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Très grande classe

Paris
Salle Pleyel
02/06/2012 -  et 26, 27, 28 janvier (New York), 3 (Luxembourg), 8 (Frankfurt), 13 (Amsterdam) février 2012
Ludwig van Beethoven : Concerto pour violon et orchestre en ré majeur, opus 61
Igor Stravinski : Symphonie en trois mouvements
Maurice Ravel : Daphnis et Chloé, Suite n° 2

Frank Peter Zimmermann (violon)
New York Philharmonic, Alan Gilbert (direction)


A. Gilbert (© Chris Lee/New York Philharmonic)


Dans le cadre d’une vaste tournée européenne de presque trois semaines qui les a déjà conduits à Cologne et à Luxembourg, l’Orchestre philharmonique de New York et son chef titulaire Alan Gilbert s’arrêtent le temps de deux concerts à la Salle Pleyel, qui les avait déjà accueillis en octobre 2010 pour un concert quelque peu mitigé. Salle comble ce soir pour ce premier concert qui aura été un grand moment pour tous les spectateurs, les artistes de la soirée ayant interprété avec une grande classe un programme taillé à la mesure de la prestigieuse phalange.


On connaît bien évidemment les qualités d’un orchestre qui, fondé en 1842, figure depuis longtemps parmi les Big Five américains. Dans la première œuvre au programme, le Concerto pour violon (1806) de Ludwig van Beethoven (1770-1827), l’Orchestre philharmonique de New York se veut chambriste. Bien que doté de quarante-huit cordes (signalons en passant que c’est une femme, Sheryl Staples, qui occupe la place de concertmaster), Alan Gilbert dirige un orchestre étonnement léger qui évolue avec une souplesse admirable (surtout dans les deux premiers mouvements), permettant en outre à quelques musiciens (Judith LeClair au basson!) de briller dès cette première partie. Si Frank Peter Zimmermann n’est pas un inconnu pour le Philharmonique de New York avec lequel il a donné, en octobre dernier, le Concerto «A la mémoire d’un ange» de Berg, le Concerto de Beethoven n’est pas davantage une découverte pour le soliste. Il ne faut pas se fier à son visage enfantin: à 47 ans, Zimmermann le joue depuis déjà près de trente ans. Sa maîtrise est impressionnante, le violoniste se voulant conquérant du début à la fin, accélérant au besoin certains traits, semblant presque bouillonner d’impatience face à un orchestre beaucoup plus sage. La technique de Zimmermann se double d’une musicalité sans faille, qu’il s’agisse des aigus limpides ou des graves d’une chaleur communicative, même si le jeu peut parfois sembler un tant soit peu démonstratif: le résultat n’en est pas moins impressionnant.


Après la phase chambriste, voici venu le moment pour l’Orchestre philharmonique de New York de mettre en valeur les qualités de ses solistes, Glenn Dicterow ayant, pour cette seconde partie, pris sa place habituelle de concertmaster qu’il occupe depuis 1980. La Symphonie en trois mouvements (1942-1945) d’Igor Stravinski (1882-1971) s’imposait non seulement parce qu’elle a été créée par le Philharmonique de New York en juin 1946 mais aussi parce qu’elle fait appel à chaque individualité au sein de l’orchestre, cette partition foisonnante permettant en effet d’entendre chaque pupitre sans aucune exception. Les affinités de l’orchestre avec l’œuvre de Stravinski sont évidentes: Alan Gilbert conduit l’ensemble avec une maîtrise appelant tous les éloges, veillant à la fois à l’équilibre de l’ensemble et à la mise en lumière des traits de tel ou tel. A la violence des attaques du premier mouvement (où apparaissent quelques mélodies déjà présentes dans Le Sacre et où brillent les interventions humoristiques de la petite harmonie) succède, dans le deuxième mouvement (Andante), un climat débonnaire où, là encore, les bois s’illustrent de la plus belle manière. Quant au troisième mouvement (Con moto), il n’est pas sans rappeler l’atmosphère burlesque de la Circus Polka (1942). Si chaque instrumentiste mériterait d’être cité, on insistera seulement sur le piano d’Eric Huebner dans le premier mouvement, tout en contretemps et accents jazzy, et sur la harpe de Nancy Allen dans le deuxième.


Après Daniel Barenboïm et Lorin Maazel et en attendant Riccardo Chailly dans quelques semaines, c’est donc au tour de l’Orchestre philharmonique de New York de rendre hommage à la musique de Maurice Ravel (1875-1937) avec ce cheval de bataille qu’est la Seconde Suite de Daphnis et Chloé (1912). Le pupitre de flûtes (au sein duquel brille encore une fois Robert Langevin) inaugure magnifiquement ce ténébreux «Lever du jour» où se distingue rapidement l’ensemble de l’orchestre, Gilbert conduisant ce premier crescendo avec une douceur implacable. Les hautbois lancent ensuite la «Pantomime», douce rêverie qui permet à la clarinette (superbe Mark Nuccio!) d’inviter la flûte à une longue mélopée à peine dérangée par quelques volutes de la part des cordes ou des percussions facétieuses. Inaugurée par un imposant choral de cuivres, la «Danse générale», lancée tambour battant par Alan Gilbert, conclut ainsi de la plus belle manière ce programme fort riche.


Devant l’insistance d’un public entièrement conquis, Alan Gilbert annonça dans un français parfait le bis qui, tout en restant dans le répertoire national, nous conduisit dans la péninsule ibérique avec une entraînante Espana d’Emmanuel Chabrier (1841-1894), où la suavité des cordes se doublait de bois toujours à leur meilleur. Les salves d’applaudissements conduisirent ensuite Alan Gilbert, revenant des coulisses, à inviter cinq instrumentistes de l’orchestre (un cor, deux trompettes, un trombone et un tuba) à entonner une petite pièce de jazz: les cinq solistes s’amusent follement dans cette conclusion musicale, se baladant même sur scène au milieu de leurs confrères pour le plus grand plaisir du public qui chavire définitivement.


La grande classe avions-nous dit? Non: la très grande classe.


Le site de l’Orchestre philharmonique de New York
Le site d’Alan Gilbert



Sébastien Gauthier

 

 

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