About us / Contact

The Classical Music Network

Zurich

Europe : Paris, Londn, Zurich, Geneva, Strasbourg, Bruxelles, Gent
America : New York, San Francisco, Montreal                       WORLD


Newsletter
Your email :

 

Back

Politique et opéra ne font pas bon ménage

Zurich
Opernhaus
10/20/2011 -  et 23, 26, 30* octobre, 6, 13, 22, 27 novembre 2011, 1er, 5, 8 janvier 2012, 21, 24 juin 2012
Giuseppe Verdi: Otello
Fiorenza Cedolins*/Barbara Frittoli (Desdemona), Judith Schmid*/Stefania Kaluza (Emilia), José Cura*/Peter Seiffert (Otello), Thomas Hampson*/Anthony Michaels Moore (Jago), Stefan Pop (Cassio), Benjamin Bernheim (Rodrigo), Pavel Daniluk (Lodovico), Tomasz Slawinski (Montano), Evgeny Sevastyanov (Un araldo)

Chœur de l’Opernhaus de Zurich, Jürg Hämmerli (préparation), Orchestre de l’Opernhaus, Daniele Gatti (direction musicale)
Graham Vick (mise en scène), Paul Brown (décors et costumes), Jürgen Hoffmann (lumières)


(© Suzanne Schwiertz)


Peter Seiffert aurait dû faire ses débuts en Otello dans la nouvelle production du chef-d'œuvre de Verdi programmée à l'Opernhaus de Zurich. Victime d'une bronchite quinze jours avant la première, il a laissé sa place à José Cura pour les premières représentations, mais devrait chanter le Maure au cours des dernières soirées de la série. José Cura est un habitué d'Otello, un rôle qu'il a interprété dans les plus grands théâtres, notamment à Zurich, où il faisait déjà partie de la distribution de la production précédente. Sa voix sombre et corsée, mais toujours éclatante dans les aigus, convient parfaitement au personnage. On le sait, le ténor est une bête de scène; vocalement par contre, il ne s'embarrasse pas toujours de nuances. Quoi qu'il en soit, on admire la vitalité et la force qu'il insuffle à son incarnation. On ne peut que regretter que la caractérisation du rôle soit unidimensionnelle car le metteur en scène a l’étrange idée de considérer Otello comme une brute épaisse qui n'attend qu'un signe de Jago pour condamner Desdémone, et non comme un homme amoureux qui se laisse petit à petit gagner par le doute puis la jalousie. Thomas Hampson étrenne les habits de Jago. Le chanteur américain n'est pas né baryton Verdi, mais sa forte présence scénique et son chant incandescent offrent un portrait subtil et intéressant du personnage, dont les actions sont ici motivées non pas tant par une méchanceté intrinsèque mais plutôt par l'amertume et le ressentiment. La Desdémone de Fiorenza Cedolins est une pure merveille: ses pianissimi éthérés sont un régal pour les oreilles, de même que son sens des nuances et sa maîtrise de la ligne vocale. Dommage que le metteur en scène ait décidé d'en faire un personnage en retrait, presque de second plan. On relèvera aussi l’excellente prestation de Benjamin Bernheim en Rodrigo.


Dans le programme, Graham Vick s'étend sur l'importance de la couleur de la peau d'Otello. Ici, elle est blanche, mais le metteur en scène d’expliquer qu'il est impossible aujourd'hui en Grande-Bretagne de concevoir Othello/Otello autrement que noir. Soit. Il évoque également les libertés prises par Boito – le librettiste de Verdi – avec la pièce de Shakespeare. Une nouvelle fois, soit. Et que voit-on sur scène: un spectacle fourre-tout, sans queue ni tête, dans lequel on recherche en vain, si ce n'est des idées, du moins des éléments auxquels se raccrocher. Une mosquée et une croix font office de décors, séparées par un blindé et des barbelés, références à une guerre moderne, au même titre que les tenues des personnages. Jusque-là, on peut encore comprendre. Mais que viennent faire ici ces affiches montrant des moutons blancs et d'autres noirs, allusion aux campagnes virulentes d'un parti d'extrême-droite prônant la halte à l'immigration, celui-là même qui a incité la majorité des Suisses à se prononcer contre l'interdiction des minarets? Qui plus est, la première a eu lieu le week-end où les Helvètes élisaient leur nouveau parlement. Totalement déplacé et ridicule, un ratage complet cette nouvelle production d’Otello. Heureusement, ce qui vient de la fosse est d’un tout autre niveau. Daniele Gatti privilégie l’aspect intimiste du drame, comme si l’ouvrage de Verdi était un opéra de chambre, et s’attache à faire ressortir chaque détail de la partition. Une mention particulière est à décerner aux violoncelles dans le duo d’amour du premier acte et aux souffleurs dans la prière de Desdémone.



Claudio Poloni

 

 

Copyright ©ConcertoNet.com