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Beethoven à deux vitesses

Strasbourg
Palais de la Musique et des Congrès
04/19/2012 -  et 20 avril 2012
Ludwig van Beethoven : Concerto pour piano n° 5 «Empereur», opus 73 – Symphonie n° 3 «Héroïque», opus 55
Nikolai Lugansky (piano)
Orchestre Philharmonique de Strasbourg, Marek Janowski (direction)


M. Janowski (© Felix Broede)


Programme Beethoven on ne peut plus conventionnel, joué pour deux soirées consécutives. Et au moins pour ce premier concert, une grande salle du Palais des Congrès remplie jusqu’aux dernières rangées. Faudrait-il en conclure que seule une programmation aussi banale est encore susceptible de faire se déplacer un public en perte de motivation ? Ou que ce sont plutôt deux noms d’interprètes exceptionnels sur l’affiche qui ont suscité un déclic ? On penche plutôt pour la seconde hypothèse, mais ce n’est, hélas, pas certain...


Des noms exceptionnels, certes, mais du moins en ce qui concerne la prestation de Nikolai Lugansky dans le Cinquième Concerto de Beethoven, rien qui justifiait vraiment que l’on se dérange, si ce n’est pour assister à une lecture au mieux correcte d’un classique du répertoire. En regard de la flatteuse réputation du pianiste russe on ne peut qu’être étonné par un jeu sous-impliqué voire étriqué, qui exécute les traits beethoveniens en les détaillant à peine et surtout en ne les phrasant quasiment pas. On manque vraiment de véritable musique à dénicher derrière ces phrases débitées dans l’indifférence et ces traits virtuoses parfois mécaniques comme des carillons. Et si l’on ajoute que techniquement la prestation est loin d’être irréprochable, avec de vrais accrochages et de nombreux petits problèmes moins perceptibles de synchronisation des traits rapides entre les deux mains, imperfections qui ne diminuent pas mais au contraire empirent de mouvement en mouvement, on prend la mesure d’un véritable non-événement ou du moins d’un Beethoven « que c’est pas la peine ». Et cela Marek Janowski, malgré des tempi allègres et beaucoup d’attention, ne peut pas y changer grand chose. Méforme passagère du pianiste ? Répertoire inapproprié ? Le bis, un Prélude Op. 32 N° 5 de Rachmaninov que Lugansky connaît comme sa poche, nous rend heureusement pour trois minutes un pianiste plus attractif.


Incroyable changement d’atmosphère après l’entracte, pour une Troisième Symphonie de Beethoven que Marek Janowski parvient à débarrasser de toute impression de routine. Là encore les tempi laissent peu de place à l’alanguissement mais surtout le chef se révèle d’une présence physique impressionnante, semblant avoir en permanence l’œil et l’oreille à tout, au point, même, par exemple de réussir à rattraper un soupçon de début de défaillance de la trompette par un geste tellement intense que l’instrumentiste semble forcé de réintégrer une trajectoire plus juste. Cette façon prodigieuse de « jouer de l’orchestre » comme d’un instrument ne nous paraît donnée qu’aux plus grands, surtout avec un tel naturel. Et quel plaisir que d’entendre l’Orchestre Philharmonique de Strasbourg à un tel niveau de musicalité : cors justes, superbe pupitre de violoncelles, formidable écoute mutuelle des bois, galvanisée par Sébastien Giot et Sébastien Koebel qui vraiment se surpassent au hautbois et à la clarinette... Bravo ! Rien d’autre à ajouter, si ce n’est qu’une phalange capable de jouer avec autant de prestance se doit de nous faire bénéficier de cette compétence le plus souvent possible, même dans des contextes moins stimulants.



Laurent Barthel

 

 

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