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Bellisima serata

Madrid
Teatro Real
10/04/2011 -  & 5 octobre 2011
Wolfgand Amadeus Mozart: La finta giardiniera K. 196
Sophie Karthäuser (Sandrina), Alexandrina Pendatchanska (Arminda), Sunhae Im (Serpetta), Marie-Claude Chappis (Ramiro), Jeffrey Francisco (Don Anchise), Jeremy Ovenden (Belfiore), Michael Nagy (Nardo).

Freiburger Barockorchester, René Jacobs (direction musicale), Anne-Katharine Schreiber (concertino)


(© Javier del Real)



Cette Finta giardiniera était prévue pour le mois de décembre dernier, mais une grève des contrôleurs aériens a isolé complètement le pays, et parmi les victimes se trouvait la petite jardinière dont les ruses et les mésaventures sont le fruit d’un librettiste un peu décalé. Heureusement, la La finta giardiniera est arrivé dans les mains de Jacobs et avec une équipe d’un niveau rare, parfois insurpassable. Heureusement, oui, parce que maintenant on a pu mesurer ce qu’on aurait raté si Jacobs et ses musiciens avait annulé son contrat.



Il s’agit d’une mise en espace. L’orchestre, moins de 40 musiciens jouant sur des instruments anciens, occupe la scène, ou ce qu’il reste parce un grand rideau cache le décor d’Elektra. Et les sept chanteurs-comédiens jouent leurs rôles comme dans une mise en scène tout à fait normale. Le résultat est très théâtral, vif, avec un équilibre superbe entre buffo et dramatique. La finta giardiniera est un opéra de 1775, assez méconnu. Jacobs récupère ici une nouvelle édition. Pas de chœur, un air suit l’autre, parfois un duetto, de rares ensembles, des finales inouïs pour l’époque (le deuxième acte, et non le troisième, fait figure d’une annexe où l’on marie tout le monde et où l’action semble se terminer une fois pour toutes : les librettistes n’ont jamais été à la hauteur de Mozart, bien sûr, ce qui reste un cas particulier dans l’œuvre du compositeur).



L’opéra est bouffe, mais avec des moments graves, sinon dramatiques. On trouve certains passages où Ramiro (mezzo) annonce l’Electre d’Idoménée; ou encore Arminda préfigure Donna Anna. Ce n’est pas un opéra de la période précoce de Mozart, mais une annonce de ce qui arrivera, un opéra « précurseur » pourrait-on dire aujourd’hui, au regard des sept derniers titres du génie autrichien.


L’orchestre est magnifique, toujours en tension, agile, vif, dirigé par un René Jacobs en pleine forme. De plus, la distribution frôle l’idéal. Le protagoniste partage sa primauté, pour ainsi dire. Sophie Karthäuser possède une voix raffinée, lyrique mais plutôt légère, nuançant la beauté délicate de la soprano-jeune dame. Voilà une comédienne au glamour plus éclatant que frappant, dotée, en plus, d’un formidable sens de la mesure. Alexandrina Pendatchanska, plus dramatique, plus résistante, avec d’avantage d’envergure, possède une voix qui ne manque pas de caractère, charnue et aux très belles couleurs. Sunhae Im est une soubrette dont le sens de la comédie plein de charme et de malice, espiègle et coquine. La voix est belle, tout à fait belcantiste, comme c’est le cas des autres chanteuses. Ce n’est pas encore Susanna, mais elle n’en est pas si loin. Enfin, le rôle travesti de Ramiro est chanté par la mezzo suisse Marie-Claude Chappuis : une voix extraordinaire, de grand ampleur, puissante et également pleine de caractère. Ramiro et Arminda vont se marier à la fin de l’opéra : que va-t-il advenir d’un couple dont les deux caractères (si l’on s’en tient à la voix et non au texte) sont si forts? Cela va-t-il tenir ?



Jeremy Ovenden est un ténor de la dynastie des ténors légers (et lyriques) du répertoire mozartien, un peu Dermota, un tenorino nettement belcantiste. Michael Nagy est une jeune basse stupéfiante ; tout le monde est surpris par cette voix profonde et large pour tout jeune chanteur. La voix de Jeffrey Francis n’a rien de particulièrement remarquable, mais il est efficace et très bon comédien dans son rôle de directeur dirigé, de manipulateur manipulé bien connu dans la dramaturgie mozartienne ; ce qui n’est pas trop facile.



Enfin, Jacobs a donné le sens et l’athlétisme nécessaires (presque trois heures de musique, si l’on ne compte pas l’intermède) pour cette très belle soirée d’opéra. Dans la prouesse il faut remarquer l’accompagnent des récitatifs par Sebastian Wienand (forte-piano), Wiebke Weidanz (clavecin) et, si je ne me trompe pas, Guiood Larisch au violoncelle. Deux jours seulement, mais quel évènement ! On pensait assister à une soirée agréable, belle, même. Mais ce fut plus que cela. Beaucoup plus.



Santiago Martín Bermúdez

 

 

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