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De la modernité américaine

Paris
Théâtre du Châtelet
11/25/2000 -  
Steve Reich : Eight lines
Conlon Nancarrow : Etudes n° 1 et 7 (transcription Yvar Mikhashoff)
John Adams : Gnarly buttons - Symphonie de chambre


André Trouttet (clarinette)
Ensemble Intercontemporain, Jonathan Nott (direction)

Il serait commode de prétendre qu'en programmant John Adams et Steve Reich, Jonathan Nott, directeur musical de l'Ensemble Intercontemporain depuis le mois d'août dernier, fait entrer le(s) loup(s) américains dans la bergerie boulezienne. Mais ce qui est commode est souvent inexact, puisque cet ensemble joue Adams depuis de nombreuses années, aux côtés, pour le trimestre en cours, de Stravinski, Schreker, Eisler et Takemitsu. Ce qui n'empêche pas les musiciens de manifester assez visiblement différents degrés d'enthousiasme en jouant cette musique, mais c'est une autre histoire (question de génération?)...


S'agissant de l'organisation de ce concert, il faut hélas déplorer que soit poussé aussi loin le mépris du public. Le programme est entrecoupé par d'interminables changements de plateau, tandis que les spectateurs du premier balcon se plaignent des bruits consécutifs à l'enregistrement audiovisuel de ce spectacle.


Heureusement, la qualité artistique est toutefois au rendez-vous. Dans Eight lines (1983), "agrandissement" de son Octuor (1979), Reich fait converser huit cordes, deux flûtes et deux clarinettes autour de deux pianos qui tissent sans discontinuer une trame d'une fausse immobilité. Comme à l'ordinaire, le processus est poursuivi jusqu'à son terme sans désemparer, créant une sorte de rayonnement froid, mélange de gaieté vibrionnante et de propreté bien lisse. Dans cet esprit, la lecture du chef britannique est irréprochable, même si la présence de deux pianos est souvent trop envahissante au détriment des autres instruments.


L'instrumentation des Etudes n° 1 et 7 (1948) de Nancarrow proposée en 1995 par Yvar Mikhashoff amortit leur radicalisme. Elles sont en effet suffisamment conceptuelles pour se suffire à elles-mêmes dans leur version originale et pour avoir suscité l'admiration de Ligeti. Cependant, les couleurs de l'orchestre apportent un éclairage intéressant, en ce qu'elles suggèrent fortement le rapprochement avec Adams ou même Reich. Les musiciens répondent de façon stupéfiante aux défis techniques posés par ces pièces, littéralement "inhumaines", puisque conçues pour un instrument mécanique.


Les deux œuvres de John Adams, au centre de la soirée avant la représentation, le mois prochain, de son opéra El Niño, la Nativité, n'ont pas la même ambition.


Derrière l'un de ces titres qu'affectionne le compositeur américain, Gnarly buttons (1996) dissimule un concerto pour clarinette et petit ensemble (deux violons, alto, violoncelle, contrebasse, cor anglais, basson, trombone, banjo/mandoline/guitare, piano et deux synthétiseurs), qui rassemble, non sans évoquer L'Histoire du soldat, bon nombre d'ancêtres américains, depuis les hymnes religieux jusqu'aux danses du Far West, en passant par Copland, Bernstein et le jazz. Le pittoresque n'est jamais loin, à l'image de ce deuxième mouvement sous-titré Vache folle, dans lequel on entend effectivement un meuglement caractéristique. Le traitement de l'instrument soliste, bien mis en valeur par André Trouttet, recourt à ses facettes traditionnelles: volubile, ludique et tendre. Sans effusion particulière, Jonathan Nott souligne les contrastes entre les grandes lignes mélodiques et une trame sonore toujours mouvante.


Allant jusqu'à citer dans ses toutes dernières mesures la (première) Kammersymphonie de Schönberg, la Symphonie de chambre (1992) se caractérise par un langage plus contrapuntique et plus aventureux. Stridente et frénétique, elle rappelle ici ou là Ligeti, Jolivet et, toujours, Stravinski. La perfection instrumentale qui préside à cette interprétation convient idéalement à une partition qui rejoint finalement, dans un double souci de jeu et de distanciation, les... "musiques de chambre" du jeune Hindemith.




Simon Corley

 

 

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