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Alceste au tableau noir

Paris
Palais Garnier
09/12/2013 -  et 15, 19, 22, 25, 28 septembre, 2, 4, 7 octobre 2013
Christoph Willibald Gluck : Alceste
Yann Beuron (Admète), Sophie Koch (Alceste), Jean-François Lapointe (Le Grand Prêtre d’Apollon), Franck Ferrari (Hercule), Stanislas de Barbeyrac (Evandre, Coryphée ténor), Marie-Adeline Henry (Coryphée soprano), Florian Sempey (Apollon, Un héraut, Coryphée basse), François Lis (Une divinité infernale, L’Oracle), Bertrand Bazin (Choryphée alto)
Chœur et Orchestre des Musiciens du Louvre Grenoble, Marc Minkowski (direction)
Olivier Py (mise en scène)


(© Opéra national de Paris/Agathe Poupeney)


Le mythe, Olivier Py connaît, mieux que quiconque. Il a pourtant, avec Alceste, raté son coup. Certes, ces tableaux noirs sur lesquels on dessine à la craie avant d’effacer nous disent l’éphémère, le périssable, nous renvoient à la mort. C’est la métaphore des vanités classiques : le metteur en scène a voulu faire de cet Alceste un Memento mori. Il faut un Hercule magicien, qui sort une tourterelle de son chapeau, pour arracher l’héroïne à la mort. Le médecin, avatar de l’Oracle, n’y peut rien. Comme souvent chez lui, le mythe grec se perpétue hic et nunc, la sentence du chœur de la tragédie grecque se perpétue à travers le tag ; les chanteurs portent des costumes modernes, le Grand Prêtre une soutane. Le soleil, pourtant, vaincra, sous les traits d’un Apollon danseur : la lyre l’emporte sur les ténèbres. Métaphore, cette fois, de la musique, de l’opéra, qui transcendent la mort en la sublimant – mais le dessin du Palais Garnier, sur le tableau noir, est effacé comme les autres… L’ensemble paraît pourtant inabouti, éclaté, avec une direction d’acteurs qu’on attendait plus affûtée. Si inventif d’habitude, Olivier Py se répète, à travers ces néons, ce noir et blanc, ces praticables qui se rejoignent ou se séparent, ces silhouettes noires portant des masques mortuaires : on reconnaît son univers, très sobrement constitué ici, mais il n’est plus habité. A quoi bon, au troisième acte, mettre l’orchestre sur la scène pour transformer la fosse en Enfers ? La force du mythe, qu’il voulait décupler, s’affaiblit, victime d’un savoir-faire en quête d’un objet qui lui échappe, comme si la machine tournait à vide. Attendons son Aïda, la prochaine production de l’Opéra.


La déception, malheureusement, vient aussi de Sophie Koch, bien qu’elle assume avec courage un rôle écrasant. Mais c’est un rôle de falcon avant l’heure, voire de soprano dramatique – ce qu’étaient ses illustres devancières. Alceste n’appelle pas un mezzo – Anne Sofie von Otter n’en possédait pas davantage les moyens (voir ici). Le médium et le grave se cherchent, très instables, l’homogénéité de la tessiture est perpétuellement menacée. Le diapason plus bas, qu’elle croyait favorable, lui nuit plus qu’il la sert. Question de style également : la grande déclamation gluckiste lui échappe, faute d’abord d’une articulation assez nette – ce n’était pas le cas d’une Véronique Gens à Aix. On a peine à reconnaître le si bel Adriano de Salzbourg – certes la tessiture, la vocalité sont différentes. L’engagement, la vérité de la composition ne suffisent pas à dissiper notre tristesse. Autour d’elle, en revanche, tout est exemplaire. Epoux au cœur tendre mais jamais mièvre, Yann Beuron, même s’il n’a plus tout à fait la souplesse de son Pylade, reste en revanche un modèle de style classique français, comme Jean-François Lapointe, Grand Prêtre aussi noble qu’imposant, alors que Franck Ferrari s’est policé pour son Hercule et que François Lis est impeccable. On s’en voudrait, enfin, de ne pas souligner l’excellence des quatre Coryphées, dont trois sont de brillants sujets de l’Atelier lyrique de l’Opéra déjà entrés dans la carrière – Stanislas de Barbeyrac, Marie-Adeline Henry et Florian Sempey.


L’ensemble grenoblois se distingue. Le chœur est décidément un des meilleurs dans ce répertoire, pour l’homogénéité et l’authenticité stylistique. Passons outre quelques décalages souvent inhérents aux premières : à la tête d’un orchestre aux sonorités sans sécheresse, Marc Minkowski, toujours si à l’aise chez Gluck, dépoussière et aère la partition, lui restitue sa puissance dramatique, en fait du théâtre en musique.


Ecouter la retransmission sur le site de France Musique



Didier van Moere

 

 

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