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Grandeur, beauté... et naïveté

Madrid
Teatro Real
05/24/2012 -  & 24, 27* mai, 2012
Richard Wagner: Rienzi (version de concert)
Andreas Schager (Rienzi), Anja Kampe (Irene), Claudia Mahnke (Adriano), Stephen Milling (Stefano Colonna), James Rutherford (Paolo Orsini), Friedemann Röhling (Orvieto), Jason Bridges (Baroncelli), Carsten Wittmoser (Cecco del Vecchio)
Orchestre et Chœurs du Teatro Real, Philharmonia Chor de Vienne, Andrés Máspero (chef du chœur), Alejo Pérez (direction musicale)


(© Javier del Real/TR)


Opéra de jeunesse de Richard Wagner, Rienzi a été composé après Les Fées et L’Interdiction d’aimer, mais avant le premier opéra qu’on considère à Bayreuth comme véritablement « wagnérien », Der fliegende Holländer. On dit que Rienzi est un bel exemple de « grand opéra ». Oui, certainement, mais avec une inspiration italienne tout au long de l’œuvre, surtout dans la deuxième moitié, composée juste après les années de Riga, jusqu’à sa première à Dresde. L’ombre de Bellini est présente dans les moments lyriques (l’air de d’Adriano, rôle travesti pour mezzo) tout comme les marches et la plupart des moments spectaculaires.



Rienzi n’est pas un titre négligeable, mais il a été négligé, et surtout par la faute de Wagner. L’illustre compositeur avait beaucoup de défauts, c’est dommage, mais les artistes ne sont pas de saints. Entre ses défauts mineurs –en comparaison avec le chauvinisme allemand de ses vingt dernières années, il y en a un peut-être plus visible que les autres : l’absence de reconnaissance vis-à-vis de ses défenseurs. Rienzi est son premier succès ; l’un des plus importants de son itinéraire artistique. Un opéra où on devine déjà quelques traits du Wagner des trois « opéras romantiques » (ce qu’il reste de l’italianisme bellinien dans Le Hollandais, l’air de Rienzi si près de la « chanson de l’étoile » de Tannhäuser…) Wagner n’est tout simplement pas reconnaissant envers son premier succès.



Rienzi est un opéra de qualité et il est important de le programmer de temps en temps, malgré un livret assez pauvre et naïf (inspiré par un roman de Bulwer-Lytton sur un moment de crise profonde de la papauté exilée), malgré les grands effectifs qu'il impose, et malgré la longueur excessive de l’original (« un » original, ou « plusieurs » originaux perdus, d’ailleurs). À Madrid, Rienzi est créé très tôt, dès le XIXe siècle mais globalement peu représenté. Nombreux étaient ceux qui disaient, ces jours-derniers « c’est mon premier Rienzi ». Et les enregistrements ne sont pas nombreux.



Malgré une substitution de dernier moment du rôle-titre, l’autrichien Andreas Schager a chanté un Rienzi lyrique et parfois vigoureux, jamais helden. Heureusement, les deux rôles féminins ont frôlé ou même parfois dépassé l’excellence. Celui d’Irène, la sœur du héros, est beau mais limité; Irène n’a pas véritablement une scène à elle, mais la voix est éclatante (parfois trop) de l’allemande Anja Kampe fait de son mieux pour donner de la splendeur au rôle mais répond parfois aux épanchements d’Adriano de façon si « forte » qu’on craint un détournement de la séquence prévue, l’amoureux dégoûté par la fugue un peu « mégère » (non apprivoisée) d’Irène. Mais finalement ils s’aiment, et la « catastrophe » a lieu comme prévu.



Peut-être le grand triomphe de ces trois représentations réside-t-il dans les rôles dits secondaires : la mezzo allemande Claudia Mahnke possède une voix éclatante - mais mesurée - belle, avec des graves impressionnants, un médium brillant et des aigus retentissants, le tout doublé d’un équilibre rare entre lyrisme et dramatisme. Son air est d’une beauté qui excède celle du reste de la partition. Milling, Rutherford, Röhling, Bridges et Wittmoser complètent efficacement une très belle distribution et servent une œuvre une rare et bienvenue.



A. Pérez (© Javier del Real/TR)



Mais l’autre grand héro de la soirée, c’est l’Argentin Alejo Pérez, un chef qui a dirigé plusieurs opéras contemporains (Maderna, Henze, Rihm, Eötvös, Pintscher) et dont le talent brille tout au long des trois heures et demie que dure cette représentation de Rienzi.Il excelle tout particulièrement dans les épisodes concertants qui enrichissent cette partition et montrent bien qu’il ne s’agit pas là d’un opéra « mineur ». La technique de Pérez est épurée, précise dans les détails et les ensembles. L’Argentin est également un chef vigoureux, capable de donner du sens, de l’élan à cet opéra de jeunesse, et grâce à lui on ne perd aucun moment de cette version de concert. Et l’orchestre est en forme, malgré l’inquiétante absence d’un directeur titulaire. Le chœur du Teatro Real, renforcé par le Philharmonia Chor de Vienna, contribuent au succès de cette soirée. Le résultat est splendide. Alejo Pérez, un nom à retenir.



Santiago Martín Bermúdez

 

 

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