About us / Contact

The Classical Music Network

Lausanne

Europe : Paris, Londn, Zurich, Geneva, Strasbourg, Bruxelles, Gent
America : New York, San Francisco, Montreal                       WORLD


Newsletter
Your email :

 

Back

Alcina les yeux fermés

Lausanne
Salle Métropole
02/19/2012 -  et 22*, 24, 26 février 2012
Georg Friedrich Haendel: Alcina
Olga Peretyatko (Alcina), Florin Cezar Ouatu (Ruggiero), Sophie Graf (Morgana), Delphine Galou (Bradamante), Juan Francisco Gatell (Oronte), Giovanni Furlanetto (Melisso), Paolo Lopez (Oberto), Corps de ballet du Théâtre de St-Gall
Chœur de l'Opéra de Lausanne, Véronique Carrot (chef de chœur), Orchestre de Chambre de Lausanne, Ottavio Dantone (direction musicale)
Marco Santi (mise en scène et chorégraphie), Jean-Philippe Guilois (assistant à la mise en scène), Alexandra Brenk (assistante à la chorégraphie), Katrin Hieronimus (décors), Katharina Beth (costumes), Guido Petzold (lumières), Kristian Breitenbach (vidéo)
Production de l'Opéra de Lausanne, en coproduction avec le Théâtre de St-Gall


Alcina est le trente-quatrième opera seria de Haendel, qui parvint en peu de temps à imposer le répertoire italien à Londres, grâce notamment à sa propre production lyrique. L'ouvrage, créé en 1735 à Covent Garden, fut un énorme succès, au point d'être joué dix-sept fois la même année, puis d'être affiché à plusieurs reprises les deux années suivantes avant de tomber dans l'oubli. Il faudra attendre 1957 pour voir l'œuvre réapparaître sur une scène de la capitale britannique, avec une jeune cantatrice encore peu connue, nommée Joan Sutherland, dans le rôle-titre. Alcina marque par ailleurs une rupture pour Haendel: les ouvrages qu'il écrira par la suite seront tous des fiascos, ce qui incitera le compositeur à abandonner l'opéra pour l'oratorio en langue anglaise.


Croisé juste avant le début de la représentation, le directeur de l'Opéra de Lausanne, Eric Vigié, s'enthousiasme pour Alcina, l'un des rares opéras, selon lui, dont le livret est à caractère éminemment politique. Le metteur en scène qu'il est se prend à imaginer l'héroïne en Marie-Antoinette régnant sur son domaine de Trianon et menant son petit monde à la baguette, avant que tout s'écroule comme un château de cartes, dans le sillage de la Révolution. Malheureusement, ce qu'on découvre ensuite sur le plateau de la salle Métropole est loin d'être aussi passionnant. La partie scénique du spectacle a été confiée à un chorégraphe, Marco Santi, responsable du ballet du théâtre de St-Gall, petite ville suisse située non loin de Zurich, où cette Alcina a vu le jour en mars 2011. Dans un décor rudimentaire constitué par un échafaudage en bois sur trois niveaux entouré de garde-robes et de miroirs, le metteur en scène double pratiquement chaque air de chorégraphies répétitives évoquant des étreintes lascives et de projections vidéo. Les évolutions des jeunes danseurs sont agréables à regarder, certes, mais n'apportent pas grand-chose, sans parler des projections, ne faisant que surligner platement la musique. Tout cela est bien redondant. En fin de compte, les spectateurs sont tellement sollicités qu'ils peinent à se concentrer sur le chant.


Et c'est bien dommage, car l'Opéra de Lausanne a eu la main particulièrement heureuse dans la distribution des rôles. Tous les personnages sont confiés à de jeunes chanteurs qui s'en tirent avec les honneurs. On admire d'abord la superbe Morgana de Sophie Graf, qui enchaîne les vocalises avec aplomb et enchante tout autant dans les passages lyriques. On se laisse aussi séduire par les couleurs vocales et l'impétuosité de Delphine Galou en Bradamante. Florin Cezar Ouatu possède les aigus de Ruggiero et sait conférer à sa voix des accents virils, même si la projection est quelque peu limitée. En écoutant Olga Peretyatko, on se dit que, décidément, la chanteuse russe est dotée d'une voix magnifique, avec un timbre ambré et une riche palette de couleurs, et qu'elle sait donner de l'intensité à son personnage, tour à tour séductrice, ombrageuse ou résignée. Les vocalises ne sont pas toujours des plus précises, mais la chanteuse a été annoncée souffrante. Les rôles secondaires ne laissent rien à désirer, à commencer par Juan Francisco Gatell, Oronte intrépide à la belle voix de ténor léger. Paolo Lopez fait forte impression en Oberto et Giovanni Furlanetto incarne un Melisso souverain. Dans la fosse, Ottavio Dantone cisèle la partition en orfèvre, à la tête d'un Orchestre de Chambre de Lausanne en forme superlative. La lecture aurait peut-être pu être un peu plus nerveuse et les contrastes plus appuyés. Quoi qu'il en soit, un spectacle à savourer sans modération, mais les yeux fermés.



Claudio Poloni

 

 

Copyright ©ConcertoNet.com