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Un Mahler intellectuel

Paris
Salle Pleyel
05/31/2011 -  
Gustav Mahler : Symphonie n° 2 en ut mineur «Résurrection»

Laura Claycomb (soprano), Katarina Karnéus (mezzo-soprano)
Chœur de Radio France, Matthias Brauer (chef de chœur), San Francisco Symphony, Michael Tilson Thomas (direction)


M.Tilson Thomas


C’est une fois encore un public extrêmement nombreux qui est venu écouter ce second concert donné par l’Orchestre symphonique de San Francisco à la salle Pleyel, dans le cadre d’une vaste tournée européenne de près de trois semaines qui l’aura conduit de Prague à Lisbonne en passant notamment par Vienne et Bruxelles. Les œuvres au programme alternent répertoire contemporain et grands classiques comme l’avait illustré le concert de la veille. Néanmoins, saisissant à la fois l’occasion de fêter à leur tour le centenaire de la mort de Gustav Mahler (1860-1911) et l’aboutissement discographique d’une intégrale des symphonies du compositeur autrichien, l’orchestre et son directeur musical Michael Tilson Thomas lui ont, pour cette tournée, offert une place de choix. Après les Sixième et Neuvième, avec laquelle il fit ses débuts avec l’orchestre en 1974, voici donc venu le temps d’écouter la Deuxième, œuvre programmatique géniale dont la composition s’est étalée entre 1888 et 1894.


Après avoir entendu cette symphonie jouée à plusieurs reprises dans les salles parisiennes au cours des derniers mois, que ce soit par le Concertgebouw d’Amsterdam, par son petit frère de Rotterdam, par son cousin oriental du Mariinsky ou par un des orchestres de la capitale, les mélomanes pouvaient se livrer au toujours difficile exercice de la comparaison. Or, force est de constater qu’à ce petit jeu, l’Orchestre symphonique de San Francisco est sur une des plus hautes marches.


En dépit de quelques inévitables imperfections (les cors dans le premier mouvement, une clarinette en mi bémol au souffle court et poussif ou des bassons aux attaques approximatives dans le troisième) ou de certaines déceptions (un premier violon solo, Alexander Barantschik, aux interventions généralement peu lyriques), on ne peut qu’être bluffé par la qualité globalement exceptionnelle d’un orchestre qui passe depuis des décennies pour être l’un des meilleurs outre-Atlantique. Même si le pupitre des violons manque parfois de volume, on frissonne en entendant les interventions des cordes (les contrebasses et violoncelles au début du premier mouvement, les altos dans le deuxième) et on admire du début à la fin les cuivres (sept cors sans compter les quatre autres requis en coulisses pour les fameux échos au début du «Im Tempo des Scherzo» final, les sept trompettes, les quatre trombones et le tuba) dont l’éclat et la cohésion furent pour beaucoup dans la réussite de l’interprétation.


Il faut dire que l’orchestre bénéficie d’une très grande clarté dans les plans sonores et c’est d’ailleurs peut-être là que la question de l’interprétation en vient à se poser: la vision de «MTT» n’est-elle pas trop intellectuelle, trop analytique, voire trop distanciée pour une symphonie de Mahler? Portant beau pour ses soixante-six ans, petites lunettes sur le nez, Michael Tilson Thomas, que l’on a parfois présenté comme le digne héritier de Leonard Bernstein, développe pourtant une direction autrement plus sobre... Ne s’animant que rarement – dans le deuxième mouvement, il se laissera pourtant aller à quelques balancements du corps jusqu’à présenter son profil aquilin au public mais ce sera bien sa seule effusion – Michael Tilson Thomas préfère au pathos la totale maîtrise d’une partition qu’il décortique sous nos yeux dans les moindres détails, nous faisant même prendre conscience de tel ou tel trait orchestral, de tel ou tel contrechant que nous n’avions peut-être encore jamais si bien perçu en dépit d’une fréquentation assidue de cette symphonie. Car d’émotion, il n’y aura point ou que trop peu. Même dans les parties chantées (les prestations de Laura Claycomb et de Katarina Karnéus s’avérant belles sans être exceptionnelles) où brille le Chœur de Radio France (notamment les basses), le chef américain reste dans une approche prudente qui, même s’il préfère déposer sa baguette pour ne diriger la fin de l’œuvre qu’avec les mains, continuera jusqu’à l’accord final de privilégier l’analyse réfléchie sur une spontanéité souffrant quelque désordre.


Même si ce concert aura encore une fois démontré la qualité des grandes phalanges américaines et le talent de «MTT» (qui a d’ailleurs livré au disque une version assez proche de celle de ce soir, avec Isabel Bayrakdarian et Lorraine Hunt en solistes), on lui préfèrera certains concurrents passés qui avaient su, tout simplement, donner davantage de vie à la bien nommée Résurrection.


Le site de Laura Claycomb



Sébastien Gauthier

 

 

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