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Un Fidelio peut en cacher un autre

Zurich
Opernhaus
12/08/2013 -  et 12, 15, 18, 20, 29 décembre 2013, 1er, 5, 8*, 11 janvier 2014
Ludwig van Beethoven : Fidelio, opus 72
Ruben Drole (Der Minister), Martin Gantner (Don Pizarro), Brandon Jovanovich*/Michael Schade/Kor-Jan Dusseljee (Florestan), Anja Kampe (Leonore), Christof Fischesser (Rocco), Julie Fuchs (Marzelline), Mauro Peter (Jaquino), Alessandro Fantoni (Erster Gefangener), Christoph Seidl (Zweiter Gefangener)
Chor der Oper Zürich, Ernst Raffelsberger (préparation), Philharmonia Zürich, Fabio Luisi/Thomas Rösner* (direction musicale)
Andreas Homoki (mise en scène), Henrik Ahr (décors), Barbara Drosihn (costumes), Franck Evin (lumières), Alexander du Prel (vidéos), Werner Hintze (dramaturgie)


(© T + T Fotografie/Toni Suter)


Jusqu’où un metteur en scène peut-il intervenir dans la structure d’une œuvre? C’est la question que pose la nouvelle production de Fidelio à Zurich. Andreas Homoki n’y est pas allé de main morte: suppression de l’Ouverture, remplacée par la moitié du quatuor de l’acte II, elle-même suivie d’une partie de l’Ouverture Leonore III, suppression pure et simple des dialogues, déplacement d’un air. Le spectacle commence par une sorte de prologue: sur un plateau complètement vide, Pizarro fait irruption, un pistolet à la main, pour tuer Florestan, avant d’être freiné dans son intention par l’arrivée de Leonore et de Rocco. Au moment où retentit une trompette annonçant la présence du ministre, un coup part, blessant mortellement Leonore, qui expire dans les bras de son époux. Résonnent alors les premières notes – joyeuses – de l’Ouverture Leonore III : l’héroïne se relève et va embrasser des personnes qui viennent à sa rencontre. Puis débute à proprement parler Fidelio avec une scène entre Leonore et Marzelline, laquelle aide l’héroïne à s’habiller en homme. Marzelline sait donc dès le début que Leonore est une femme... On n’en est pas ici à une invraisemblance près ! Et on en est réduit à supposer que le « happy end » final n’est qu’un rêve, puisque Leonore vient de mourir... Estimant par ailleurs que les dialogues de l’unique opéra de Beethoven sont triviaux et sans commune mesure avec la musique (« Beethoven a raconté par sa musique une autre histoire que ses librettistes » dixit Andreas Homoki), le metteur en scène a jugé bon de les supprimer tous, mais il s’est senti obligé de les remplacer par des voix off et des indications sur le cadre de scène, vraisemblablement pour que le public ne perde pas le fil de l’intrigue. Une production discutable et boiteuse en fin de compte, qui a déclenché une bordée de sifflets le soir de la première. Lorsque le rideau s’est baissé au terme de l’avant-dernière représentation, des huées sonores se sont mêlées aux applaudissements, signe que le spectacle ne laisse personne indifférent.


On peut s’étonner que le directeur musical de l'Opernhaus, Fabio Luisi, ait accepté sans sourciller un tel traitement. Mais peut-être était-il difficile de dire non au patron de l'institution lyrique zurichoise... Pour les deux dernières représentations, le maestro a été remplacé dans la fosse par Thomas Rösner, qui a pu compter, on l’imagine, sur le travail fourni par son prédécesseur avec les musiciens. Dans cette production où la musique acquiert d’autant plus d’importance du fait de la suppression des dialogues, l’orchestre déploie un jeu contrasté et différencié, faisant clairement ressortir les différents niveaux de la partition de Beethoven (légèreté de Marzelline, profondeur dramatique de Leonore et Florestan, lyrisme des passages choraux). Leonore est un rôle limite pour Anja Kampe, qui doit parfois forcer sa voix, au détriment de la justesse, mais la chanteuse séduit par son sens des nuances et sa musicalité ainsi que par son engagement scénique, campant une femme des plus courageuses et déterminées. Le Florestan de Brandon Jovanovich est beaucoup plus unidimensionnel, usant et abusant du fortissimo, quitte à craquer plusieurs notes. Les seconds rôles sont tous excellents, à commencer par la Marzelline de Julie Fuchs et le Rocco de Christof Fischesser. On l’aura compris, la partie musicale et vocale du spectacle rachète le traitement scénique douteux de ce Fidelio zurichois.



Claudio Poloni

 

 

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