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Intégrité Paris Hôtel de Soubise (Cour de Guise) 07/25/2012 - Franz Schubert : Sonate «Arpeggione», D. 821
Johann Sebastian Bach : Sonate pour violoncelle seul n° 1, BWV 1007
Kaija Saariaho : Sept Papillons
Anton Webern : Trois petites pièces, opus 11
Johannes Brahms : Sonate pour violoncelle et piano n° 2, opus 99 Florian Frère (violoncelle), Nathanaël Gouin (piano)
F. Frère
Toujours dans la cour de Guise de l’hôtel de Soubise, et dans les meilleures conditions qui soient (ciel immaculé, légère brise), le festival européen «Jeunes talents», bénéficiant enfin de cette tardive apparition de l’été, propose, après Camille Thomas et Beatrice Berrut, un autre duo violoncelle piano, celui formé par Florian Frère (né en 1987), ancien soliste de l’Orchestre français des jeunes et membre du Quatuor Voce depuis 2010, et Nathanaël Gouin (né en 1988), membre fondateur du Trio Werther.
Les deux musiciens ont construit leur programme en arche, autour d’une œuvre de Kaija Saariaho, compositeur invité de cette douzième édition, venue assister à la première partie de ce récital. Derrière un titre schumannien probablement trompeur, les Sept Papillons (2000) pour violoncelle solo dissimulent une succession poétique de gestes recherchant des sonorités souvent peu conventionnelles: arpèges, tremolos, harmoniques, cordes tapotées avec les doigts ou effleurées en cercles par l’archet. Florian Frère a choisi de la faire précéder d’un autre ensemble de sept pièces en solo, la Première Suite de Bach, et de la faire suivre d’un recueil cultivant également la concision, les Trois petites pièces (1914) de Webern, qu’il présente au public en quelques mots. Dans Bach, plutôt que les effets faciles, le jeune violoncelliste, sobre et serein, préfère aller à l’essentiel, jusque dans l’élusion de la plupart des reprises, mais ne manque pas pour autant de caractère (Menuets). Dans Webern, la concentration des interprètes et des auditeurs est mise à rude épreuve: les mouettes, fidèles au quartier, commentent la deuxième pièce par leurs cris remarquablement inventifs et les neuf coups de 21 heures sonnent au clocher voisin durant la troisième pièce.
Deux piliers du répertoire germanique encadrent ce précieux triptyque. Dans la Sonate «Arpeggione» (1824), Florian Frère joue sur la ligne, le phrasé et l’éloquence davantage que sur la puissance ou la couleur, particulièrement dans l’Allegro moderato initial (dépourvu de reprise), mais sans indécision, routine ou prudence, à l’image de l’Allegretto final, vivant et allant. C’est la Seconde Sonate (1886) de Brahms qui conclut: l’Allegro vivace, de nouveau sans sa reprise, demeure plus contrôlé que débridé, mais l’Adagio affettuoso n’en est pas moins lyrique, avec des pizzicati rageusement arrachés, l’Allegro passionato pas moins habité par l’urgence, et le Finale d’une fraîcheur presque juvénile.
Belle soirée, en fin de compte, qui aura permis de découvrir un violoncelliste intègre, s’attachant à valoriser davantage le texte que sa propre personnalité, à laquelle le piano, restant plutôt en retrait, laisse toutefois le champ libre. En bis, l’impeccable musicalité d’Après un rêve (1878) de Fauré confirme sans ambiguïté cette excellente impression.
Simon Corley
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