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Une nouvelle Cléopâtre

Paris
Palais Garnier
05/23/2013 -  et 26, 28, 31 mai, 2, 4*, 6, 9, 11, 14, 16, 18 juin 2013
Georg Friedrich Haendel : Giulio Cesare, HWV 17
Lawrence Zazzo (Giulio Cesare), Varduhi Abrahamyan (Cornelia), Karine Deshayes (Sesto), Sandrine Piau/Yun Jung Choi* (Cleopatra), Christophe Dumaux (Tolomeo), Paul Gay (Achilla), Dominique Visse (Nireno), Jean-Gabriel Saint-Martin (Curio)
Orchestre et Chœur du Concert d’Astrée, Emmanuelle Haïm (direction)
Laurent Pelly (mise en scène)


(© Agathe Poupeney/Opéra national de Paris)


Deux ans après, ce Jules César confirme ses lacunes tout en y remédiant. L’absence de Natalie Dessay donne de l’air à une production que sa complicité avec Laurent Pelly parasitait très vite, au détriment des autres personnages. Nous voilà moins proches de la comédie musicale, par laquelle le metteur en scène, fidèle à sa manière, tentait de se distancier du seria : le second degré fonctionne plutôt mieux. La récupération ironique des lieux communs de l’orientalisme, pourtant, pèse toujours un peu lourd, dans ces réserves du musée du Caire ou du Louvre où reprennent vie, le temps d’une journée, les figures de l’Antiquité. On se lasse de ces incessants mouvements de magasiniers, de cette mise en abyme systématique – dont Laurent Pelly finit par abuser. De ces clins d’œil faciles aussi : fête galante pour l’apparition de Cléopâtre au deuxième acte, avec portrait de Haendel par Hudson, arrivée de la reine dans un tapis à la fin… Mais, encore une fois, l’ensemble paraît moins éclaté, plus homogène, plus concentré, même si les passions, pour ne pas dire les pulsions, prennent ici nettement le pas sur le drame politique : Eros est maître du jeu. Et puis, quand on a vu le ratage salzbourgeois du tandem Caurier et Leiser...


Emmanuelle Haïm, en revanche, n’a guère fait de progrès. Sa perpétuelle agitation, avec cette gestique à vous faire recaler au premier concours de direction d’orchestre, ne produit aucun effet : sur trois heures et demie, l’œuvre paraît bien longue et passablement atone – un comble pour Jules César. Le Concert d’Astrée, de surcroît, manque de lignes et de couleurs malgré de beaux solos de cor ou de flûte, avec des cordes parfois en deçà des exigences de la musique. La distribution en pâtit, qu’on imaginerait plus investie si elle était davantage portée par la fosse : elle manque souvent de relief et trahit parfois des insuffisances. Lawrence Zazzo a beau avoir gagné un peu en homogénéité, il a gardé des trous dans sa voix étiolée, toujours plus à l’aise dans l’effusion que dans la vaillance. Tel est aussi le cas de Karine Deshayes, décevant Sextus : son mezzo clair, inadapté à la tessiture du rôle, ne se déploie que lorsqu’il tire vers l’aigu les da capo. Varduhi Abrahamyan, en revanche, a mûri sa Cornélie, sobre et noble figure tragique, d’une homogénéité de ligne et de registres exemplaires. Pour les autres, c’est selon : à un Paul Gay impossible, totalement égaré en Achilla, le Nirenus de Dominique Visse, défait de voix mais virevoltant comédien, pourrait en remontrer encore ; l’aigreur du timbre, chez Christophe Dumaux, ne messied pas au lubrique Ptolémée ; Jean-Gabriel Saint-Martin parvient à habiter dignement les quelques mesures de Curion – pas même un air pour le confident de César.


Reste la Cléopâtre de la jeune Sud-coréenne Yun Jung Choi, qui remplace Sandrine Piau. Etoile de l’Atelier lyrique il y a quelques années, elle confirme ici, non sans un certain éclat, ses qualités dans un emploi si difficile. Certes le timbre reste un peu sec, la vocalise un peu mécanique, la coloration un peu limitée, on peut rêver Cléopâtre plus sensuelle, mais elle assume le rôle de bout en bout, fièrement, le phrase en styliste, facétieuse et rouée, fine politique, séductrice féline et sacré caractère.



Didier van Moere

 

 

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