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Mahler « West Coast »

Geneva
Victoria Hall
03/20/2014 -  et 27 février, 1er, 2 (San Francisco), 16 (London), 18 (Paris), 23 (Luxembourg), 26 (Wien) mars 2014
Gustav Mahler: Symphonie n° 3
Sasha Cooke (mezzo-soprano)
Chœur de l’Orchestre de Paris, Lionel Sow (chef de chœur), Maîtrise de Paris, Patrick Marco (chef de chœur), San Francisco Symphony, Michael Tilson Thomas (direction)


S. Cooke (© Dario Acosta)


Michael Tilson Thomas et l’Orchestre symphonique de San Francisco poursuivent leur tournée européenne en reprenant le même programme du concert qu’ils ont donné le 18 à Paris. Comme l’a souligné « MTT » lui-même sur son compte tweeter, c’est la première fois que le prestigieux chef américain se produit à Genève, où l’attendait un public nombreux dont quelques spectateurs qui applaudissaient entre les mouvements mais surtout les membres de l’association Gustav Mahler de Genève et leur invité de prestige, Henry-Louis de la Grange, dont on connaît les ouvrages passionnants consacrés au compositeur, ainsi qu’entre autres Jean-Marie Blanchard, l’ancien directeur du Grand Théâtre et directeur du Wagner Geneva Festival et Henk Swinnen, directeur de l’Orchestre de la Suisse Romande.


Pour des mélomanes de cette génération, la musique de Mahler a connu deux écoles d’interprètes qui ont été opposées et dont les deux représentants étaient deux élèves de Mahler, Bruno Walter et Otto Klemperer. Si la première privilégiait avant tout l’expressivité et la sentimentalité du compositeur et a beaucoup influencé un chef mahlérien comme Leonard Bernstein, la seconde a, elle, mis en avant sa modernité et son radicalisme et trouve son développement dans les lectures qui ont été faites par un Pierre Boulez.


C’est donc une certaine surprise que d’entendre Michael Tilson Thomas, élève américain emblématique de Bernstein, choisir des options résolument objectives et musicales rejoignant ainsi l’esprit et l’approche des modernistes. Le chef choisit ainsi des tempi modérés – le premier mouvement, qui, sous de nombreuses baguettes, dure une demi-heure, compte cinq bonnes minutes de plus – et s’attache à respecter minutieusement toutes les indications du compositeur. Les redoutables traits des cordes qui sont si souvent « savonnés » sonnent ici avec une précision au laser qui ne peut être que le fruit de longues heures de travail. Les équilibres et la polyphonie chère à Mahler ressortent avec une clarté que Schoenberg, qui avait émigré en Californie, aurait appréciée.


Une telle approche purement apollinienne peut surprendre dans cette symphonie qui célèbre la nature et le panthéisme. Les premiers mouvements manquent par moments d’un certain élan et on se prend à regretter l’absence de quelques fausses notes qui peuvent caractériser des exécutions plus passionnées, mais ce sentiment est compensé par la profonde musicalité et la probité extrême de la lecture des musiciens américains. Les solistes de l’orchestre impressionnent, à commencer par un pupitre de cuivres très virtuose. Le trombone solo, dont la partie est si développée dans le premier mouvement, la première trompette et le cor de postillon du troisième mouvement s’imposent par leur profonde musicalité. En dépit des masses sonores en présence, les pupitres s’équilibrent avec naturel, ce qui laisse penser que, à l’opposé de certains ensembles étrangers, les musiciens ont pu répéter dans la salle du Victoria Hall, dont l’acoustique reste délicate à apprivoiser.


Les trois derniers mouvements, plus retenus, s’accommodent mieux de l’approche de Tilson Thomas. La mezzo Sasha Cooke est d’une grande intériorité dans le poème de Nietzsche. Les chœurs parisiens manquent eux un peu de netteté et manquent de justesse – le la « solaire » qui devrait être le point culminant de ce mouvement étant un peu bas. Mais les musiciens se surpassent dans le sublime finale. La longueur de la ligne musicale de l’introduction aux cordes est exemplaire et le développement construit avec une très grande autorité. Tilson Thomas, comme Boulez, fait partie de ces très rares chefs qui ne font pas de crescendo sur les dernières mesures, nous montrant ainsi qu’il est possible de respecter la stricte lettre de la partition pour en retrouver l’esprit.



Antoine Leboyer

 

 

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