About us / Contact

The Classical Music Network

Paris

Europe : Paris, Londn, Zurich, Geneva, Strasbourg, Bruxelles, Gent
America : New York, San Francisco, Montreal                       WORLD


Newsletter
Your email :

 

Back

L’original et la copie

Paris
Studio Le Regard du cygne
09/23/2011 -  
Jean-Baptiste Doulcet : Sonate pour violon et piano – Etudes pour piano n° 1, n° 3 et n° 6
Henryk Wieniawski : L’Ecole moderne: «La cadenza», opus 10 n° 7 – Fantaisie brillante sur «Faust», opus 20
Eugène Ysaÿe : Sonate pour violon seul n° 3 «Ballade», opus 27 n° 3
Maurice Ravel : Sonate pour violon et piano n° 2
Karol Szymanowski : Mythes, opus 30: «La Fontaine d’Aréthuse»

Fédor Roudine (violon), Jean-Baptiste Doulcet (piano)




Sur les hauteurs de Belleville, dans une sorte de petite halle d’une centaine de places située au fond d’une cour d’immeuble, le studio Le Regard du cygne alterne danse (contemporaine) et musique. L’essentiel du second volet de la programmation est confié, depuis 1986, aux «Carnegie’Small», sous la direction artistique de Philippe Coutelen. Le violoniste suisse, membre de l’Ensemble orchestral de Paris, tend à privilégier ses confrères, et pas des moindres – comme Mark Lubotsky, Graf Mourja, Henning Kragerud ou Sarah Nemtanu – mais la présente saison, restreinte, ainsi qu’il l’explique lui-même, à quatre concerts en raison de la suppression des subventions, déjà passablement réduites, ne néglige pas le piano (Sarah Lavaud «Autour de l’Espagne» le 5 novembre) et s’attache à faire découvrir de jeunes talents.


Ainsi de ce récital associant, sous le titre «Passeports musicaux», deux artistes qui, nés en 1992, n’ont donc pas encore vingt ans. Fédor Roudine, petit-fils du compositeur Edison Denisov (1929-1996) et fils du violoncelliste et chef Alexander Rudin, vit à Paris – où son grand-père passa les dernières années de sa vie – depuis son plus jeune âge; élève de Zakhar Bron et de Svetlin Roussev, il a été finaliste au concours Paganini de Gênes (2010). Jean-Baptiste Doulcet, improvisateur, satisfait sa passion pour le cinéma en accompagnant des films muets, et est également compositeur. La notice distribuée au public le décrit non sans lucidité comme adepte d’un «romantisme français hypertardif» et c’est ce que montre d’emblée sa Sonate pour violon et piano (2010) – «que j’ai écrite moi-même», comme il prend la peine de le préciser: le temps semble s’être arrêté vers 1900, à l’époque des premières œuvres de Rachmaninov. Tout au long de ces deux mouvements d’une durée d’un peu plus d’un quart d’heure qui feraient passer Stéphane Blet pour un dangereux progressiste, l’hésitation est permise entre naïveté et pastiche, mais face à une partie dont les exigences techniques semblent pourtant raisonnables, le violoniste fait davantage valoir de belles couleurs qu’une justesse irréprochable. Des aigus incertains et des traits savonnés confirment qu’il n’est pas encore tout à fait à l’aise dans «La cadenza», septième des dix Caprices-Etudes (pour violon seul) de L’Ecole moderne (1854) d’un Wieniawski alors âgé, lui aussi, de dix-neuf ans.


Les Première, Troisième et Sixième des Etudes pour piano seul de Doulcet sont de la même veine stylistique que sa Sonate: si la mèche rebelle est lisztienne, comme il se doit cette année, le langage s’aventure presque jusqu’à Scriabine, pour des effets extérieurs et tapageurs dont la sincérité n’est pas en cause mais dont l’intérêt laisse perplexe. La première partie du récital s’achève sur une note plus encourageante, une très belle Troisième Sonate «Ballade» (1923) d’Ysaÿe, où Roudine s’engage pleinement sans perdre le contrôle de son jeu.


C’est également ce qui caractérise, après l’entracte, la Seconde Sonate (1927) de Ravel, avec notamment un «Blues» ni exagéré, ni caricatural. Doulcet déploie davantage de fougue que de précision, au point qu’une touche noire s’envole et atterrit deux mètres derrière le clavier – on apprendra plus tard que c’est un mi bémol. Voilà qui ne simplifie certainement pas la partie de piano, d’une volubilité déjà passablement exigeante, de «La Fontaine d’Aréthuse», premier des trois Mythes (1915) de Szymanowski. Très à son avantage dans cette musique hélas trop peu jouée, Roudine conclut sur une interprétation exemplaire de la Fantaisie brillante sur «Faust» (1866) de Wieniawski, dont son partenaire prend l’accompagnement très au sérieux. En bis, l’arrangement par Jascha Heifetz de la «Vocalise», dernière des quatorze Mélodies de l’Opus 34 (1912) de Rachmaninov atteste de la pertinence de l’adage selon lequel il faut toujours préférer l’original à la copie.


Le site du studio Le Regard du cygne
Le site de Carnegie’Small



Simon Corley

 

 

Copyright ©ConcertoNet.com