œuvre courte que c’était affligeant de les voir retomber dans les habitudes de routine du concert hebdomadaire avec le Concerto de Grieg qui suivait ainsi que pour la suite du programme, si l’on excepte quelques moments privilégiés dans l’œuvre de Nielsen? Et pourtant, la personnalité du jeune chef Kristjan Järvi, fils de Neeme Järvi mais aussi frère de Paavo Järvi et de la flûtiste Maarika Järvi, avait de quoi stimuler plus d’un musicien routinier. Belle et charismatique présence, le chef américano-estonien a une battue peu classique, très directive, sportive et gestuelle, quasi théâtrale. Il a réussi à enthousiasmer un public, largement constitué d’abonnés mais rehaussé ce jour d’un grand nombre de scolaires très réceptifs, avec la Première Suite de Peer Gynt et ses épisodes qui, au fil de l’utilisation de la musique de concert à des fins filmographique et publicitaire, sont devenus des tubes de l’inconscient collectif.
La Suite d’Aladdin (1918) de Nielsen, une musique de scène très pittoresque mais souvent déroutante dans sa façon d’appréhender l’exotisme dans le prisme de la perception nordique, comporte quelques pages assez spectaculaires sur le plan rythmique. «Place du marché d’Ispahan» en est la plus originale, avec sa superposition de quatre fractions d’orchestre jouant à un tempo différent pour signifier l’atmosphère chaotique d’un bazar oriental.


Mais, ne le cachons pas, c’est pour entendre la soliste, l’Ukrainienne Valentina Lisitsa, que l’on avait fait le déplacement! Véritable phénomène en ce sens que la carrière internationale de cette grande et belle femme à la blondeur diaphane qui, dans sa quarante-et-unième année, n’est pas une débutante, s’est vue boostée alors qu’elle piétinait par l’immense succès de vidéos de performances postées sur YouTube ayant recueilli un tel nombre de clics – l’accoutrement vestimentaire kitsch de la pianiste aurait largement participé à ce phénomène – que l’attention des producteurs phonographiques et agents de concert a été attirée et qu’elle a pu enregistrer les Concertos de Rachmaninov pour Decca. Deux remplacements à Paris, en 2011 aux Bouffes du Nord resté confidentiel et, plus médiatisé, au début de la saison de l’Orchestre de Paris à Pleyel celui de Boris Berezovski dans un très sportif programme Liszt (suivi qu’un quasi mini-récital de bis), ont attiré la curiosité pour ce concert, quant à lui bien prévu dans la saison de l’Orchestre national, pour ainsi dire ses débuts officiels parisiens. Habillée comme une poupée de fête foraine d’une impossible robe rouge, la jeune femme a tout de même belle allure et se dégage dès son arrivée au piano une grande personnalité faite d’autorité et de self control. Dans ce pilier du répertoire qu’est le Concerto de Grieg, son jeu est impeccable, sa sonorité chatoyante et la complicité avec le chef et l’orchestre évidente. On aimerait cependant l’entendre jouer d’un autre instrument que ce Bösendorfer dont, placé très près de la scène, on percevait trop le lourd mécanisme. Quelques commentateurs après le concert Liszt ont rechigné sur un certain monomorphisme de son jeu et de figures de style à la limite du mauvais goût. Rien de cela chez Grieg, où l’on a pu apprécier une technique infaillible et une très belle interprétation dans un style romantique très pur. La transcription par Liszt de l’Ave Maria de Schubert qui suivait, d’une pureté angélique, donnait envie d’en savoir plus sur l’art de cette pianiste à la personnalité intrigante.


Le site de Kristjan Järvi
Le site de Valentina Lisitsa



Olivier Brunel

 

 

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